La chronique de Daniel Aaron
08H53 - dimanche 19 février 2023

Fin de vie : Macron, écoutez votre cœur ! La chronique de Daniel Aaron

 

Hippocrate, l’industrie pharmaceutique et Dieu … face à la mort. La mort l’emporte toujours ! Toujours.

Alors, pourquoi s’acharner ?

Sur la fin de vie, les débats de la convention citoyenne s’achèvent.

En France, presque tout le monde est contre l’euthanasie.

L’Homme est cruel et absurde, en conscience. L”’Homme français” encore plus que l’”Homme belge” ou l’”Homme suisse”. Quelle honte !

Alors que s’achève la convention citoyenne sur la fin de vie, Macron va avoir cette responsabilité extraordinaire de trancher des questions existentielles mais, surtout, des questions de souffrance et de bienveillance.

Dans une époque où règne la “complexité” à l’extrême, l’Homme se déshumanise et oublie l’essentiel: l’amour.

Monsieur le Président, vous allez devoir redéfinir la place de l’euthanasie dans notre beau pays. Approcher cette question avec votre coeur et pas avec votre cerveau. Interrogez-vous sur le sens des souffrances abominables et de ce combat perdu qui consiste à “gagner” quelques temps misérables au prix d’une cruauté sans nom.

Je parle là de la fin de vie et de notre attitude incompréhensible face aux maladies dégénératives.

Nous avons tous eu des proches qui sont partis suite à une déchéance longue, affreuse et irrémédiable. J’en ai connu trois dont mon père et mon beau-père, la maman d’une bonne amie et j’ai observé à chaque fois l’insoutenable absurdité de l’acharnement thérapeutique. J’ai bien dit insoutenable. Ces mots sont faibles, il faudrait les crier, les hurler.

Vous avez déjà vécu ces situations ? Le plus dur dans ces moments, ce sont les regards des malades qui crient leur désespoir dans un silence assourdissant. Regards désespérés de celui qui ne peut plus parler, s’exprimer. Interrogation de l’aidant qui ne peut plus l’entendre.

Le malade et l’aidant souffrent donc ensemble impuissants. Finir sa vie ensemble dans une lutte inutile et cruelle est juste un gâchis. Bêtise, absurdité. Honte.

Ces maladies sont particulièrement funestes, elles rongent l’organisme de l’intérieur, nous rendent petit à petit incapable de tout, boire, manger, parler, de plaisir, de caresser ses proches, de bouger, de se laver … et enfin de respirer … le malade veut-il continuer à vivre ? Comprend-il pourquoi on prolonge ses souffrances psychologiques et physiques ? Se demande-t -il pourquoi on lui inflige cela ? Culpabilise-t-il ? A-t-il mérité ses souffrances ? Les questions et les réponses doivent être un véritable calvaire.

Alors, l’Homme dans son génie absolu, sa conscience de participer à une civilisation supérieure, va tout faire pour prolonger le spectacle. Alors qu’il faudrait l’arrêter, non, nous faisons le contraire, on se bat à coup de médicaments, de sciences, de palliatifs comme si cela changeait l’issue fatale.

Mais au fait, pourquoi cet acharnement ? pourquoi laisser souffrir si longtemps ? Et pourquoi jouer avec l’inéluctable en administrant des médicaments à tour de bras pour reculer une issue connue et certaine.

Les raisons sont multiples.

D’abord les médecins qui ont oublié leur serment d’Hippocrate qui dit « Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans discrimination ». Quelle blague ! Qu’ils l’appliquent alors : respect, autonomie et volonté ? Ces mots sont inexistants dans ce dernier combat.

Puis le lobby surpuissant des industries pharmaceutiques et des instances médicales qui tirent des profits monstrueux de ces maladies dégénératives. Médicaments, nuits d’hôpital, soins … la cruauté rapporte gros. Et croyez-moi, en personne très cartésienne, il doit bien y avoir une raison économique à cette monstruosité.

Notre rapport à la mort ensuite.

Nous avons peur de la mort, une peur illogique alors qu’elle est normale, qu’elle fait partie de notre existence. On la côtoie tout le temps, on sait tous que nous allons partir. J’imagine que d’autres civilisations l’ont mieux accepté. Dans l’absolue, la mort devrait être une fête pour célébrer le passage dans l’au-delà. Lorsque la maladie est inéluctable, nous devrions être pressé que les souffrances s’arrêtent. Nous devrions secourir la personne et non pas l’enfoncer encore plus loin dans les abymes. La mort est alors une délivrance et nous devrions la fêter. Ces mots sont choquants ? Mais non, ils sont humains, profondément humains.

Enfin, il y a Dieu !

Attention, plutôt, “Dieu et ce que les Hommes en ont fait”.

L’Homme se doit de tout savoir et ne sachant pas pourquoi nous sommes là, d’où nous venons et où nous allons, nous avons inventé un concept pour compenser notre ignorance.

Devant notre ignorance, nous avons besoin de croyance et les Dieux sont apparus pour combler un vide et nous permettre de dire : « Je sais ». Chouette !

Jusque là, tout va bien.

Ces croyances sont probablement bénéfiques mais elles nous rendent aussi lâche. Elles nous abritent derrière des dogmes édictés par des savants (autorités religieuses) et nous déresponsabilisent complètement.

Ainsi, Dieu aurait dit « Tu ne tueras point », donc, tu la fermes, tu souffres et surtout, tu ne décideras pas à ma place de l’heure de fin. C’est pratique en fait, pas besoin de débrancher soi-même. Lâche, je disais.

Et bien, dans mon infini prétention, devant les infinies souffrances des personnes en fin de vie, de leurs aidants, j’affirme que DIEU NE COMPREND PAS CET ACHARNEMENT.

Si Dieu existe, si un malade est touché par une maladie dégénérative, c’est que Dieu l’a décidé. C’est qu’il le rappelle à lui, que sa place au Paradis est prête. Que Dieu l’attend dans son infini miséricorde.

Alors, comment se permettre de le faire attendre ? Comment oser torturer celui qui est attendu là-haut ? Il y a un non-sens total et les croyants devraient revoir leurs préceptes religieux.

Enfin, les miracles – que nous espérons tous lorsqu’un proche est atteint de ce type de maladie – n’arrivent jamais. Avez-vous déjà vu un malade du parkinson en phase terminale se remettre sur pieds et retrouver ses fonctions vitales ? 

Dieu est miséricordieux mais comment peut-il pardonner à l’Homme sa cruauté ?

Alors, la solution ?

Elle est tellement simple que cela rend les Hommes risibles.

La solution, c’est l’Euthanasie. C’est de pouvoir choisir d’être digne jusqu’à la fin. C’est de s’inspirer de la Suisse et de la Belgique qui ont mis en place des protocoles extrêmement intelligents et humains.

Devant tellement de cruauté, la loi française, pays souvent modèle sur les questions sociétales, devrait inverser l’ordre des choses: l’euthanasie doit être la règle et l’acharnement l’exception.

Pour ma part, il est hors de question que je vive cela, mais hors de question ! Hors de question que j’inflige tant de souffrances à mes proches. Pourquoi l’accepterais-je ? Ne sommes-nous pas dans une culture civilisée où les droits fondamentaux n’ont jamais été aussi grands ?

Le plus dingue dans l’histoire, c’est que chaque personne accompagnée dans l’euthanasie, est une personne sauvée ! Sauvée de sa souffrance.

Quelle ironie.

Monsieur le Président Macron, vous êtes très jeune !

Avec l’âge avançant, vos proches s’en vont les uns après les autres et de plus en plus pour des maladies dégénératives. Pensez à tous ceux que vous allez voir souffrir et que vous serez, comme tout mortel, face à votre impuissance de Président.

Monsieur le Président, écoutez votre cœur.

 

Daniel Aaron