Opinion Outre-Mer
17H19 - vendredi 3 octobre 2025

Au Pic rouge, la Polynésie entre dans l’ère des data

 

Au Pic rouge, la Polynésie entre dans l’ère des data

À deux pas de l’antenne qui domine Papeete, les armoires métalliques refroidies par ventilation renferment désormais une part du futur numérique polynésien. TDF vient d’inaugurer au Pic rouge son premier data center ultramarin, une infrastructure pensée pour garder les données du fenua à l’abri des aléas et loin des nuages virtuels aux contours incertains. La Banque de Polynésie y a déjà déposé ses fichiers, et d’autres entreprises s’alignent pour réserver une place dans ce coffre-fort moderne.

Le site, livré en juin et perché à 300 mètres d’altitude, joue la carte de la résilience. Ses salles informatiques sont doublées en alimentation et en climatisation, selon les standards Tier III, gage d’une continuité de service même en cas de coup dur. Positionné hors de portée des submersions, le centre se veut invulnérable aux coupures et aux secousses qui paralysent si souvent le territoire. TDF en profite pour marteler son credo : sécurité, proximité et souveraineté.

Car au-delà de la technique, c’est une vision politique du numérique qui s’affiche. Ici, pas question d’envoyer les données se perdre dans des serveurs étrangers. Le message est clair : garder les informations en Polynésie, sous le contrôle des lois locales et du RGPD, ce règlement européen qui impose la transparence et le respect du droit d’accès, de rectification ou d’effacement. Dans un monde où chaque piratage défraie la chronique, stocker au Pic rouge devient un geste de confiance et de souveraineté.

Le projet n’est pas immense comparé à la forteresse numérique de l’OPT à Papenoo, mais il vise un marché différent : celui des PME, institutions, médias ou encore banques locales qui cherchent à sécuriser leurs activités sans dépendre de serveurs bricolés dans un bureau ou d’un disque dur trop exposé. Christophe Sobczyk, délégué territorial Pacifique de TDF, le reconnaît avec franchise : « nos premiers concurrents, ce sont nos futurs clients ». Beaucoup stockent encore en interne, avec tous les risques que cela comporte. Le data center leur promet au contraire un espace sur mesure, où chacun pourra installer son matériel, gérer son rack comme il l’entend, et surtout rapatrier ses données quand il le souhaite.

L’investissement atteint 90 millions de francs, et une extension est déjà prévue pour 2026, doublant la capacité avec deux nouvelles salles et une quarantaine de baies disponibles. Ce développement doit répondre à une demande croissante : la Polynésie, comme ailleurs, connaît une explosion des usages numériques, des réseaux sociaux à la gestion bancaire en passant par l’administration. D’ailleurs, le Service informatique de la Polynésie française s’apprête à lancer un appel d’offres pour tester l’hébergement de ses propres données au Pic rouge.

Le centre de TDF ne se présente pas comme un simple entrepôt numérique, mais comme une brique de la transition du territoire vers une économie moderne. À l’heure où l’archipel multiplie les discours sur son avenir connecté, cet équipement donne une dimension concrète aux promesses. Au sommet de la vallée de Tipaerui, le Pic rouge n’abrite plus seulement une antenne emblématique : il devient le symbole d’une Polynésie qui veut garder la main sur ses données et sécuriser son virage numérique.

Patrice Clech

La trahison Letchimy, par un enfant d’Aimé Césaire

Il existe mille façons de montrer du mépris en politique. Certaines sont discrètes, d’autres éclatent comme une gifle. Serge Letchimy vient d’établir un nouveau record : annoncer, à 7 000 kilomètres de…