
Sur le tarmac de Koungou, un conteneur d’eau minérale vient d’être livré comme on reçoit un convoi humanitaire. Ce mardi 30 juillet, la commune a réceptionné la toute première cargaison issue d’un partenariat inédit avec l’Économat des armées (EDA), bras logistique du ministère des Armées. Une première nationale, présentée comme un modèle de coopération entre une collectivité locale et un opérateur d’État, que ni l’Hexagone ni l’Outre-mer n’avaient encore expérimentée.
À l’origine de cette initiative, le maire Assani Saïndou Bamcolo. Il a activé les réseaux interministériels pour faire face à une situation critique : la difficulté d’accès à l’eau potable pour les publics les plus vulnérables de sa commune. En ligne de mire, les enfants, les familles sous le seuil de précarité, les personnes âgées, les handicapés et les agents municipaux. En tout, ce sont près de 11 000 enfants attendus à la rentrée et plusieurs centaines d’administrés fragiles qui devraient bénéficier de cette distribution ciblée.
La logistique, assurée en partie par une vingtaine de jeunes du RSMA (Régiment du Service Militaire Adapté), a permis de déployer les premiers stocks avec une efficacité militaire. Ce renfort opérationnel vient appuyer les services techniques de la ville, débordés par les besoins croissants d’une population en tension permanente.
Le maire de Koungou ne cache pas sa fierté. Il voit dans cette livraison bien plus que des palettes d’eau : un symbole. Celui d’une République capable de faire converger ses institutions vers des solutions concrètes et rapides sur le terrain. Il évoque même une « excellence logistique », une « cohésion nationale » retrouvée, et surtout une preuve que « l’amour du territoire passe par l’action ».
Au-delà de la mise en scène, c’est bien l’urgence qui domine. À Mayotte, les coupures d’eau sont devenues une donnée structurelle. Les retenues collinaires peinent à remplir leurs rôles, les installations de traitement sont saturées ou vétustes, et la pression démographique rend chaque litre compté. Dans ce contexte, l’acheminement d’eau embouteillée via les réseaux de la Défense pourrait bien devenir un levier durable, au moins en attendant des investissements lourds dans les infrastructures.
Reste à savoir si ce déploiement exceptionnel a vocation à se répéter ou s’il restera un geste symbolique. Pour l’heure, la mairie assure vouloir inscrire cette convention dans le temps. Quant à l’État, ce premier test grandeur nature pourrait ouvrir la voie à d’autres coopérations similaires sur le territoire national. À Koungou, en tout cas, l’eau est enfin arrivée.
Patrice Clech

















