Edito
20H41 - jeudi 21 janvier 2021

La France a besoin d’un deuxième plan de relance de notre économie. L’édito de Michel Taube et Patrick Pilcer

 

 

Patrick Pilcer, Conseil et Expert sur les Marchés Financiers, et chroniqueur dans notre média, défendra le Vœu d’un 2ème plan de relance de notre économie lors des Vœux d’Opinion Internationale jeudi 28 janvier 2021 à 19h sur Zoom. Merci de vous inscrire ici.

 

Vaccinons, vaccinons, vaccinons (enfin, allons-y franchement !) notre population, mais relançons dès à présent notre économie. Le nouveau président américain Joe Biden a, quelques jours avant sa prise de fonction, proposé un plan de relance massif de son économie, un plan à 1 900 milliards de dollars. Si nous tenons compte des poids respectifs de la population française par rapport à la population américaine, ou du PIB de la France par rapport aux Etats-Unis, un vrai plan de relance français à la mesure de l’enjeu devrait avoisiner entre 250 et 400 milliards d’euros ! On est bien loin des 100 milliards mis en place cet été par le gouvernement Castex, avec l’aide de l’Europe. 

Quel incroyable paradoxe de voir les Etats-Unis d’Amérique, emblème du libéralisme, soutenir massivement leur économie, alors que le prétendu Etat providence français en est à nouveau au saupoudrage dicté par des hauts fonctionnaires arcboutés sur leur calculatrice. L’exemple américain démontre que la valeur de l’argent n’a plus la même signification dans cette crise planétaire. Pour Joe Biden, et même avant lui Donald Trump, « Quoi qu’il en coûte » n’est pas une formule, mais une réalité. 

Autant dire, mais chacun le constate déjà autour de lui, que le plan français est avant tout un plan de survie. Il est grand temps à présent de passer à la vitesse supérieure et de lancer un véritable plan de relance.

Globalement, nous l’avons déjà écrit, la France a besoin d’un véritable électro-choc sur le coût du travail, d’une refonte totale de sa fiscalité et d’une simplification administrative. Sur ce dernier point, la pandémie et la mise en place du plan de vaccination ont démontré, mais qui en doutait, que le fonctionnement administratif actuel de notre pays nous asphyxie alors que chaque molécule d’oxygène nous est vitale. Nous reviendrons sur ce nécessaire électro-choc sur le coût du travail, absolument vital pour notre pays, mais chaque secteur économique a besoin aussi de recevoir une double-dose de vitamines et un plan de relance approprié.

La France a à présent besoin de passer d’un plan de survie à un véritable plan de relance, massif cette fois, combinant des aides directes aux secteurs fermés administrativement (restauration, tourisme, culture…), des aides à l’investissement et à la réindustrialisation, le financement de plans de relance territoriaux décentralisés confiés pleinement aux choix stratégiques des régions, des départements et des communes, enfin des aides à la consommation des ménages les plus pauvres.

Ce plan doit être concret et servir puissamment d’effet de levier aux secteurs d’activité les plus créateurs d’emploi et de vivre-ensemble.

 

« Quand le bâtiment va, tout va »

Dans cet esprit, mettons ici le projecteur sur le secteur de la construction et de l’immobilier au sens large, parent pauvre de ce quinquennat. La start-up nation voulue par Emmanuel Macron a un peu vite oublié que, conformément à l’adage populaire plein de bon sens, « quand le bâtiment va, tout va » (ou presque). Car ce secteur est crucial pour notre économie, et ses emplois ne sont pas vraiment délocalisables. De l’architecte au plombier, du vendeur de meubles au peintre, du fabricant d’électro-ménagers à l’assureur et au banquier en passant par le notaire, ce sont plusieurs centaines de milliers d’emplois d’une très grande diversité, des millions de vies qui dépendent de ces activités, sans parler des personnes qui trouvent ainsi un toit, un bureau, un local, un entrepôt, ou des compléments à leur petite retraite, via l’investissement locatif. 

Selon des études récentes, un logement construit, c’est 1,6 emplois créés, un milliard investi, ce sont 12 000 emplois générés. En 2018, construction et immobilier ont permis de créer plus de 230 000 postes, deux fois plus que tous les autres secteurs, de la haute technologie à l’industrie. La construction et l’immobilier, ce sont plus de 8% des emplois de notre économie, bien plus encore si on compte les emplois induits et les retombées indirectes. Et que propose notre gouvernement pour ce secteur ? Rien, trois fois rien ! Alors que ce secteur pourrait dynamiser fortement notre pays, nos territoires, et participer grandement à la relance si nécessaire que nous recherchons.

En fait, le gouvernement propose une mesure : la mise en place de la réglementation environnementale 2020, la RE 2020. La prise en compte des enjeux environnementaux est bien évidemment cruciale mais mi-décembre, le gouvernement n’a rien trouvé de mieux que d’accélérer dans son souhait de légiférer en la matière. Plutôt que de trouver avec les professionnels du secteur les voies et moyens pour traduire ce légitime souhait politique en réalités opérationnelles, le gouvernement cède à l’approche technocratique, au risque de paralyser complètement cette filière alors qu’il faudrait la booster. Ce pays est décidemment sous-gouverné et sur-administré. En outre, nos dirigeants oublient que si tous les Français sont soucieux de la protection de l’envirionnement, ils ne sont qu’une infime minorité à se reconnaître dans l’écologie politique, largement d’extrême gauche, qui veut dicter son calendrier au gouvernement. Il est encore temps de dire stop et de demander au gouvernement non seulement de mettre ce projet en mode pause mais aussi de penser d’abord à la relance de ce secteur. Sans cela, cette approche trop technocratique, administrative, loin des contraintes réelles et opérationnelles, va transformer une belle attente environnementale en crise sociale, au pire moment.

Plutôt que d’ajouter une crise à la crise, il faut que le gouvernement mette en place des mesures immédiates pour dynamiser cette filière. Nous en proposons trois.

Premièrement, mettre cette fameuse Réglementation Environnementale en mode pause. Après tout, une pause peut participer en soi à un état d’esprit de relance. Il convient d’attendre que le consensus émerge, que les techniques soient au point, validées, et que la réalité opérationnelle permette une mise en place réussie, au bénéfice de tous.

Deuxièmement, supprimer l’IFI comme le demandait une précédente chronique, le tristement célèbre ancien impôt sur la fortune, désormais impôt sur la fortune immobilière. Un impôt qui date du programme commun de la gauche des années 70 et qui rappelait l’impôt sur les portes et fenêtres, instauré par le Directoire en 1798 et supprimé un siècle plus tard quand on fit le terrible constat qu’il accentuait l’insalubrité des logements (la lecture des Misérables de Victor Hugo sur cet impôt est édifiante). Quelle faute politique, quelle méconnaissance des Français que de stigmatiser l’immobilier en le taxant ainsi alors que le rêve de devenir propriétaire les caractérise si fortement. Il est enfin temps de tourner cette page et permettre la relance des investissements de tous les Français, pour tous, et pas seulement des fonds immobiliers.

Troisièmement, poursuivre la simplification administrative. La durée entre le dépôt d’une demande de permis de construire et le démarrage d’un chantier doit être réduite le plus possible. Sans parler des spécialistes des recours abusifs qu’il convient enfin de dissuader efficacement. Il est temps de passer des paroles aux actes en la matière.

Rappelons que la construction et les mises en chantier sont parmi les éléments économiques les plus lents à sortir d’une récession ou d’une crise sans aide exogène. 

La stratégie de relance de ce secteur, articulée autour de ces trois points, sera ainsi très peu coûteuse pour l’Etat tout en étant très efficace économiquement. Aucune niche fiscale n’est créée, aucune usine à gaz, aucun recours à Bruxelles. On permet simplement aux acteurs de ce secteur de se développer et on fait preuve de bon sens. 

Un plan de relance massif, concentré sur les secteurs leviers comme le bâtiment, profitera à tous les autres secteurs, à toute notre économie, à tout le pays.

 

Patrick Pilcer, Conseil et Expert sur les Marchés Financiers

 

 

 

 

 

 

 

& Michel Taube

 

 

 

 

 

 

 

 

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