Edito
10H18 - samedi 6 décembre 2025

Retrouvons le sens du travail. La chronique de Patrick Pilcer

 

Quand Olivier Faure flirte à son tour avec l’antisémitisme… La chronique de Patrick Pilcer

Qui, honnêtement, peut encore avoir envie de travailler en France lorsqu’on écoute certains députés ? À les entendre, toute activité professionnelle relèverait d’une torture antique. Il est vrai que la pénibilité existe, que certains métiers abîment, et qu’il faut, partout, améliorer les conditions de travail.

Mais de là à faire du travail un champ lexical du pathos, un gémissement permanent ? Pour beaucoup de nos élus, qui n’ont connu que les couloirs feutrés d’un parti, et ses coups tordus, d’une administration ou d’un cabinet ministériel, le travail semble être surtout… un concept bien théorique.

Pourtant, le travail n’est pas une souffrance, c’est une émancipation. C’est ce qui permet de s’élever, de quitter un déterminisme social, de découvrir ses talents, de devenir meilleur que la veille. Travailler, c’est apprendre, c’est se dépasser, c’est parfois se réinventer. C’est même, osons-le, un effort joyeux — le seul effort qui transforme autant celui qui le fait que le monde dans lequel il agit.

Il faut dire que notre langue ne nous aide guère. En France, nous avons hérité du latin tripalium, un instrument de torture. Avouez que commencer avec un tel ancêtre n’incite pas à sourire. Une femme qui accouche est « en travail » : comment voulez-vous redonner du charme au mot après cela ? Pourtant sous péridurale, ou malgré la douleur, c’est l’un des plus beaux moments de sa vie de femme. Quoi de plus beau que de donner la vie !

Ailleurs, c’est tout autre chose : werk an Allemagnework dans les pays anglo-saxons… des termes qui renvoient à l’œuvre. Et soudain, tout change. L’employé, l’ouvrier, l’artisan, l’entrepreneur ne sont plus dans la douleur mais dans la création. Ils ne subissent pas : ils accomplissent. Ils façonnent une œuvre, parfois modeste, parfois immense, mais toujours singulière. Ils visent leur chef-d’œuvre — cette pièce où la maîtrise de l’art rejoint la quête de la perfection.

C’est cette vision qu’il faut retrouver : l’homme ou la femme au travail n’est pas un supplicié moderne, mais un opérant, celui qui agit sur la matière, sur la nature, sur les autres humains, qui transforme et se transforme. L’étymologie latine nous le rappelle : operarioperarius — celui qui fait. Celui qui agit. Cela nous a donné ce beau mot d’ouvrier.

Au lieu d’inventer chaque semaine un nouvel impôt, une nouvelle norme ou une nouvelle contrainte administrative, qui finiront par convaincre les meilleures volontés qu’il vaut mieux ne rien faire, ou ne plus rien faire ici et œuvrer ailleurs, nos députés devraient redonner du sens au travail, en rappeler les vertus, en célébrer la dignité. Ils devraient faire comprendre que l’enjeu n’est pas de rêver une société de l’oisiveté ou du temps libre, mais de construire une société où chacun trouve sa place, sa mission, sa part d’œuvre dans le grand collectif de la Nation.

Retrouvons le sens du travail, glorifions à nouveau le travail ; l’antidote pour remettre sur pied notre société est peut-être là. Alors les Français pourront retrouver le sens d’un avenir commun et de l’intérêt général.

 

Patrick Pilcer

Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers, auteur de « Ici et maintenant – lecture républicaine de la Torah » (préface du Grand Rabbin de France, Haïm Korsia, éd. David Reinharc). Prochain livre à paraître le 17 novembre 2025 : « Radicalement républicain. Le mur n’est pas une fatalité. » Éditions InterVision.

Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers
Patrick Pilcer, Président de Pilcer & Associés, conseil et expert sur les marchés financiers