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10H18 - vendredi 26 septembre 2025

La tentative génocidaire contre les Druzes. Tribune d’Alessandro Bertoldi

 

La tentative génocidaire contre les Druzes. Tribune d'Alessandro Bertoldi

Je me suis rendu à Julis, en Israël, un village habité presque exclusivement par des Druzes, la minorité arabe ni musulmane ni chrétienne qui compte environ 150 000 personnes. Julis est surtout le lieu de résidence de leur leader, le cheikh Muwaffaq Tarif, où vivait auparavant son grand-père : leur quartier général spirituel et politique. Leur présence dans la région est ancienne, même si, à l’origine, ils venaient pour la plupart des montagnes syriennes limitrophes d’Israël. Aujourd’hui, la majorité d’entre eux vit au Liban et en Syrie, une partie en Israël et une petite communauté en Jordanie ; on estime leur nombre total dans le monde entre un million et demi et deux millions. Le seul pays où ils se sentent totalement libres et en sécurité est Israël, dont ils rappellent avec fierté avoir contribué à la fondation. Mais ils vivent aussi dans de bonnes conditions au Liban et en Jordanie.

Les Druzes sont la seule minorité qui, depuis la fondation d’Israël en 1948, effectue le service militaire obligatoire (sauf les femmes). Ils participent à la vie sociale et politique d’Israël comme les Juifs. Bien que communauté conservatrice et introvertie, ils sont ouverts au dialogue et à l’alliance avec d’autres groupes. Certains ont fait carrière dans la politique, l’armée ou les affaires. À Jérusalem, lorsqu’on parle d’eux, les commentaires sont toujours les mêmes : « ils sont forts, ce sont les meilleurs, ce sont nos frères ». Les Druzes sont les seuls en qui les Juifs font véritablement confiance, notamment sur le champ de bataille : ils sont loyaux et fiables. Peut-être parce qu’ils croient en la réincarnation, et donc que leur âme ne meurt jamais mais se réincarne dans un autre corps. Ils n’ont pas peur de mourir, mais doivent préserver leur âme en accomplissant de bonnes actions dans chacune de leurs vies.

Fiers d’être israéliens, ils vivent au nord aux côtés de Juifs, d’Arabes chrétiens et musulmans sans créer de conflits. Dans leurs villages, on voit flotter deux drapeaux : celui d’Israël, avec l’étoile de David, et le drapeau coloré de leur communauté. Partout où ils vivent, les Druzes privilégient la médiation et respectent l’État qui les accueille. Pourtant, au cours de leur millénaire d’histoire, ils ont été souvent persécutés (comme les Juifs), toujours par des musulmans radicaux refusant l’existence d’autres religions dans la région, et encore moins celle d’Arabes non musulmans.

Depuis le 12 juillet dernier, les Druzes ne parlent que de guerre, de politique et de géopolitique. Ce jour-là a commencé le massacre des Druzes syriens à Soueïda et dans les localités voisines, près de la frontière israélienne : près de 2 000 personnes ont été tuées par les jihadistes avec une brutalité rappelant l’attaque du 7 octobre. Ils montrent des images de femmes et d’enfants découpés vivants. J’ai moi-même vu la vidéo d’un terroriste qui, sourire aux lèvres, ouvre le torse d’un homme vivant comme on égorge un chevreau et en extrait le cœur à mains nues pour le mordre. Qu’y a-t-il de plus barbare et inhumain ? Comment peut-on concevoir pareille atrocité ? C’est l’imagination de l’horreur, celle des bouchers du mal — la même qui inspira le Hamas le 7 octobre 2023, quand ses miliciens mirent des bébés dans des fours à micro-ondes, violèrent des mères devant leurs enfants avant de les éventrer vivantes. On a même trouvé des images de colonnes vertébrales arrachées et entassées dans un kibboutz.

L’attaque a été menée par les milices gouvernementales syriennes, proches du nouveau président al-Sharaa — anciennement connu sous le nom d’al-Jolani —, qui a changé d’identité pour se faire reconnaître comme dirigeant légitime par la communauté internationale, tentant de faire oublier son passé sanglant. Donald Trump avait dit de lui : « c’est un bon gars ». Pourtant, il fut le chef des terroristes de Daech, et il est parvenu à faire oublier, presque à tous, qui il était réellement.

J’ai demandé à mes amis druzes, notamment à un général réserviste de Tsahal, pourquoi les troupes syriennes avaient décidé de les attaquer maintenant, alors que cela contredisait la stratégie de respectabilité recherchée par Damas. Il m’a répondu clairement : « en effet, cela n’a pas de sens, mais les islamistes, lorsqu’ils se sentent forts, cherchent toujours à s’imposer par la violence, à soumettre les minorités, à montrer qui détient le pouvoir et jusqu’où ils peuvent aller ». Ce qu’a fait le Hamas le 7 octobre, ils l’ont fait l’été dernier contre les Druzes en Syrie.

À Jérusalem et à Tel-Aviv, d’immenses affiches druzes appellent directement le secrétaire d’État américain Marco Rubio à « sauver Soueïda », à intervenir. Pour l’instant, seul Israël a agi. Malgré la reconnaissance croissante par l’Occident du nouveau dictateur syrien, Israël, trois jours seulement après l’attaque génocidaire contre les Druzes, a bombardé les milices gouvernementales et même le ministère de la Défense à Damas. Le message était clair : on ne touche pas aux Druzes.

En juillet, grâce aux frappes aériennes israéliennes et au courage des Druzes d’Israël, les Druzes de Syrie ont été sauvés d’une véritable tentative de génocide. Malgré les victimes et les familles détruites, ils résistent et restent en contact constant avec leurs frères d’Israël, qui ont mis en place un système avancé pour leur fournir une aide humanitaire et médicale en temps réel. Beaucoup regrettent aujourd’hui, à contrecœur, la dictature laïque de Bachar el-Assad. La situation s’est améliorée dans la plupart des villes druzes, repassées sous contrôle local, même si de nombreuses infrastructures ont été détruites. Une trentaine de villages montagneux restent toutefois aux mains des jihadistes.

Pour cette minorité fascinante et pacifique, la protection de l’État hébreu est une garantie de survie dans toute la région. Sans elle, le génocide serait en train de s’accomplir. Et je parle bien de génocide, car il ne s’agit pas de morts dues à une guerre, mais d’un groupe ethnique et religieux contre lequel s’est déchaînée la brutalité jihadiste, visant uniquement à son élimination. C’est bien une tentative de génocide.

Contre les Druzes, heureusement, cela ne fonctionnera pas : leur âme ne peut être tuée. Comme le savent les Israéliens, ils n’ont pas peur de combattre le mal, car ils savent qu’après la mort ils se réincarneront dans une autre vie. Honneur aux Druzes, et à Israël qui combat à leurs côtés.

Alessandro Bertoldi
Directeur exécutif de l’Institut Milton Friedman