Opinion Paris 2024
07H47 - jeudi 16 mai 2024

L’Ex-Yougoslavie, mère de sept petits trésors – Tour du monde des délégations olympiques #7

 

La judoka Distria Krasniqi, couronnée à Tokyo, en lice pour le doublé à Paris 2024.

Ils défileront tous à Paris, fièrement, ambitieux et craints : la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, le Kosovo, la Macédoine du Nord, le Monténégro, la Serbie et la Slovénie.

De 1918 jusqu’à 1988, ils formaient une seule et même famille, la Yougoslavie.
70 années de Jeux Olympiques, de championnats du monde et d’Europe pendant lesquels cette mosaïque créative triomphait avec panache, notamment dans les sports collectifs. Garçons et filles collectionnaient les médailles en basket, volleyball, handball, football et water-polo. Les sports individuels comme la gymnastique, l’athlétisme, l’aviron permirent également à ce regroupement de nations issues des empires Austro-Hongrois et Ottoman d’afficher un bilan de 87 médailles olympiques.

La Yougoslavie se déchire en 1992. Engagée dans plusieurs disciplines aux Jeux de Barcelone elle doit déclarer forfait.

Les amoureux du sport pleurent alors ce pays inspirant, faiseur de champions et de tactiques inimitables. Que vont-ils devenir ?

La réponse arrive dès Atlanta en 1996. La Croatie devient Championne olympique de handball. Dans tous les sports collectifs, les six pays indépendants (le Kosovo ne le sera qu’après) rayonnent. Les footballeurs croates, les volleyeuses serbes, les basketteurs slovènes, les handballeuses monténégrines, s’imposent sur la scène internationale. Un vrai miracle ! Les championnats d’Europe rassemblent régulièrement, dans leurs phases finales, au moins 5 nations de l’ex-Yougoslavie !

Aujourd’hui, leurs athlètes occupent le rang de stars et devraient briller à Paris, cet été.

Le cycliste slovène, Tadej Pogacar aura peut-être gagné auparavant un 3ème Tour de France. Le tennisman Novak Djokovic tentera le feu d’artifice final de sa carrière de meilleur joueur de l’histoire, gagner enfin l’or pour sa Serbie. La judoka kosovare Majlinda Kelmendi, première championne olympique de l’histoire de son pays en 2016, observera sa successeure Distria Krasniqi, couronnée à Tokyo, en lice pour le doublé. Les frères croates Sinkovic viseront une troisième médaille d’or pour s’installer un peu plus dans la légende de l’aviron. Le Monténégro voudra s’offrir une première médaille d’or olympique grâce à son équipe masculine de water-polo. Ainsi vont les enfants de la Yougoslavie.

Le cycliste slovène Tadej Pogacar, vainqueur du Tour de France en 2020 et 2021.

Un seul cauchemar toutefois rappelle les heures sombres des guerres d’indépendances des années 90. La Serbie ne reconnaît toujours pas le Kosovo dont les athlètes ne cessent de défier l’honneur par des gestes politiques. Une finale électrique serbo-kosovare pourrait se produire en judo. Cette confrontation est par exemple interdite en foot et oblige les instances internationales à adapter leurs tirages au sort. Espérons alors que les combattants judokas se souviendront qu’un jour, leurs parents ont brillé ensemble, sous les anneaux olympiques. C’était la Yougoslavie.

Frédéric Brindelle
Journaliste, chef de rubrique « Opinion Paris 2024 »