
Dix ans après les drames du Bataclan, des brasseries voisines et du stade de France, où des terroristes ont une fois encore stigmatisé la religion qu’ils prétendaient défendre, la laïcité est plus que jamais une idée forte, rare, enfantée par notre pays. Elle n’est pas encore transmissible à toutes les cultures. Elle est un produit civilisationnel, le fruit de la maturité, de beaucoup d’expériences et de souffrances.
Elle est née d’un monde façonné par le christianisme.
Cette laïcité est aujourd’hui confrontée à une religion mondiale qui ne partage ni sa vision de la femme et de l’homme, ni sa conception du pouvoir, ni sa séparation du spirituel et du temporel : l’islam.
Cette religion est encore une loi et un mode de vie. Cette spécificité est le problème. La laïcité peut être appliquée par l’individu musulman mais pas par un peuple musulman actuel : les peuples musulmans sont structurés par le clanisme et le tribalisme solidaire. Lorsque l’on reconstitue les normes socio-culturelles des pays musulmans à échelle locale dans des quartiers, voire dans des villes, la laïcité devient impossible. Et même les lois de la République sont alors rejetées. Dans le monde musulman traditionnel, la charia n’est pas seulement une référence morale, c’est la loi. Elle régit l’ensemble de la vie économique, familiale, politique, sociale et sexuelle. Il n’y a pas de distinction entre le droit civil, le droit religieux et le droit politique : tout relève du même corpus théologico-juridique.
Dans la chrétienté, il n’y a jamais eu de loi unique d’origine divine. L’ordre chrétien médiéval s’appuyait sur trois sources de droit distinctes :
– Le droit coutumier, fruit d’un compromis ancestral entre seigneurs et paysans,
– Le droit romain, hérité de l’Empire romain,
– Le droit canonique, en fait les prescriptions religieuses de l’Église (interdits, obligations, sacrements, blasphème…)
C’est cela, le miracle occidental : la tension permanente entre foi, raison et coutume.
L’islam, lui, a tranché ce débat : il a tout unifié sous le sceau du divin.
L’Église catholique du Moyen Âge n’était pas un pouvoir théocratique comparable à celui qu’exerce l’islam sur la cité. Elle ne dictait pas la loi civile ni ne prétendait organiser la totalité de la vie sociale. Au contraire, elle jouait un rôle d’amortisseur entre la violence des seigneurs féodaux et la vulnérabilité des paysans. Notre pays s’est formé dans cette tension entre la foi et la raison, entre l’Église et le pouvoir temporel.
C’est de cette tension qu’allait naître la laïcité.
Et sans l’Église, il n’y aurait jamais eu de nécessité de laïcité.
L’islam pur et dur ne peut s’accommoder de la laïcité. Elle n’est donc pas encore une valeur universelle : c’est un produit culturel, né d’une histoire spécifique : celle du christianisme occidental sécularisé.
Elle suppose une certaine conception de la femme et de l’homme, de la raison et du divin, qui ne se retrouve pas dans l’islam passé et actuel.
La laïcité n’est pas née par miracle, mais par maturation, fruit d’un très long processus historique, moral et spirituel, jalonné de bonheurs et de malheurs. Elle joue un rôle civilisateur : elle transforme des peuples de guerriers en nations chrétiennes partout dans le monde.
Mais il n’est pas question d’exclure les musulmans du pacte républicain, ils représentent depuis 50 ans près de 10 % de notre population. Mais il faut reconnaître les différences anthropologiques entre religions pour rencontrer la paix durable : le christianisme, dès ses origines, distingue Dieu et César ; l’islam, lui, les confond. Cette différence n’est pas une opinion : c’est un fait historique, juridique et théologique.
La réalité est là, nue, irréfutable : le christianisme et l’islam ne reposent pas sur la même logique. Le premier distingue la foi et la loi ; le second les confond.
Dans le christianisme, la liberté de la femme et de l’homme consiste à se déterminer en conscience.
Dans l’islam, elle consiste à se soumettre à la volonté divine.
Le premier a rendu possible la laïcité ; le second la rejette. Mieux, il l’utilise. Il s’en sert comme d’un bouclier pour mieux s’implanter. Au nom de la liberté religieuse, il impose des exigences communautaires ; au nom de la tolérance, il réclame chez nous des accommodements ; au nom du pluralisme, il revendique des droits particuliers. Ainsi, la laïcité, conçue pour pacifier la vie sociale devient l’arme d’une religion qui refuse la neutralité.
La laïcité a toute sa place chez nous car la France a une Histoire singulière. Le christianisme a finalement produit la liberté ; l’islam ne peut accepter cette liberté sans se renier. Pas encore…
Lorsque la France oublie ses racines, la laïcité devient un mot creux, un drapeau perdu, son absence nous met tous en danger.
Et la vie plie alors sous d’autres lois, d’autres coutumes et un autre Dieu, beaucoup moins tolérant.
C’est le temps et les expériences qui feront des musulmans des laïcs. En effet, cette religion a émergé 600 ans après le christianisme si bien que du point de vue islamique nous sommes en 1447 et pas en 2025. Notre dramatique Saint – Barthélémy date de 1572, notre 1572… Cette tuerie de masse où des milliers de protestants sont massacrés par des catholiques au nom de Dieu est encore un fait historique qui marquera notre pays à jamais.
C’est aux musulmans de France de faire leur part en multipliant partout la pédagogie et l’intelligence pour que les islamistes issus d’un temps odieux, sortent de leur histoire. Il y a déjà une pratique de l’islam sous forme de religion tolérante qui condamne la violence et le terrorisme, un islam qui respecte les droits de la femme et de l’homme. Un islam qui est pour la coexistence pacifique des religions.
L’islam « fanatique » est celui des extrémistes qui prêchent la violence et l’intolérance en imposant leurs croyances et qui condamne les libertés « fondamentales ». Cet Islam-là ne représente pas les musulmans pacifiques.
Jean Marc Governatori
Coprésident Écologie au centre, Élu écologiste niçois

















