Le 14 mai 2025, le président de la République, Emmanuel Macron, a élevé Bernard Hayot à la dignité de Grand Officier de la Légion d’honneur. Une distinction rare et prestigieuse, décernée à un homme qui a consacré sa vie au développement économique, social et culturel de la Martinique et des Outre-mer. « L’homme qui plantait des arbres », comme l’a qualifié le président, est un bâtisseur, un entrepreneur visionnaire et un défenseur passionné du patrimoine antillais.
Cette reconnaissance solennelle est un hommage à un parcours entrepreneurial hors normes, commencé modestement par l’élevage de poulets au François, en Martinique, et étendu, au fil des décennies, à un empire économique présent dans 19 pays à travers le monde. Ce n’est pas seulement le succès d’un homme, mais celui d’un territoire qui, grâce à lui, a vu naître des projets industriels, sociaux et culturels d’envergure.
Un bâtisseur de la Martinique et des Outre-mer
Bernard Hayot est le fondateur du Groupe Bernard Hayot (GBH), aujourd’hui leader de la distribution et de l’industrie en Outre-mer. Né au François, il débute sa carrière en 1960 avec un petit élevage de poulets, les « Poulets Bamy ». Très vite, il comprend que l’avenir de la Martinique passe par une diversification de l’économie. Face à l’effondrement de l’industrie sucrière, il fonde l’AMPI (Association des Moyennes et Petites Industries de la Martinique) pour promouvoir la production locale et l’industrialisation du territoire.
Visionnaire, il développe ses activités dans l’automobile, la grande distribution et l’industrie. GBH devient rapidement le premier employeur privé des départements d’Outre-mer, avec plus de 18 000 collaborateurs à travers le monde. Cette expansion, marquée par l’ouverture de Carrefour, Mr. Bricolage, Decathlon ou encore Renault en Outre-mer, s’inscrit dans une logique de développement local et de création d’emplois.
Une contribution sociale et solidaire remarquable
Loin des clichés de l’industriel déconnecté de son territoire, Bernard Hayot s’engage avec force pour l’insertion sociale et professionnelle. Le programme Tremplin pour l’emploi permet à des jeunes ultramarins éloignés de l’emploi de se former dans les métiers de la grande distribution et de l’automobile. Depuis sa création, ce sont plus de 110 jeunes qui ont pu accéder à un contrat chez GBH après 18 mois de formation.
GBH multiplie également les initiatives en faveur de la solidarité : en partenariat avec les Banques Alimentaires, ce sont plus de 4,3 millions de repas qui ont été distribués dans les Outre-mer. Le groupe a aussi répondu présent lors des catastrophes naturelles à Mayotte, en envoyant 250 tonnes de marchandises et en finançant une clinique mobile pour renforcer l’accès aux soins.
À La Réunion, GBH soutient des projets locaux de développement, notamment avec l’ouverture de magasins en partenariat avec des producteurs locaux, permettant de renforcer le tissu économique insulaire.
Le mécène culturel et le défenseur du patrimoine
L’engagement de Bernard Hayot ne se limite pas au domaine économique. Profondément attaché à la préservation du patrimoine et au rayonnement de la culture caribéenne, il fonde en 1986 la Fondation Clément. Située au cœur de l’Habitation Clément, une maison créole du XVIIIe siècle qu’il a entièrement restaurée, cette fondation est devenue un lieu emblématique pour la promotion de l’art contemporain caribéen et africain. Chaque année, plus de 200 000 visiteurs viennent découvrir gratuitement les œuvres exposées, faisant de ce site un carrefour culturel incontournable.
Au-delà de l’art, la Fondation Clément est un témoin historique : elle fut le théâtre de la rencontre entre François Mitterrand et George Bush en 1991, marquant l’histoire diplomatique entre les États-Unis et la France. Cet engagement culturel témoigne de la volonté de Bernard Hayot de faire rayonner la Martinique au-delà de ses frontières.
Un capitaine d’industrie face aux vents contraires
Si Bernard Hayot incarne la réussite économique, il n’en demeure pas moins une cible régulière de certaines franges militantes qui l’accusent de monopole économique et de participer à la vie chère. Ces attaques, souvent virulentes, se heurtent cependant aux réalités économiques. Bernard Hayot rappelle lui-même que les marges pratiquées par ses enseignes en Martinique sont comparables à celles de l’Hexagone et que son groupe soutient activement la production locale pour réduire la dépendance aux importations.
Loin des polémiques, GBH contribue à l’ancrage local par des investissements dans l’agriculture martiniquaise, le soutien aux petits producteurs et des initiatives concrètes pour valoriser les circuits courts. Ces engagements démontrent un souci constant de participer au développement durable de l’économie locale.
Un héritage durable
Bernard Hayot ne se contente pas d’un héritage économique, il transmet également des valeurs de solidarité et de responsabilité à ses enfants, qui reprennent peu à peu les rênes du groupe. Présent dans 19 pays, GBH incarne aujourd’hui l’excellence martiniquaise à l’international, tout en restant ancré dans ses valeurs fondatrices.
Son rêve ? Voir la Martinique prospérer dans une dynamique économique inclusive, portée par une jeunesse formée et un tissu industriel solide. Un rêve qu’il n’a jamais cessé de poursuivre, avec la discrétion qui le caractérise, fidèle à son adage : « Le bruit ne fait pas de bien, le bien ne fait pas de bruit. »
Michel Taube