Opinion Outre-Mer
10H00 - lundi 21 juillet 2025

La Réunion muscle sa réponse aux addictions

 
La Réunion muscle sa réponse aux addictions

La Réunion muscle sa réponse aux addictions

Face à l’ampleur silencieuse du fléau, les autorités sanitaires de La Réunion changent de méthode. Mi-juillet, la création de la Communauté Territoriale d’Addictologie (CTA-974) a été officialisée, incarnant une rupture avec les approches éparpillées et les initiatives isolées. Portée par l’Agence Régionale de Santé et hébergée par le CHU, cette nouvelle entité promet une coordination inédite de tous les acteurs de la lutte contre les addictions. Enfin, l’île se dote d’une architecture cohérente pour affronter un problème devenu chronique.

La présidence a été confiée au Dr David METE, chef du service d’Addictologie du CHU Nord, tandis que la coordination revient au Dr Thierry JAMAIN du GHER. Ensemble, ils devront animer un réseau aux contours ambitieux : hôpitaux, structures médico-sociales, professionnels de santé libéraux, acteurs de prévention, représentants des usagers, partenaires institutionnels. Cinq collèges pour fédérer, structurer et agir. L’objectif est simple : ne plus laisser les dépendances progresser dans les angles morts du système.

Car le tableau est alarmant. À La Réunion, les ravages liés à l’alcool, aux drogues et aux conduites addictives ne se comptent plus : violences intrafamiliales, accidents de la route, troubles liés à l’alcoolisation fœtale. Les conséquences sanitaires, sociales et économiques sont massives. Pendant que les structures peinent à absorber les demandes, les parcours de soins restent trop souvent chaotiques. La CTA-974 entend donc réécrire les règles du jeu. À commencer par l’accès aux soins, les parcours coordonnés, et la modélisation de prises en charge enfin pensées à l’échelle du territoire.

Mais l’ambition dépasse le champ médical. Il s’agit aussi de transformer la prévention. Développer les compétences psycho-sociales, structurer les campagnes de sensibilisation, mieux former les professionnels – autant de leviers intégrés à la feuille de route. La CTA se positionne comme un lieu de gouvernance partagée, de réflexion scientifique et d’organisation concrète. Elle organisera colloques, formations, échanges de pratiques. Le tout financé, pour une première période de trois ans, par l’ARS.

Cette plateforme, ouverte à toutes les structures publiques ou privées impliquées dans l’addictologie, veut rompre avec la logique de cloisonnement. Les partenaires de terrain comme les institutions étatiques – Préfecture, Rectorat, Assurance Maladie – seront associés. Et c’est cette mobilisation transversale, rare à l’échelle d’un département, qui donne au projet sa portée.

Lancé dans le cadre du Projet Régional de Santé, ce dispositif veut imposer une nouvelle norme : l’alliance plutôt que la dispersion, la continuité plutôt que les ruptures, la lisibilité pour les patients au lieu de l’opacité institutionnelle. Il ne s’agit pas seulement de soigner, mais d’anticiper, de comprendre, d’agir plus tôt et plus intelligemment.

Avec la CTA-974, La Réunion joue une carte décisive. Elle tente de transformer un paysage fragmenté en écosystème structuré. Reste à voir si cette volonté collective tiendra la distance. Car sur ce territoire trop souvent oublié dans les stratégies nationales, les addictions prospèrent dans les interstices. Il faudra désormais les affronter à visage découvert.

 

Patrice Clech

La trahison Letchimy, par un enfant d’Aimé Césaire

Il existe mille façons de montrer du mépris en politique. Certaines sont discrètes, d’autres éclatent comme une gifle. Serge Letchimy vient d’établir un nouveau record : annoncer, à 7 000 kilomètres de…