
Guadeloupe : Deshaies soigne sa Côte oubliée
Dans l’ombre des grands centres médicaux de la Guadeloupe, une poignée de communes de la Côte sous-le-vent tente de combler un vide sanitaire trop longtemps ignoré. À Deshaies, le relais est désormais assuré. Depuis peu, deux jours par semaine, les habitants peuvent compter sur la présence de coordinatrices du Gip-Raspeg (Groupement d’Intérêt Public – Réseaux et Actions de Santé Publique En Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélemy), structure d’appui aux professionnels de santé, pour répondre à une détresse bien connue mais rarement traitée : l’inaccessibilité aux soins.
Chaque mercredi et vendredi matin, au Centre administratif et social de Deshaies, Nathalie Appolinaire et Laura Trévésil accueillent, orientent et accompagnent les patients du secteur. Une permanence discrète mais décisive, rendue possible par une convention entre la commune et le Gip-Raspeg. Objectif affiché : éviter les ruptures de parcours de soins, garantir une présence, même minimale, sur un territoire historiquement relégué aux marges de la carte sanitaire.
Du côté du Gip-Raspeg, ce partenariat est vu comme une avancée concrète. Jean-Claude Lucina, président du conseil d’administration, n’élude pas le constat : la Côte sous-le-vent reste l’un des territoires où l’institution est la moins présente. Grâce à ce dispositif, le rayon d’action s’étend enfin de Baillif à Deshaies. Un déploiement progressif, à hauteur d’humanité, mais qui donne chair au concept si souvent invoqué et rarement appliqué : celui d’aller vers les populations.
Ce virage de proximité, le village du Tour cycliste de Guadeloupe en a récemment été le théâtre. Le 4 août, un espace santé y a été installé, prétexte à faire connaître le dispositif aux habitants. Une opération de sensibilisation qui, au-delà du folklore sportif, visait surtout à ancrer dans le quotidien des familles une réalité nouvelle : celle d’un accès aux soins désormais moins incertain.
À Deshaies, la maire Jeanny Marc salue l’initiative. Elle évoque des situations complexes, des familles isolées, des dispositifs inaccessibles… et un soutien devenu indispensable pour orienter les plus vulnérables vers les bonnes structures. Le relais-santé est perçu ici comme une extension des bras de la commune, là où ses moyens s’arrêtent. Et les coordinatrices de terrain, comme des traductrices de l’administration sanitaire pour ceux que celle-ci laisse souvent à la porte. La directrice du Gip-Raspeg, Myriam Chollet, insiste : pour être utile, il faut connaître le territoire, parler la langue des habitants, comprendre leurs habitudes. Loin des standards froids de la médecine institutionnelle, le travail du Gip s’ancre aussi bien dans le social que le médico-social ou le sanitaire. Un tissage patient entre les besoins du terrain et les ressources d’un système parfois trop abstrait.
À l’heure où l’on parle d’égalité d’accès aux soins, Deshaies montre que la réponse peut commencer par une table, deux chaises, et une écoute. Sur une côte longtemps reléguée au silence médical, la santé retrouve doucement sa voix.
Patrice Clech

















