Opinion Outre-Mer
12H36 - mardi 9 septembre 2025

Santé mentale : la jeunesse ultramarine en chute libre

 
Santé mentale : la jeunesse ultramarine en chute libre

Santé mentale : la jeunesse ultramarine en chute libre

Les chiffres claquent comme une alerte rouge. Selon une récente étude, près de 39 % des jeunes des Outre-mer souffrent de dépression, contre un quart de leurs homologues hexagonaux. Presque un sur deux se dit insatisfait des services publics censés les accompagner. Résultat : une génération entière s’avance au bord du gouffre, avec un sentiment de désarroi qui ne cesse de grandir.

Le constat est brutal : les structures spécialisées sont quasi inexistantes, les professionnels de santé mentale trop rares. Psychologues, psychiatres, assistantes sociales : la pénurie est telle que beaucoup renoncent à chercher de l’aide. Dans ce vide institutionnel, les jeunes se tournent vers des palliatifs à double tranchant : réseaux sociaux, addictions, comportements à risques. Faute de réponses adaptées, le malaise s’enkyste, glisse vers un chaos mental qui menace de se transformer en trou noir.

Ce désarroi a pourtant ses visages, comme celui de Daly. L’artiste, connu depuis longtemps pour son engagement, multiplie les initiatives. Après avoir fondé l’association Tout est possible puis collaboré avec la ville des Abymes, il a franchi une nouvelle étape en rejoignant en 2024 le Conseil départemental comme chef de projet « Ambassadeur de la jeunesse ». Son credo est clair : ne pas abandonner cette génération en perdition, redonner espoir et perspectives à des jeunes qui ne croient plus dans les promesses institutionnelles.

Car derrière les statistiques, c’est une réalité quotidienne qui s’impose. Des adolescents et jeunes adultes coincés entre la difficulté de se projeter dans l’avenir et l’absence de relais crédibles pour les accompagner. L’isolement est renforcé par le manque d’espaces d’écoute et de lieux de prise en charge adaptés. Les pouvoirs publics tardent à reconnaître l’urgence, alors même que la santé mentale devient l’un des enjeux majeurs du XXIe siècle.

Les Outre-mer, déjà fragilisés par le chômage, la précarité et l’éloignement des grandes structures de soins, voient leur jeunesse basculer plus vite encore que dans l’Hexagone. Si rien n’est fait, la spirale risque d’emporter une génération entière, privée des ressources nécessaires pour affronter ses démons.

À l’heure où les chiffres explosent et où les témoignages s’accumulent, une évidence s’impose : sans moyens massifs, sans politique ambitieuse, sans reconnaissance du problème, le chaos mental des jeunes ultramarins pourrait devenir une véritable bombe sociale. En attendant, la mobilisation citoyenne, à l’image de Daly et de quelques associations, reste l’un des rares remparts face à l’indifférence générale.

Patrice Clech