
Ils réclament des réponses, ils trouvent des barrages filtrants. Depuis 10h ce mardi 5 août, la mairie de Saint-Denis tourne au ralenti : accès principal fermé, circulation déviée, bus bloqués, centre-ville saturé. À l’origine de cette paralysie : une manifestation d’habitants du quartier de la Colline, bien décidés à obtenir un tête-à-tête avec la maire Éricka Bareigts. Douze jours après la destruction de trois maisons jugées dangereuses, la colère ne faiblit pas.
À l’angle de la rue Pasteur, une vingtaine de riverains se relaient devant l’hôtel de ville. Ils accusent la municipalité d’avoir rasé une partie de leur quartier sans concertation réelle, sous couvert de sécurité. En ligne de mire : la gestion des zones rouges post-cyclone Garance et un sentiment d’abandon profond. Les manifestants, déterminés, ont brièvement tenté de bloquer la rue de Paris avant d’être contenus par la police.
La mairie, de son côté, ne décolère pas non plus. Dans un communiqué publié dans la foulée, elle dénonce des « accusations graves et mensongères » émanant d’« individus irresponsables ». Selon la municipalité, aucun projet d’endiguement de la Colline n’a jamais été promis ni budgété dans les années passées, contrairement à ce qu’affirment certains manifestants. Et d’ajouter : « Les experts sont formels, l’endiguement est impossible. »
Face à la rumeur d’une volonté municipale de vider le quartier pour construire à neuf, la mairie coupe court : la zone est classée rouge au Plan de Prévention des Risques Naturels et reste strictement inconstructible. Les maisons détruites l’ont été, selon la Ville, sur la base d’un rapport d’experts du BRGM, après un risque identifié comme « imminent et mortel ». Une procédure d’urgence, prévue par la loi Letchimy, a été déclenchée. Logements meublés, six mois de loyers, eau et électricité compris auraient été proposés aux familles concernées dès début juillet.
Mais dans la rue, l’argumentaire technique ne calme pas les esprits. Les habitants dénoncent une éviction déguisée, un dialogue inexistant, et la brutalité d’une décision qui, selon eux, raye leur quartier de la carte. Une partie d’entre eux refuse désormais de parler à la presse, soupçonnée de rouler pour la mairie et la préfecture.
Pour l’heure, Éricka Bareigts ne s’est pas exprimée publiquement sur une éventuelle rencontre avec les manifestants. Pendant ce temps, la tension monte, les embouteillages s’étendent jusqu’au Barachois, et l’hôtel de ville reste cerné, symbole d’un bras de fer désormais politique entre une municipalité inflexible et un quartier qui refuse de disparaître en silence.
Patrice Clech

















