International
13H15 - vendredi 24 juin 2016

Le grand désalignement a commencé

 

Les partisans du Brexit ne se sont pas astreints aux calculs élémentaires sur l’avenir de leur puissance militaire dans un Royaume désuni, car l’Écosse en était la clé.

Crédit photo : DR

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L’UE s’en remettra. Le Royaume-Uni n’était pas vraiment fait pour l’Europe, une fracture n’a cessé d’exister entre ceux qui regardent vers les États-Unis, le Canada, l’Australie, comme leur deuxième patrie, et les europhiles. L’anglo-saxonisme de ce regard atlantique est encore bien présent en Angleterre… Oui, en Angleterre, et au pays de Galles (où le sentiment régionaliste n’est pas  fort), la majorité a choisi le Brexit.

 

L’Écosse moderne, elle, regarde vers l’Europe. De manière surprenante, l’Irlande du Nord aussi. Mais pour cette dernière, il y a de fortes nuances : les unionistes (partisans du maintien dans le Royaume-Uni), c’est-à-dire grosso modo les protestants, ont plutôt opté pour le « leave » (quitter) ; et les nationalistes (partisans du rattachement à la République d’Irlande), tout aussi grosso modo une majorité de catholiques, pour le maintien dans l’Union européenne. Ainsi, cette région du Royaume-Uni a voté dans un prolongement de la division interne pro ou anti-Royaume-Uni, qui se décalque en négatif sur les pro ou anti-UE.

 

L’Écosse, elle, a voté à 62 % pour le maintien dans l’Europe, le score record de toutes les parties constituantes du royaume. Comme son actuel gouvernement, indépendantiste, l’a promis : les Écossais ne quitteront pas l’UE et Nicola Sturgeon, leur Premier ministre, l’a réaffirmé dès ce matin. Un deuxième référendum sur l’indépendance de l’Écosse se tiendra donc prochainement, lui permettant ainsi, en cas de sortie du Royaume-Uni, de rester dans l’UE. Or le parti de Sturgeon, le SNP (Scottish National Party), ne souhaite pas vraiment demeurer dans l’Otan ! La défense, c’est l’affaire des impérialistes, les gentils Écossais modernes ne sont pas de cette étoffe-là. Les bases navales, et les eaux territoriales les plus étendues en haute mer, du Royaume-Uni se trouvent en Écosse. Une Écosse indépendante ne serait plus partie intégrante du système de défense, et ne s’engagerait pas dans une posture enthousiaste d’adossement stratégique au futur royaume d’Angleterre. Les eaux territoriales seront alors mal défendues contres les incursions des marines malveillantes, comme la russe — même  chose pour l’espace aérien. Or depuis deux ans, elles ont fortement augmenté. L’Otan devra nécessairement placer l’Écosse sous un parapluie défensif, que le SNP ne semble pas vouloir payer. L’esprit d’ouverture écossais pourrait devenir un esprit de retraite hors du monde stratégique. Les indépendantistes catalans pourraient en prendre exemple: rester européen mais ne pas participer à l’Alliance atlantique. Les indépendantistes catalans ne s’intéressent pas une seconde à ces questions, leur monde est festif, circonscrit au cocon protecteur de leur petite nation, à la fois régionaliste et multiculturelle. Le nationalisme écossais, catalan, même québécois n’ont pas de vision militaro-stratégique. On ne se retire pas des affaires stratégiques sans se diminuer.

 

Or la défense de l’Europe, c’est l’Otan. Sur le plan stratégique, c’est-à-dire face à la Fédération de Russie, et aussi à Daech, un jour peut-être à la Chine, l’Otan est le bouclier de l’Europe. Pour les opérations de niveau local, balkanique ou africain, l’UE peut générer des forces, tirées par les forces françaises. Donc l’Écosse ne serait plus dans le jeu stratégique, la Catalogne non plus, et l’Irlande du Nord pourrait se rapprocher – voire s’y rattacher par référendum – de la République d’Irlande qui elle est neutre, hors de l’Otan et peu connue pour ses interceptions d’intrus russes. Elle participe aux opérations africaines. Au moins ça.

 

Bref, les souverainistes britanniques ont œuvré, sans la moindre lucidité ou clairvoyance, contre leur propre défense géostratégique, risquant allègrement d’affaiblir l’Otan et leur propre intérêt national. C’est en cela, et uniquement en cela, que les Européens et même  les Nord-Américains, vont réellement souffrir. Les Britanniques anti-européens ne nous manqueront pas, mais le Royaume-Uni, qui nous était nécessaire d’un point de vue géostratégique, vient de se faire hara-kiri.

 

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