Edito
09H43 - jeudi 7 août 2025

Quand le président du Liban Joseph Aoun rappelle à l’Algérie le rôle historique du Maroc. L’édito de Michel Taube

 

L’information est passée presque inaperçue : lors de sa visite en Algérie les 29 et 30 juillet, le nouveau président de la République du Liban, Joseph Aoun, n’a pas hésité à saluer le Maroc, au risque de déplaire à Alger.

C’est que certaines vérités dérangent, surtout lorsqu’elles sont rappelées publiquement dans un lieu où elles sont devenues presque taboues. Depuis Alger, le président libanais Joseph Aoun a donc surpris son auditoire (et surtout ses hôtes) en saluant avec insistance le rôle historique du Maroc dans les efforts de paix au Liban, notamment dans la négociation et l’adoption de l’accord de Taëf, qui mit fin à la guerre civile libanaise en 1989. En prononçant ces mots devant Abdelmadjid Tebboune, il a non seulement rétabli une vérité historique, mais il a aussi envoyé un message diplomatique clair : le Maroc demeure un acteur clé de la stabilité arabe.

Le chef de l’État libanais, – enfin un personnage digne de son rang que le Liban attendait depuis longtemps, a parfaitement joué sa partition. Tout en remerciant l’Algérie pour son aide récente à la reconstruction du Liban, il n’a pas cédé à la logique de l’oubli ni de la complaisance idéologique. En évoquant le trio Rabat – Alger – Riyad, il a replacé le Maroc dans le rôle qui est historiquement le sien : celui d’un facilitateur de paix, d’un allié fiable et d’un acteur influent du monde arabe. 

Ce rappel du président libanais, formulé dans une capitale où l’on peine à prononcer le mot « Maroc », résonna comme un pied de nez diplomatique, mais aussi comme un appel à dépasser les crispations stériles.

La gêne visible du président algérien Tebboune, dont les équipes diplomatiques n’avaient manifestement pas anticipé cette envolée fraternelle, illustre le malaise profond d’un régime qui refuse de reconnaître l’importance du royaume voisin. L’hostilité obsessionnelle de l’Algérie à l’égard du Maroc l’enferme dans une posture d’isolement régional, tandis que le Maroc renforce ses partenariats dans l’ensemble du monde arabe et en Afrique.

Il faut saluer le courage du président Aoun, qui n’a pas sacrifié la vérité diplomatique sur l’autel de la convenance protocolaire. En rappelant que le Liban « ne s’ingère pas dans les affaires internes des États frères », il a implicitement appelé à la fin des ingérences et à la reconnaissance mutuelle entre États souverains. Il a surtout redonné au Maroc la place qui lui revient dans la mémoire arabe collective : celle d’un pays qui agit pour la paix, loin des postures idéologiques, et qui le fait sans bruit mais avec constance.

Ce moment à Alger est un signal fort : Rabat, sans être présent à la table (quoi que… puisque cette prise de position faisait écho, au même moment, avec la main tendue à l’Algérie par le roi Mohammed VI dans son discours du Trône le 30 juillet), reste dans tous les esprits. Il revient aux dirigeants algériens, s’ils souhaitent réellement jouer un rôle constructif dans le monde arabe, d’en tirer les leçons.

 

Michel Taube

Directeur de la publication