
Cette année plus encore que les précédentes, la journée de la laïcité du 9 décembre se traduit par une série d’initiatives qui se tiennent parfois au même moment (la concurrence va être « féroce ») et à tous les moins en ordre dispersé.
Mais quand donc aura-t-on en France une belle et grande Journée nationale de la laïcité, officiellement inscrite dans le calendrier républicain, présidée par le président de la République qui pourrait chaque année prononcer un grand discours, et nourrie surtout de milliers d’initiatives partout en France comme nous en donnent l’exemple la journée du 8 mars pour les droits des femmes ou celle du 1er décembre dans la lutte contre le sida ?
Tout le monde reconnaîtra que la laïcité est une de principes fondamentaux de la République française mais qu’elle est aujourd’hui malmenée.
Une telle journée nationale et donc plus nécessaire que jamais.
Il y a la journée que les écoles consacrent à la laïcité, il y a la journée de la laïcité décrétée dans l’ensemble de la fonction publique, il y a les référents laïcité et malgré tout cela, d’enquêtes en enquêtes, a fortiori auprès des générations les plus jeunes, le doute s’est installé. On n’y croit plus.
Les grandes heures de la laïcité furent celles où la laïcité était un combat militant, où anticléricalisme et volonté de déchristianisation se combinaient au service d’un projet de société. C’était une époque où les gouvernants avaient l’ambition d’utiliser la laïcité pour faire nation en rassemblant tous les Français dans un moule commun. La laïcité exprimait l’idéal républicain.
Que sont ces ambitions devenues ? Le combat anticlérical avec l’Eglise catholoque est terminé et une cohabitation harmonieuse et pacifiée des religions s’est installée tout au long du XXème siècle.
Mais les temps ont changé. Que dire en 2025 du projet de déchristianisation qu’une sécularisation de la société aujourd’hui en recul a silencieusement servi durant de nombreuses décennies ?
Aujourd’hui le combat de la laïcité ne s’adresse plus au christianisme mais vise à dompter l’islamisme qui menace non seulement les musulmans eux-mêmes mais l’ensemble de la société française. Le wokisme à l’américaine attaque aussi le modèle universaliste français.
Face à ces nouveaux défis, une laïcité de consensus, tiède, froide, est-elle le destin de la laïcité ? A l’âge de la société multiculturelle que la France est devenue existe-t-il une autre solution ?
Tout dépend de la société qu’on veut. Tout dépend du contrat sur lequel les citoyens doivent se mettre d’accord. La laïcité n’aura pas le même visage si l’on se dirige vers une société créolisée ou si l’on renoue avec une société assimilatrice. Il est temps de sortir des faux semblants.
Il ne s’agit pas de vouloir renouer avec les fantômes du début du XXème siècle mais d’affronter les enjeux auxquels nous devons faire face et d’en tirer les solutions qui s’imposent.
C’est au plus haut sommet de l’État d’énoncer le rôle que devrait jouer la laïcité pour réduire les fractures qui menacent la cohésion de la société. Doit-on renforcer le principe de laïcité dans la Constitution, au-delà du simple adjectif de l’article 1 ?
La laïcité a vocation à redevenir la colonne vertébrale d’un projet de société républicain à l’heure de la renaissance de tous les dogmatismes, de la résurgence des emprises religieuses radicalisées, du recul l’esprit scientifique fondé sur des observations objectives et un raisonnement rationnel.
Raison de plus pour célébrer dignement un marqueur qui distingue la France dans le monde et d’en faire le marqueur de politiques publiques volontaristes où l’intérêt général l’emporte sur les désirs individuels. Sinon nous rejoindrons tous l’enfer du chacun pour soi.

Daniel Keller est directeur dans un groupe de protection sociale, président des Anciens Elèves de l’ENA en entreprise, ex-président de l’association des Anciens Elèves de l’ENA, Ancien membre du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE).
Thierry Gibert, âgé de 53 ans, vit à Aurillac dans le Cantal. Délégué Départemental de l’Éducation Nationale du Cantal, il est formateur « Valeurs de la République et Laïcité » en région Auvergne-Rhône-Alpes, responsable syndical départemental, président de l’association Union des famille laïques du pays d’Aurillac, fondateur du collectif citoyen En Avant Aurillac. Il s’exprime à titre personnel dans les colonnes d’Opinion Internationale.



















