International
17H11 - mercredi 7 décembre 2016

Il n’y a que des solutions : Marrakech prend très au sérieux la propreté de sa ville

 

Marrakech a accueilli la COP22 fin novembre. Focus sur un enjeu clé pour la ville ocre : traitement des eaux usées, tri sélectif, réchauffement climatique, Khadija El Faddi, vice-Maire de Marrakech en charge de la lutte contre l’insalubrité, revient sur ces questions au cœur de sa mission. Entretien.

 

Khadija El Faddi, vice-Maire de Marrakech en charge de la lutte contre l’insalubrité - Crédit photo : Stéphanie Petit

Khadija El Faddi, vice-Maire de Marrakech en charge de la lutte contre l’insalubrité – Crédit photo : Stéphanie Petit

 

Vous êtes en charge de la lutte contre l’insalubrité dans la ville de Marrakech, quels sont les plus gros obstacles auxquels vous devez faire face ?

Nous avons fourni un véritable effort en termes de collecte, liquide ou solide, des déchets. Pour les déchets solides, nous sommes à plus de 95% de collecte avec une mise en décharge contrôlée et un captage de biogaz, nous sommes dans les normes. Pour l’assainissement liquide, nous approchons de cet ordre de grandeur.

Marrakech est dans une zone semi-aride. Donc le problème de ressource en eau a toujours été présent. Auparavant la population réutilisait les eaux usées mais il n’y avait pas de trace de chrome ou encore de phénol dans l’eau. A présent, nous avons une station d’épuration qui traite 1000 litres/ seconde avec un retour sur énergie de 45%, ce qui veut dire qu’elle produit 45% de l’énergie nécessaire à son fonctionnement.

Actuellement nous sommes au début de la sensibilisation de la population au tri sélectif. C’est un projet qui nous tient vraiment à cœur et sur lequel nous avons commencé à travailler avec les populations, quartier par quartier. Ce projet doit être pris dans sa globalité : sensibilisation, infrastructures nécessaires. Ces projets sont importants et deviennent rentables sur le long terme mais ils sont aussi très couteux à mettre en place.

Nous travaillons également à l’installation d’un centre de recyclage, en s’inspirant des méthodes traditionnelles qui fonctionnent à Marrakech depuis la nuit des temps. En se promenant dans la médina, on trouve de beaux objets faits à partir de matériaux recyclés.

Dans les années 80, nous avons connu une sécheresse très accentuée, le cheptel s’est réduit et la laine a fait défaut. La femme marocaine a alors eu l’idée de remplacer la laine par les chutes de tissus. Aujourd’hui, les tapis marocains font le tour du monde et sont de vrais tableaux.

 

La COP22 a-t-elle apporté un coup de pouce aux initiatives concrètes au Maroc comme les vôtres ?

La résilience des océans, le traitement des eaux usées avant leur rejet dans l’océan ont commencé avant les COP. Ceci dit, le Maroc a une vraie volonté et une action politique pour protéger les océans, notamment avec la COP22 et la MedCOP.

Par ailleurs, en vue de la COP notamment, nous avons aussi engagé des efforts pour la mobilité avec des bus électriques, une rocade pour désenclaver le trafic. Il y a un foisonnement des startups avec de belles innovations pour le climat (cf encadré).

Dernièrement, des bornes à vélos ont été installées pour la COP22 sur le modèle des vélib parisiens. Personnellement, je suis contre ces bornes car Marrakech est connue dans le monde entier pour l’utilisation de la bicyclette. Nous n’en avons pas réellement besoin. Elles sont plutôt destinées à offrir des vélos de qualité pour des touristes par exemple. Les Marrakchis utilisent la bicyclette car nous avons un climat propice.

 

Les femmes sont les premières victimes du réchauffement climatique. Le Maroc prend-il en compte cet enjeu.

Avant tout, il faut avoir une volonté politique de la présence de la femme. Pour le moment, dans le monde entier, la représentation de la femme reste très minime. Au Maroc, les femmes représentent 52% de la population et ne sont pas suffisamment représentées. Il est urgent de fournir un effort plus important, les pouvoirs publics étant en retard en la matière.

 

Propos recueillis par Stéphanie Petit

 

Ville propre, une initiative marocaine pour le climat

 

Editée par la startup M3KOD, l’application Ville propre propose aux Marocaines et aux Marocains de s’impliquer concrètement dans la lutte contre les changements climatiques par le biais de la lutte contre les déchets. Le principe est simple : muni de son smartphone, le citoyen prend en photo un déchet et l’envoie par le biais de l’application au service de propreté de la ville. La photo contient les informations géographiques du déchet pour qu’il soit localisé rapidement.

Plus le citoyen éco-responsable utilise son application, plus il gagne de points qu’il peut échanger contre des recharges téléphoniques ou d’autres produits des partenaires des startups. L’initiative qui fonctionne pour le moment au Maroc uniquement a séduit le ministère de l’Energie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement qui en est le partenaire officiel.

 

https://www.youtube.com/watch?v=zdHkMOMqzUs

Journaliste