Et si, pour une fois, la question n’était pas de savoir s’il faut calmer le jeu, mais qui met vraiment le feu aux poudres ? Depuis l’attentat du 22 avril à Pahalgam, qui a coûté la vie à 26 touristes, les tensions indo-pakistanaises ont pris une tournure d’une gravité rarement atteinte. L’attaque a été revendiquée par le groupe The Resistance Front, que New Delhi accuse — avec des preuves que seule la complaisance internationale feint d’ignorer — d’être une émanation du tristement célèbre Lashkar-e-Taiba, basé au Pakistan.
Face à cette énième provocation, le Premier ministre indien Narendra Modi a haussé le ton, suspendant le traité des eaux de l’Indus, expulsant des diplomates pakistanais, fermant les frontières et laissant les mains libres à son armée pour riposter. Islamabad, comme à chaque flambée de violence, nie toute implication et appelle à une enquête internationale. Mais qui peut encore croire à l’innocence d’un État qui, depuis des décennies, sert de sanctuaire à toutes les variantes du djihadisme anti-indien ?
Le Cachemire, ce territoire déchiré depuis 1947, est devenu le théâtre récurrent de ce bras de fer. L’Inde, puissance démocratique émergente et alliée stratégique de la France et de l’Occident, y défend à la fois son intégrité territoriale et ses citoyens. Le Pakistan, lui, y entretient le chaos. Oui, l’Inde est notre allié. Coopération militaire, contrats stratégiques, diplomatie du XXIe siècle : la proximité entre Paris et New Delhi ne date pas d’hier. Et il est temps que cette amitié se traduise par une lucidité géopolitique sans angélisme.
Modi n’est pas exempt de critiques. Son nationalisme hindou dérange, sa méthode autoritaire inquiète parfois. Mais peut-on vraiment reprocher à un chef d’État de vouloir protéger son peuple contre des attaques terroristes répétées ? À force d’appeler à la retenue, l’Occident oublie parfois d’identifier clairement l’agresseur.
Une nouvelle guerre ouverte entre deux puissances nucléaires serait un drame mondial. La diplomatie doit reprendre ses droits. Mais ce n’est pas l’Inde qui a mis en cause l’ordre établi : c’est un Pakistan gangrené par l’islamisme. Et si Modi, au fond, avait simplement décidé d’en finir avec l’impunité ?
Michel Taube