Edito
17H00 - vendredi 31 octobre 2025

Ceux qui détestent les riches devraient regarder « La femme la plus riche du monde ». L’édito cinéma de Michel Taube

 
Ceux qui détestent les riches devraient regarder « La femme la plus riche du monde ». L’édito cinéma de Michel Taube

MANUEL MOUTIER/HAUT ET COURT

Ce n’est pas seulement un grand film. C’est un miroir tendu à notre époque. Avec Isabelle Huppert et Laurent Lafitte au sommet de leur art, « La femme la plus riche du monde » de Thierry Klifa dépasse la simple adaptation d’un fait divers, celui de l’affaire Bettencourt, pour sonder le cœur d’une France qui, tout en rêvant d’égalité, entretient une fascination mêlée de haine pour la richesse.

 Le film raconte la rencontre explosive entre Marianne Farrère, héritière d’un empire industriel, et un photographe fantasque qui bouleverse son univers feutré. À travers cette comédie grinçante, Klifa explore, dans une libre adaptation, les frontières troubles entre amour et intérêt, admiration et manipulation, emprise et attachement qui secouèrent la vie de Liliane Bettencourt et d’un François-Marie Banier, nietzschéen à souhait dans son dandysme et son verbe insolents incarnés par un grand, un très grand Lafitte.

Le film montre une femme prisonnière de son nom, de son argent, mais qui aspire à la liberté elle aussi, et d’un entourage dont on se demande s’il l’aime moins pour ce qu’elle est que pour ce qu’elle possède. Comme le confesse Isabelle Hupert : « les gens ne vous connaissent pas ! ». Les dialogues sont taillés au cordeau et contribuent à la musique à la réussite du film.

Mais au-delà du drame humain, « La femme la plus riche du monde » est une parabole sociale. Elle invite à réfléchir, sans jalousie ni dogmatisme, sur la condition de ceux que la fortune isole. Dans une France où la réussite est souvent suspecte et où le mot « riche » sonne presque toujours comme une injure, ce film rappelle qu’il y a derrière chaque fortune des solitudes, des blessures et des désirs d’humanité.

Ce long-métrage arrive à point nommé. Au moment où les débats parlementaires sur le budget de la Nation attisent une nouvelle fois la haine des riches, cette maladie bien française, il remet les pendules à l’heure : la richesse n’est pas un crime, la jalousie en est un.

 

 Michel Taube

Directeur de la publication