Edito
15H29 - mardi 28 octobre 2025

Budget Lecornu, une hystérie fiscale sans courage budgétaire. La chronique de Patrick Pilcer

 

Le Premier ministre Lecornu avait passé, de peu, le premier écueil. A quelques voix près, il a évité la censure lors de son discours de politique générale. Il y avait dévoilé un projet de budget 2026 qui, en apparence, se voulait audacieux : réduction du déficit à 4,7 % du PIB, économies annoncées pour plus de 30 milliards d’euros, coupes dans certaines dépenses, gel et réduction de la communication publique.

Mais, derrière les effets d’annonce, se révélait déjà une mécanique de fausses économies et de renoncements stratégiques, avec comme plus belle illustration la suspension, en tout cas annoncée, de la Réforme des Retraites.

On entre à présent dans le dur des discussions budgétaires. Et là, malheureusement, on cherche toujours la rupture !

La véritable rupture aurait dû être de commencer l’exercice parlementaire par l’examen des dépenses, avant de décider de comment les financer.

Mais non, on commence, comme d’habitude, par l’examen des recettes. Pour Lecornu et le Parti socialiste, My Way, c’est encore et encore créer plus d’impôts, plus d’usines à gaz fiscales. Par exemple, en proposant de supprimer l’amortissement des biens meublés, ce qui affaiblirait encore plus le marché immobilier et le marché de la construction, déjà moribonds. C’est « serrer la ceinture » des retraités. C’est chercher à taxer toujours plus les classes moyennes en prétextant taxer les riches. Et cetera et cetera. Une véritable hystérie fiscale.

La raison, la rupture pour reprendre le vocabulaire du moine-soldat au pays de la Laïcité, eut été de d’abord décider ce que nous avons besoin de financer. Quel effort supplémentaire pour la Justice, pour la Police, pour la Sécurité, pour l’Armée, pour l’Ecole, pour la Santé… Comment adapter nos services publics pour faire mieux et plus avec moins. Comment dégraisser nos mammouths dans toutes nos administrations. Comment gagner en productivité et en efficacité grâce aux outils du XXIème siècle. Où diminuer nos effectifs et où les renforcer. Quelle charge de la dette nous paraît soutenable. Décider les services publics que nous souhaitons aujourd’hui en somme. Se comporter en dirigeants, en stratèges, et non en comptables. Ecrire le film, le scénario de nos prochains mois et ne pas se contenter de la photo d’hier. Proposer une dynamique, ne pas rester dans une vision statique.

Une fois les dépenses clairement choisies, alors on peut décider de la meilleure façon de les financer. Peut-être qu’il faudra alors, en effet, taxer plus, ou au contraire l’examen des dépenses nous permettra-t-il de dégager des marges de manœuvre et diminuer la pression fiscale. En tout cas, commencer par décider des dépenses, puis ensuite des recettes, augmente l’adhésion de nos citoyens à l’impôt. L’inverse ne fait que rompre cette adhésion et mettre le pays en risque !

Et bien, pour la rupture, on attendra… par contre pour un spectacle de Concours Lépine de l’impôt, c’est reparti ! On assiste à un véritable striptease de Lecornu pour séduire le Parti Socialiste et tenter de durer ! Cinq minutes encore messieurs les bourreaux ! L’hystérie, car Lecornu ne se dévoile pas, il déshabille par cet exercice les forces vives de la Nation, il met à nu les classes moyennes…

Mais qui dira au gouvernement et à ces parlementaires qu’ils doivent d’abord réfléchir à améliorer le pouvoir d’achat des Français, à rendre notre pays attractif, conquérant, innovant, ambitieux, compétitif, et jamais créer les conditions de son effondrement ? Nos entreprises, nos classes moyennes sont surtaxées. Le travail en France est surtaxé. Le Logement est surtaxé. Nos services publics ont leurs artères bouchées par trop de mauvais cholestérol. Nous le savons depuis trop longtemps. Stop, en marche arrière toute, avant que nous ne nous écrasions contre le mur !

Qui dira au Gouvernement d’arrêter de « serrer la ceinture » des Français et de leur faire les poches quand c’est à l’Etat de se serrer la ceinture ?

Peut-être le Sénat, la Haute Chambre si utile depuis l’incapacité du camp présidentiel à gagner les élections en 2022 et l’éblouissante idée de dissolution de Macron en 2024.

Car, au Gouvernement, derrière les annonces et les mots, il y a une forme de panique, d’hystérie, qui trahit un pouvoir sans audace réelle. Le but réel de Sébastien Lecornu n’est que de durer suffisamment pour protéger Emmanuel Macron, quitte à tomber en décembre ou janvier. Il faut durer, coûte que coûte, pour qu’une fois 2026 venue, Macron puisse concentrer les regards sur les élections municipales en mars 2026, puis les présidentielles en 2027.

La mission du « moine-soldat » est là : durer quoi qu’il en coûte pour protéger son roi !

S’il faut abandonner la réforme des retraites, abandonnons. S’il faut renoncer à la réelle baisse des dépenses publiques, abandonnons. S’il faut taxer toujours plus, taxons !

Il y a une véritable panique à bord dans le camp macronien, une véritable hystérie, et une absence totale de courage réel. Pour un président qui a fait voter le droit de mourir dans la dignité, quel paradoxe de voir la fin de vie de la macronie !

Et pour que cela paraisse plus crédible, on agite le spectre d’un chaos total si le budget ne passe pas, on crée la peur. Etrange que Macron ne sonne pas le tocsin et ne déclare pas l’état d’urgence. Cela fait deux ans qu’il nous dit que nous sommes en guerre. Faute de mener la guerre contre la dépense publique incontrôlée, la guerre contre le déficit, la guerre contre la dette abyssale, quitte à être ubuesque, il pourrait déclarer la guerre contre un bouc-émissaire quelconque pour pouvoir se maintenir, contre le roi Venceslas par exemple comme dans le fameux livre d’Alfred Jarry, Ubu roi…

Pourtant, diminuer les dépenses publiques sans augmenter la pression fiscale, c’est possible ! Y-a-t-il un chef d’entreprise qui n’arriverait pas à réduire le train de vie de son entreprise, à serrer les boulons, non pas de 50% mais de 3% pour assurer la survie de sa société ?

Toutes les dépenses de l’Etat doivent être passer à la paille de fer, tout doit être revu et analysé sous le rapport coût / efficacité, sans écarter la possibilité de privatiser. Dans l’analyse des comptes de la Nation, détenir 100% d’EDF fait-il sens ou n’est-il pas pertinent d’ouvrir à nouveau le capital et vendre 30 ou 40%. Détenir 100% de France Télévision à l’heure des médias en ligne et avec l’effondrement de sa part de marché fait-il également sens ?  Quand va-t-on faire un bilan réel des agences régionales de santé (ARS), de l’Aide médicale d’État (AME), de France Travail… Le but de l’AME est la prophylaxie et éviter les épidémies, mais le panier de soins actuel correspond-il bien à ce but ? Le rôle de France Travail est de permettre au plus grand nombre de chômeurs de retrouver du travail ? avec une efficacité aussi faible (il faut lire les différents rapports de la Cour des comptes par exemple), Il faut réformer, restructurer, ouvrir à la concurrence, d’urgence.

Parallèlement, il faut opter pour une immigration choisie, maitrisée et non subie. Et surtout ne pas avoir peur des débats, celui sur notre modèle social et son financement bien sûr, sur le Pacte démocratique, social, laïque et républicain qui nous lie de notre naissance à notre mort, mais aussi sur comment permettre à l’islam en France d’être compatible avec les Valeurs de la République. Et quand va-t-on obtenir la libération de nos otages, comme Boualem Sansal ? Tout n’est pas budgétaire, mais chaque choix de société passe par un financement adapté, des contraintes ou des incitations fiscales.

Or sur ces fronts, aucune réforme courageuse n’est proposée.

Il ne s’agit pas ici d’un plaidoyer pour l’austérité à tout crin, mais pour le réalisme républicain : supprimer les redondances, rationaliser les institutions, rendre efficaces les agences publiques, recentrer l’État sur ses missions régaliennes — et oui, baisser structurellement les coûts. Quand on traverse une crise, une entreprise courageuse ajuste ses coûts internes — pas seulement ses plaquettes de communication.

La France ne manque pas de ressources, elle manque de volontés fortes. En 2027, le vrai courage sera de dire que les réformes impopulaires sont l’épreuve nécessaire du salut républicain.

Le budget Lecornu n’est pour le moment qu’une défaite de la Raison, un manque cruel de courage et une carte blanche à l’hystérie fiscale. Heureusement cela se soigne. Restons lucide mais optimiste.

Comme le dit remarquablement Xavier Bertrand dans son nouveau livre, rien n’est jamais écrit. Et comme je le décrirai dans mon prochain livre (à paraître aux éditions InterVision le 7 novembre), le mur n’est pas une fatalité, à condition d’être Radicalement Républicain…

 

Patrick Pilcer

Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers, auteur de « Ici et maintenant – lecture républicaine de la Torah » (préface du Grand Rabbin de France, Haïm Korsia, éd. David Reinharc). Prochain livre à paraître le 7 novembre 2025 : « Radicalement républicain. Le mur n’est pas une fatalité. » Éditions InterVision.

Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers
Patrick Pilcer, Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers

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