Opinion Outre-Mer
19H04 - dimanche 2 février 2025

Tirer sur GBH, c’est tirer sur la Martinique et sur la France ! L’édito de Michel Taube

 

La France céderait-elle à nouveau aux sirènes du socialisme dont la promesse macronienne aujourd’hui déçue avait tenté de tourner la page ? Manifestement les attaques contre les grands patrons comme Bernard Arnault vont jusqu’à frapper les rives de nos chers Outre-mer.

Depuis plusieurs mois, sur fond de mouvement contre la vie chère dévoyé en insurrection violente et anti-française, un véritable acharnement médiatique s’abat sur le Groupe Bernard Hayot (GBH), leader de la distribution en Martinique et groupe familial présent dans le monde entier. Cette pépite de l’économie, cette si belle réussite française devrait forcer le respect. Non, elle est accusée à tort d’être le principal responsable de la vie chère en Martinique.

Au fond, ce qui se joue en Martinique comme dans l’ensemble de la France, dans des proportions décuplées dans les Outre-mer, c’est l’affrontement de deux France, illustré par la photo de cet édito : d’un côté des idéologues qui s’attaquent à notre histoire, à nos valeurs et à nos réussites, et de l’autre celle du travail et de l’engagement.

Ce lynchage organisé, alimenté par des médias nationaux de gauche étrangement amplifié par le service public audiovisuel dans les Outre-mer, et par des politiciens pour les uns populistes et pour les autres nostalgiques d’un socialisme dont on croyait certains pourtant libérés, à Fort-de-France comme à Paris, repose sur des allégations fallacieuses et diffamatoires aux relents racisés.

Ces attaques indignes portent sur une entreprise qui investit localement et qui emploie des milliers de Martiniquais, une entreprise qui s’engage plus que toute autre dans la vie sociale du pays : la culture, le patrimoine, l’environnement, la formation, l’insertion des jeunes, le monde associatif…

Tous les Français en mal de sérénité, de beauté, de tradition et de respect mutuel devraient visiter l’Habitation Clément au François, au cœur de la Martinique, maison créole datant du XVIIIe siècle, classée aux monuments historiques en 1996, créée par Bernard Hayot et transformée en Fondation par le groupe GBH, site patrimonial majeur, souvent visité par les grands de ce monde (de François Mitterrand à Patrice Talon, président du Bénin) devenu aussi un centre d’art contemporain reconnu et une maison de rhum réputée.

Le premier employeur privé de Martinique est une entreprise profondément martiniquaise dont le premier tort est de croire aux valeurs d’excellence. Et dont le second tort est d’être dirigée par un… béké !

Pourquoi donc le ministre Manuel Valls (nos lecteurs auront compris que nous pensions à lui en parlant de nostalgiques), censé garantir une parole d’État équilibrée et responsable, a-t-il choisi de s’engouffrer dans cette brèche populiste ? En déclarant fin janvier devant les députés de la nation que GBH « étouffe » l’économie des Outre-mer, le ministre d’Etat a relancé une dangereuse spirale de désinformation que le mouvement du RPPRAC de Rodrigue Petitot avait amorcée en septembre.

Pourquoi légitimer un discours simpliste et démagogique qui ne sert qu’à renforcer les mouvements séparatistes ou autonomistes en embuscade ? Pourtant Manuel Valls connaît la vérité. Il sait ce que disent et répètent ses propres services de contrôle : « non, il n’y a pas d’abus de position dominante chez GBH. Non, les marges de GBH ne sont pas abusives ».

 

La vérité des faits

Rappelons quelques faits essentiels. Oui, la vie est chère en Martinique, comme elle l’est dans toutes les îles de taille équivalente. Elle l’est d’ailleurs bien plus encore dans les îles voisines où n’opère pas GBH. Nombreux sont les Sainte-Luciens qui, par exemple, traversent chaque matin le canal maritime pour venir s’approvisionner en Martinique, “là où c’est moins cher”, chez GBH ! En réalité, ce bashing anti-GBH, par ses fondements racistes à peine voilés, est insultant pour tous les Martiniquais fâchés que l’on instrumentalise ainsi le travers de haine qui sommeille en toutes souffrances populaires, il cherche des coupables faciles plutôt que des solutions.

Par racisme anti-blanc de plus en plus assumé, on voudrait enfermer Bernard Hayot et tous les békés dans leurs ascendances de familles de colons antillais. Juger le présent pour des actes commis il y a bientôt 200 ans ? Mais qui se souvient que Bernard Hayot est un Martiniquais profondément attaché à son île et dont le succès économique résulte de ses qualités d’entrepreneur et non de descendant de colons. Il a commencé sa carrière en élevant des poulets de chair avec une petite équipe de cinq salariés. Puis il entame son développement en réinvestissant la totalité de ses bénéfices dans ses projets en Martinique, puis dans les autres territoires d’Outre-mer puis enfin à l’international. Il avance pierre à pierre, il prend des risques, il fait des choix audacieux, il innove… et quelques décennies plus tard, il emploie près de 20.000 salariés et exporte l’excellence martiniquaise au-delà des frontières locales.

Ce n’est pas en fusillant le premier employeur privé de l’île que l’on améliorera le sort des populations. Ce n’est pas en endommageant sa locomotive qu’on relance le train Martinique. C’est en s’attaquant aux vrais facteurs de vie chère qu’on y parviendra, et ces facteurs sont connus de tous : la taille minuscule des marchés, l’éloignement des centres d’approvisionnement, la fiscalité locale, l’obésité d’un secteur public local inefficace et des coûts logistiques inévitables…

L’Autorité de la concurrence, après des enquêtes approfondies, a conclu à plusieurs reprises que dans ce contexte structurellement difficile, aucune pratique abusive de marges excessives ne pouvait être imputée à GBH. Pourtant, cette réalité ne semble intéresser ni les médias ni les responsables politiques opportunistes qui s’obstinent à confondre opinion et vérité.

Ce bashing anti-GBH est non seulement injuste, mais il est surtout dangereux pour la Martinique tout entière. L’attaquer de manière aussi malhonnête revient à réveiller les fractures d’un autre temps, à saper la confiance des entrepreneurs et à freiner toute dynamique de développement.

Il vise surtout à faire diversion pour ne pas mettre en œuvre les vraies solutions : plutôt que d’attaquer GBH, le ministre Valls serait inspiré de reprendre à son compte deux idées… Tout d’abord, confirmer l’engagement pris par l’Etat en signant le protocole contre la vie chère le 16 octobre dernier. De leurs côtés, les distributeurs ont tenu parole depuis le 1er janvier en réduisant leurs marges comme ils s’y étaient engagés. Car l’objectif de baisse de 20% des prix sur près de 6.000 produits de consommation courante ne sera possible que lorsque la suppression par l’Etat de la TVA sur ces produits et la mise en place d’une continuité territoriale auront été honorées par l’Etat. Espérons que le budget de la nation sera voté ce mercredi 5 février pour que l’Etat tienne enfin son engagement.

Seconde idée : plutôt que d’attaquer le monde économique, – car derrière GBH, ce sont aussi les entreprises, commerces, TPE et PME, les employés et apprentis qui se lèvent tôt qui sont attaqués et fragilisés -, pourquoi le ministre ne propose-t-il pas pour tous les Outre-mer l’instauration d’une « zone franche globale » comme l’a proposé François Bayrou pour Mayotte.

Au lieu de pointer du doigt un acteur économique essentiel, nous ferions mieux d’engager une réflexion constructive sur les solutions de continuité territoriale à mettre en œuvre, et de considérer une bonne fois pour toutes que GBH est une chance pour la Martinique et pour la France et non une menace. Car une chose est sûre : la politique du bouc émissaire n’est rien d’autre qu’une politique d’évitement de ses propres responsabilités. Loin d’être une solution, cette politique ne fera qu’aggraver la situation.

Tirer sur GBH, c’est tirer sur la Martinique. C’est tirer sur la France. Nous devons refuser cet aveuglement collectif et dénoncer celles et ceux qui se livrent à la facilité suicidaire de la démagogie.

 

Michel Taube

 

Directeur de la publication