Ils n’ont pas bloqué l’hôpital, n’ont pas scandé de slogans dans les couloirs, et pourtant leur message est limpide. Ce mercredi 11 juin, une partie des aides-soignants du Médipôle de Koutio a brièvement interrompu son service pour rappeler qu’eux aussi existent. Cinquante-cinq minutes de débrayage, à l’initiative de la section USTKE, pour exprimer ce que beaucoup ressentent depuis des mois : une invisibilisation croissante, malgré un rôle essentiel dans les services.
Alors que les négociations se poursuivent entre la direction de l’établissement et certaines catégories du personnel médical, les aides-soignants restent à la porte. Ni consultés, ni entendus, ils regardent les discussions avancer sans eux. Pourtant, leurs revendications ne datent pas d’hier. Ils demandent une revalorisation de leur statut, à l’image de ce qui a été accordé dans l’Hexagone en 2021, quand la profession est passée de la catégorie C à la B, avec à la clé une augmentation de l’indice salarial.
Le sentiment d’abandon est d’autant plus vif que leur charge s’est alourdie. Faute d’infirmiers, certains se voient confier des tâches qui dépassent leur champ de compétences. Aux urgences adultes, comme dans d’autres services, les aides-soignants sont devenus les couteaux suisses du soin : présence constante auprès des patients, accompagnement moral, relais auprès des familles, et parfois suppléance médicale déguisée. Mais cette polyvalence forcée ne s’accompagne d’aucune reconnaissance.
« 2020 héros, 2025 zéros » : le slogan inscrit sur les pancartes résume l’amertume. Ceux qu’on applaudissait à 20h en pleine crise sanitaire semblent aujourd’hui relégués à l’arrière-plan. Si leurs collègues infirmiers, sage-femmes ou médecins obtiennent des avancées, eux restent bloqués dans un entre-deux, formés en urgence mais oubliés dans le silence.
Derrière la demande de revalorisation, c’est aussi un appel à l’évolution professionnelle qui est lancé. Beaucoup aspirent à intégrer l’école d’infirmière, à pouvoir monter en compétence dans des conditions dignes. Pas pour fuir leur métier, mais pour ne plus s’y épuiser à petit feu. Car soigner, rappellent-ils, ne devrait pas rimer avec s’user.
En 55 minutes, ils ont dit l’essentiel. Reste à savoir si, cette fois, le message sera entendu.
Patrice Clech