Edito
09H59 - mardi 29 juillet 2025

L’accord commercial entre l’Union Européenne et les États-Unis, du pain bénit pour les frexiteurs ! L’édito de Michel Taube

 

L’accord commercial entre l’Union Européenne et les États-Unis, du pain bénit pour les frexiteurs ! L’édito de Michel Taube

L’accord signé par Ursula von der Leyen avec Donald Trump sur les droits de douane et les échanges commerciaux est un véritable scandale. Une nouvelle preuve, s’il en fallait, de l’impuissance politique de la Commission européenne face à la brutalité stratégique des États-Unis.

D’abord, en concluant cet accord à la hâte, à quelques jours seulement de la date ultimatum de validation imposée par Trump, la présidente de la Commission laisse un délai dérisoire aux 27 États membres pour se prononcer. Et, comble du comble, ce sont les ambassadeurs des Etats membres auprès de l’UE, même pas des ministres, qui doivent l’adopter (ou le rejeter). Le silence d’Emmanuel Macron participe de cette humiliation et est assourdissant, surtout si l’on compare à la virulence courageuse de la réaction du démocrate-chrétien et très européen François Bayrou.

Où est la souveraineté des peuples ? Où est le débat démocratique ? Il faudrait, au contraire, rouvrir un round de négociations, tant les enjeux sont stratégiques pour les économies européennes déjà fragilisées.

Que dire de cette méthode ? Certes, les traités donnent à la Commission le monopole de la négociation commerciale. Mais face à Trump, ce n’est pas une technocrate bruxelloise qu’il faut envoyer. C’est un quatuor de chefs d’État, représentant les économies les plus puissantes de l’Union, qui doit rencontrer Trump : l’Allemagne, la France, l’Italie, la Pologne. Car Trump méprise les institutions et les diplomates. Il ne parle qu’à ceux qu’il considère comme ses égaux, à ceux qui ont un mandat populaire. Et Madame von der Leyen, élue par personne, incarne tout ce que les Américains (et de plus en plus d’Européens) détestent dans l’Union européenne : une entité technocratique, faible, désincarnée, sans légitimité directe.

L’Union européenne est pourtant le premier marché du monde. Sa balance commerciale avec les États-Unis est largement excédentaire. Mais une fois de plus, face au géant américain, l’UE se comporte comme un nain politique. Et ce n’est pas la première fois.

Ce fiasco diplomatique est du pain bénit pour les souverainistes, les patriotes, les frexiteurs, Dexiteurs, Bruxiteurs et autres excités er exciteurs de la sortie de l’Union. Ceux qui dénoncent depuis des années l’atlantisme aveugle, la soumission bruxelloise, le déficit démocratique, doivent se frotter les mains.

Pire, cet accord de la honte aura pour conséquence l’alimentation directe du complotisme. Les frexiteurs patentés – Philippot, Asselineau et consorts – sont passés maîtres dans l’art de faire feu de tout bois pour nourrir leur délire narratif : la France asservie, le peuple trahi, l’Europe comme matrice d’un grand complot mondial. Ils l’ont fait avec le Covid, avec la guerre en Ukraine, et ils le feront demain avec cet accord commercial. Chaque décision opaque, chaque négociation menée dans le dos des peuples est un carburant de plus dans leur machine à soupçons. Plus qu’un désamour de l’Europe, c’est un rejet irrationnel de la démocratie qui s’installe, un virus de la défiance totale. En signant un accord dans le dos des nations, Ursula von der Leyen ne fait pas seulement une faute politique : elle jette de l’huile sur le feu du conspirationnisme qui ronge nos sociétés.

Il est urgent de rebâtir l’Union en revenant à ses principes fondateurs. Et pour l’heure, il reste quelques heures aux dirigeants européens pour reprendre la main. Pour dire à Trump : « Hello bonhomme, on va rediscuter, car une guerre commerciale avec l’Europe vous coûtera autant, sinon plus, qu’à nous ».

Faute de quoi, ce ne sera pas seulement un accord injuste. Ce sera un pas de plus vers le divorce entre les peuples européens et l’Union européenne.

 

Michel Taube

Directeur de la publication