
Isabelle Marlborough est la première femme présidente de la Fédération des yoles rondes de la Martinique. À l’occasion du 39ème Tour de Martinique en yoles rondes 2025 qui bat son plein cette semaine, la présidente revient sur l’importance culturelle, sportive et sociale de cette discipline unique au monde.
Opinion Internationale : Vous êtes la première femme élue à la tête de la Fédération des yoles rondes. Est-ce un symbole fort ?
Isabelle Marlborough : Oui et non. Les femmes ont toujours été aux côtés des yoleurs. Donc, pour nous, ici, ça s’est fait naturellement. Mais la yole est un sport très masculin. Sur les 800 yoleurs actuellement licenciés, seules 89 sont des femmes.
Qu’est-ce qu’une yole ronde et pourquoi elle est si importante pour l’identité martiniquaise ?
La yole ronde est née de l’histoire des marins-pêcheurs de la Martinique. À l’origine, c’était une embarcation de travail, un canot utilisé pour la pêche. Au fil du temps, cet outil de labeur est devenu un jeu pour les marins, hors du travail, puis une embarcation de compétition. Aujourd’hui, la yole est un véritable sport de haut niveau. Elle exige une grande solidarité, une coordination sans faille entre les équipiers, et une rigueur physique impressionnante. C’est une discipline exigeante, mais profondément enracinée dans notre culture faite d’effort et de solidarité.
La yole offre-t-elle un avenir professionnel pour les jeunes Martiniquais ?
Oui, indirectement. Des entreprises qui soutiennent le Tour de Martinique embauchent des jeunes yoleurs issus de nos équipages, parce qu’elles y reconnaissent leurs qualités humaines et professionnelles. Nous avons également pour objectif de développer des formations qualifiantes, notamment des certifications pour devenir moniteur de voile. L’idée, c’est de permettre à ceux qui veulent rester dans cet univers de bâtir aussi un avenir professionnel.
Comment se passe cette édition 2025 du Tour de la Martinique ?
La compétition se déroule très bien, avec un bon niveau sportif. Chaque jour, les associations se battent, et on assiste à de beaux duels en mer. Malheureusement, un drame s’est produit en marge de l’événement : un jeune homme a perdu la vie lors d’un rassemblement non autorisé de bateaux, ce qu’on appelle ici des « After yoles ». Ce genre de rassemblement est interdit par arrêté préfectoral et municipal. Cet accident n’a donc rien à voir avec l’organisation officielle du Tour, mais nous avons une pensée émue pour la famille de la victime et nous demandons à tous les amoureux de la yole de respecter les interdictions.
Une fois de plus, le Tour de Martinique prouve qu’il est un événement incontournable de l’été qui doit sa persévérance, parfois contre vents et marées, à la mobilisation des entreprises locales, des partenaires publics et de l’Etat qui assure la sécurité en mer.
La Martinique accueillera bientôt l’arrivée de la Transat Café L’Or. La Fédération de la yole ronde sera-t-elle présente ?
Oui, nous avons toujours travaillé avec les organisateurs de la Transat. Nous organisons notamment des démonstrations de yole pour faire découvrir cette embarcation unique aux skippers et aux visiteurs. Il y a parfois aussi des initiations. C’est l’occasion de valoriser notre patrimoine auprès d’un public international.
Peut-on imaginer un jour voir la yole ronde devenir une discipline olympique ?
On en rêve. C’est une embarcation magnifique, très technique, qui mérite d’être connue. Mais aujourd’hui, la yole ronde est exclusivement martiniquaise. D’autres îles ont leurs propres embarcations : la Saintoise en Guadeloupe, par exemple.
Il faudrait imaginer une compétition inter-îles, avec des embarcations standardisées, pour en faire une discipline internationale.
Pourquoi pas à Los Angeles en 2028 ? Et pourquoi pas prochainement faire naviguer une yole sur la Seine, à Paris. Les Champs-Elysées accueillent bien chaque année le carnaval des Antilles.
En effet, ce serait une très belle vitrine pour les Antilles françaises. Car la yole ronde dit beaucoup de la Martinique, de la place de la mer et de la voile dans nos cœurs.
Pour suivre l’événement : https://tourdesyolesofficiel.com/
Propos recueillis par Michel Taube




















