Edito
06H00 - jeudi 20 avril 2023

Emmanuel Macron tiendra-t-il 100 jours ? L’édito de Michel Taube

 

Source : Elysée

Emmanuel Macron tiendra-t-il 100 jours ? Ou finira-t-il tel Napoléon à Waterloo puis à son embarquement vers Saint-Hélène ?

Certes, hier à Sélestat, ils n’étaient que quelques centaines à le huer et quelques dizaines à entonner un concert de casseroles. Ils n’étaient même que quelques-uns à l’interrompre à La Haye la semaine dernière.

Manifestement le petit jeu du chat et de la souris va se poursuivre dans les prochaines semaines : le chef de l’État continuera d’aller au devant des Français sous une musique d’ambiance peu mélodique à laquelle il finira par s’habituer. Tant que ces huées ne tournent pas à la violence ou à des émeutes, il et on s’y feront.

Certes, Emmanuel Macron a la légitimité institutionnelle de rester au pouvoir pendant quatre ans et de préparer tranquillement sa sortie en faisant semblant de gouverner le pays mais en se contentant, en fait, de gérer les affaires courantes et de s’emmurer peu à peu sous les dorures et le confort de l’Elysée.

Mais ne disposant plus de majorité parlementaire, désormais Emmanuel Macron n’est plus le maître des horloges. Pire, le chef de l’État crée lui-même les conditions de son infortune politique.

Car l’hôte de l’Elysée a manifestement un problème avec le temps qui passe. Lundi 17 avril, en quelques minutes d’allocution aux Français, le président de la République a multiplié les promesses et dressé des perpectives littéralement illusoires en annonçant des délais ou des échéances insolentes tellement elles sont impossibles à tenir.

Car dans cent jours, et contrairement à ses paroles qu’il prend trop souvent pour des actes déjà appliqués, Emmanuel Macron n’aura pu tenir ses engagements de lundi.

Sur le plan politique, Elisabeth Borne n’aura pas trouvé de majorité parlementaire : refroidi par son échec sur les retraites, Eric Ciotti a par exemple définitivement écarté tout compromis sur la loi sur l’immigration qui restera donc repoussée aux calendes grecques. Le projet de révision constitutionnelle risque fort de rester au point mort auprès de Gérard Larcher en pleine campagne pour les élections sénatoriales de septembre.

Le dialogue social patinera encore et toujours, le MEDEF étant en pleine campagne pour l’élection du successeur de Geoffroy Roux de Bézieux prévue le 6 juillet. On le sait depuis hier, la CFDT sera en pleine passation des pouvoirs entre Laurent Berger et Marylise Léon.

Enfin, le Conseil national de la Refondation, – encore un grand mot plein d’histoire sacrifié par le manque de savoir-faire politique d’Emmanuel Macron – aura accouché de petites souris et se retirera sur la pointe des pieds.

Quant aux promesses du chef de l’État de régler les problèmes du quotidien, qu’il nous soit permis d’être en colère lorsque nous l’avons entendu dire ceci : « Il faut des résultats concrets et à court terme : d’ici la fin de cette année, 600 000 patients atteints de maladies chroniques qui n’ont pas de médecin traitant en disposeront et d’ici la fin de l’année prochaine nous devrons avoir désengorgé tous nos services d’urgence. ». C’est se moquer des Français que d’ignorer autant l’état déplorable du système de santé français, comme nous l’explique le directeur d’hôpital Mathis Viguier.

En comparant la France au chantier de rénovation de la cathédrale Notre-Dame, dont le président de la République était fier lundi d’annoncer que le défi impossible des cinq ans sera relevé, s’est réveillée en nous la réflexion récurrente suivante…

Le chef de l’État a une pensée performative : lorsqu’il dit « fermez la porte », il pense que ce sont ses mots qui ferment la porte. Lorsqu’il dit « je vais réformer la France », il pense certainement très sincèrement que la réforme est déjà lancée et qu’elle va aboutir. Mais il oublie, – et en cela il n’a jamais été un politique -, que ce n’est alors que le début des emmerdes, qu’il va falloir gouverner les hommes pour les emmener là où il veut aller. Et cela, Emmanuel Macron, trop jeune lui et ses équipes, ne sait pas le faire.

Les cent jours n’abourtiront pas à Waterloo ni Saint-Hélène car la France a de la ressource et se tient très bien avec ou sans ses politiques.

En bon comédien communiquant, Emmanuel Macron aurait-il sorti l’idée des cent jours pour gagner du temps jusqu’au 14 juillet et les départs en vacances ? L’entretien télévisuel de la Fête Nationale, avec lequel il a renoué l’an passé, permettra aux journalistes qui l’intervieweront de lui rappeler les promesses du 17 avril…

 

Michel Taube

Directeur de la publication