Opinion Outre-Mer
10H06 - vendredi 18 juillet 2025

Ovalie calédonienne : un sursaut pour retisser les liens du territoire

 
Ovalie calédonienne : un sursaut pour retisser les liens du territoire

Ovalie calédonienne : un sursaut pour retisser les liens du territoire

À treize mille kilomètres de l’Élysée, un ballon cherche désespérément à rebondir. En Nouvelle-Calédonie, le rugby a le cœur chaud mais les jambes faibles. Si les rêves de terrain et de sélection frémissent toujours dans les collèges et les villages, les vestiaires délabrés, les pelouses en friche et l’encadrement famélique menacent de transformer la passion en frustration. Un joueur de province nord le résumait sans détour : ici, on joue encore sans vestiaire et sans lumière. Et l’on s’étonne que les jeunes décrochent.

Pourtant, ce territoire d’Océanie a ce que d’autres lui envient : un vivier exceptionnel de talents, une culture du rugby profondément ancrée, et une géographie stratégique entre l’Europe et l’Australie. Mais le nombre de licenciés stagne, les clubs survivent plus qu’ils ne se développent, et les entraîneurs se comptent sur les doigts d’une mêlée. À force de rester hors-jeu, le rugby calédonien flirte dangereusement avec le carton rouge.

Alors un plan de relance est en cours. Et cette fois, on voit grand. Objectif : tripler le nombre de licenciés d’ici 2030, en passant de 1 000 à 3 000 joueurs, avec une stratégie qui va bien au-delà du simple terrain. Car pour que l’ovalie reprenne racine, il faudra la planter dans les écoles, les quartiers, et même dans les esprits. Le rugby à cinq, sans contact, sans crampons, sans pelouse obligatoire, devient l’arme douce de cette conquête. Plus facile à mettre en place, plus accessible, il promet de faire entrer les valeurs du collectif là où le sport est souvent absent.

Mais ce n’est pas tout. Des « maisons du rugby » doivent voir le jour : infrastructures complètes avec terrain, vestiaires, salle associative et soutien scolaire. De vrais lieux de vie, pensés comme des repères éducatifs, pas seulement comme des stades. Et pour les jeunes talents, un projet de compétition régionale U16 et U18 se dessine. L’idée ? Les faire jouer contre les Samoa, les Fidji, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande, mais sans les déraciner trop tôt. Garder les espoirs sur place, leur offrir une scène locale, éviter les décrochages. C’est ambitieux. Et inédit dans le Pacifique.

En toile de fond, l’agenda international donne un coup de projecteur : Coupe du monde 2027 en Australie, Jeux Olympiques 2028 à Los Angeles… La Calédonie pourrait devenir base d’entraînement pour les Bleus, notamment en rugby à sept. Mais pour que cela devienne réalité, il faudra autre chose que des discours : des installations dignes de ce nom, une coordination sérieuse, un encadrement professionnel.

Sur le plan mondial, la Nation Cup prévue en 2026 rebat les cartes. Les test-matchs deviendront des compétitions à enjeux, avec montées, descentes, et exigence accrue. Pour y répondre, il faudra élargir les effectifs, ménager les corps, éviter l’hémorragie des blessures. La réforme impose donc un travail de fond dans les territoires. Et la Calédonie pourrait en être un laboratoire.

Le plan prévoit un budget total de 240 millions CFP, répartis entre infrastructures, formation, logistique et communication. Encore faut-il que ces promesses ne restent pas sur papier. Car pour les gamins qui, comme Joris, 17 ans, ont déjà songé à raccrocher les crampons faute d’encadrement ou de matchs, l’envie ne tient qu’à une chose : croire que le rugby peut redevenir une fierté locale, pas un luxe inaccessible.

La balle est désormais dans le camp des institutions locales. À elles de prouver que, cette fois, la mêlée calédonienne ne reculera plus.

 

Patrice Clech

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