
Bruno Retailleau arrive demain en Martinique, le jour où le tribunal de Fort-de-France rendra un verdict très attendu dans une des plaintes qu’a déposées l’ancien préfet de Martinique, Jean-Christophe Bouvier, fin 2024.
A la suite de la fameuse intrusion dans la résidence du préfet le 11 novembre 2024 de Rodrigue Petitot, alias le « R », le leader des violences du mouvement contre la vie chère avait été condamné à une peine bien symbolique en première instance. Ce fait de violence avait été commis lors de la visite en Martinique du ministre François-Noël Buffet, chargé des Outre-mer à l’époque [notre photo], et aujourd’hui ministre délégué auprès du ministre de l’Intérieur.
Le parquet général avait fait appel, point essentiel dans le propos qui va suivre, de la condamnation trop symbolique du leader ultra-autonomiste. Dans ses réquisitions, l’avocate générale avait demandé 15 à 18 mois d’emprisonnement avec mandat de dépôt à l’endroit de Rodrigue Petitot. Le verdict, qui suscite déjà des appels à manifester devant le tribunal de Fort-de-France, sera donc rendu au moment de l’arrivée de Bruno Retailleau.
Le préfet Bouvier a déposé plusieurs plaintes. La justice a donc du pain sur la planche : menaces de mort, agression physique, insulte, diffamation, usurpation d’identité, rarement préfet de la République n’avait subi autant d’attaques sur sa personne.
Ces agressions commises contre le préfet fin 2024 ont été largement suscitées, encouragées par un climat de terreur et de haine sur les réseaux sociaux et dans la rue, entretenu par le RPPRAC et son leader maximo Rodrigue Petitot qui répondra donc demain de ses actes.
Le préfet Bouvier a dû gérer des tensions sociales, des violences contre les entreprises, les maires et les symboles de l’Etat, er une sortie de crise avec une négociation serrée sur la vie chère. Pourtant, il a tenu son rang, suscitant le respect de l’immense majorité des Martiniquais, quitte à s’attirer la haine des extrémistes.
Son parcours, jusque dans l’épreuve, illustre cette fonction ingrate : servir sans faiblir, même quand la violence s’invite dans le quotidien.

Un parcours républicain
Car Jean-Christophe Bouvier n’est pas homme à se laisser abattre. Depuis le 1er janvier dernier, il est de retour à Paris, après trois ans de bons et loyaux services en Martinique, attendant sereinement que la justice suive son cours…. et fasse son œuvre.
Sa trajectoire dit assez l’étoffe de ce serviteur de l’État : diplômé de l’ENA, il a gravi un à un les échelons de la Fonction publique, au ministère de la Défense d’abord, puis à la Justice, à l’Équipement, aux Transports et au Logement. Directeur adjoint du cabinet du ministre des Outre-mer de 2012 à 2014, préfet de Saint-Pierre-et-Miquelon, préfet délégué pour la défense et la sécurité dans le Nord, préfet du Cher, il a incarné, à chaque étape, ce que la République attend d’un de ses dépositaires : loyauté, courage et fidélité à l’intérêt général.
Aujourd’hui, Jean-Christophe Bouvier demeure un haut fonctionnaire respecté, fidèle à son credo : « Servir l’intérêt général, jouer collectif et innover ». On l’a vu sur le terrain, en Martinique comme à Saint-Pierre-et-Miquelon, au contact des élus, des entreprises, des associations, des citoyens. On l’a vu aussi, dans ses jeunes années passées en Algérie et au Maroc, cultiver cette volonté rare de « découvrir l’autre avant de le juger ». Fils d’enseignants, issu de la méritocratie républicaine, il est l’illustration de ce que la France produit de meilleur quand elle croit encore en ses serviteurs.
À l’heure où tant de serviteurs publics se sentent fragilisés, le sort judiciaire des plaintes déposées avec ténacité par Jean-Christophe Bouvier, qui reste discret et est tenu à une obligation de réserve, met en jeu, et pas que symboliquement, une donnée clé de la politique des hommes : l’Etat, c’est-à-dire le peuple dans tous ses corps constitués, ne tient debout que si des femmes et des hommes qui s’exposent pour lui sont soutenus par les institutions qui nous gouvernent, notamment la justice.
Concernant les serviteurs de l’Etat, la contrepartie de leur serment de servir l’exécutif avec la plus grande loyauté, c’est le soutien de la hiérarchie mais aussi de la justice, nous osons le dire ici. D’autant que les attaques dont a été victime Jean-Christophe Bouvier ne visaient pas seulement l’homme, mais l’État qu’il représente et plus précisément la présence de la France dans les Outre-mer que contestent les auteurs et les commanditaires des violences intentées contre le préfet.
Car s’attaquer à un préfet, représentant de l’Etat sur un territoire, c’est s’attaquer à l’État, à la République, à la France.
Espérons donc que la justice, qui est un de ces corps constitués de l’Etat, aura la main ferme pour réaffirmer l’autorité de l’État, c’est-à-dire de la France, et pour répondre au besoin légitime de sécurité de nos concitoyens.
Il y a des métiers où l’on s’expose, non pas aux feux de la gloire, mais à ceux de la vindicte et parfois de la haine. Être préfet, c’est souvent être la cible, parfois l’otage symbolique des colères populaires. Jean-Christophe Bouvier, préfet de la République, en a fait l’expérience mais il tient bon.
Michel Taube





















