Edito
21H03 - vendredi 6 janvier 2023

« Femme Vie Liberté » en Iran : la France et l’Union Européenne doivent sanctionner la République islamique. L’édito de Michel Taube

 

Crédits : Union Européenne

Edito paru le 19 octobre 2022

Depuis l’assassinat le 16 septembre 2022 de Mahsa Amini par la police des moeurs, le peuple iranien s’est soulevé. C’est une révolution !

Réunis à Bruxelles ce jeudi 20 octobre, les 27 chefs d’Etat et de gouvernements de l’Union Européenne ont l’opportunité de prendre des mesures très fermes et immédiates contre la République islamique. Déjà le 6 octobre, lors du Sommet de Prague qui avait jeté les bases d’une (pseudo, il faut bien le dire) Communauté Politique Européenne, le silence sur l’Iran avait été assourdissant. De même, il y a une semaine, alors que le mouvement de protestation s’était déjà transformé en début de révolution, Emmanuel Macron, dans l’émission « l’événement » sur France 2, s’était contenté de témoigner de sa solidarité, de son admiration avec les femmes iraniennes. Un non événement !

Car l’heure n’est plus à se contenter de “condamner l’usage généralisé et disproportionné de la force contre des manifestants pacifiques”, comme viennent de le faire lundi 17 octobre les ministres des affaires étrangères de l’Union européenne. Saluer le courage des femmes et des citoyens iraniens, condamner moralement les arrestations arbitraires, les disparitions forcées, les actes de torture, les coupures des communications que subissent les manifestants de la part d’un régime prêt à tout pour rester en place ne suffisent plus.

A-t-on vraiment compris ce qui se joue ? Sous le mot d’ordre “Femme, vie, liberté”, les femmes, les jeunes, les étudiants, leurs parents et tout un peuple, en Iran et dans ses diasporas dans le monde, ont, en quelques jours, brisé les chaînes de la peur, de la censure et de la terreur dans lesquelles le régime des mollahs et de leurs affidés (entre autres le Corps des Gardiens de la révolution islamique) les enfermaient depuis 44 ans.

Des millions d’Iraniens ont jeté le voile qui les enfermaient comme dans une prison, des millions d’Iraniens sont sortis de leur silence et crient haut er fort leur hostilité au régime. Ils ne pourront revenir en arrière.

Mais y a urgence absolue à soutenir cette révolution car le régime des mollahs compte bien jouer la montre pour épuiser les manifestants et réprimer très durement ce mouvement de la liberté.

C’est pourquoi les sanctions prises par les ministres des affaires étrangères de l’Union européenne ce lundi 17 octobre 2022 sont scandaleusement timorées et légères au regard de la gravité de la situation : geler les avoirs et frapper d’interdiction de séjour en Europe seulement 11 personnes et quatre entités iraniennes, dont la police des mœurs du pays, les forces de l’ordre et le ministre des technologies de l’information et de la communication du pays, c’est feindre d’ignorer ce qui se passe en Iran.

Si le peuple iranien veut la chute du régime islamique des mollahs, et il le veut massivement, eh bien le rôle de la France et de l’Union européenne est de prendre clairement parti pour le premier en prenant des sanctions efficaces. 

Le Canada a montré la voie en interdisant de territoire plus de 10 000 officiers et hauts gradés du régime et en les frappant de lourdes mesures financières et immobilières.

Dans le même mouvement, l’Union européenne pourrait prendre plusieurs mesures politiques, économiques et au retentissement symbolique le plus puissant :

  • exiger la libération immédiate des dizaines de binationaux irano-européens, dont cinq Français, actuellement emprisonnés par le régime, et bien entendu  tous les manifestants arrêtés et qui comportent de nombreux mineurs, des journalistes, des photojournalistes, des internautes, des universitaires… ;
  • convoquer tous les ambassadeurs iraniens en poste dans les 27 capitales du vieux continent et annoncer la rupture des relations diplomatiques avec l’Iran sous un mois si le régime n’autorise pas le pluralisme politique et cesse toute violence contre le peuple,
  • suspendre sine die les discussions sur le nucléaire iranien,
  • interdire de séjour, fermer les comptes bancaires personnels et saisir tous les biens immobiliers des dirigeants, des parlementaires, des membres de toutes les institutions religieuses, régaliennes et politiques iraniens, de leurs familles et de leurs enfants en Europe, ce qui représente plus de 20.000 personnes ;
  • Demander des enquêtes sur les crimes du président de la République islamique Ebrahim Raisi, du “Guide” Ali Khamenei et de son cercle rapproché connu sous le nom de « Beit-e-Rahbari » à la Cour internationale de Justice et à la Cour pénale internationale ;
  • appeler la FIFA et toutes les Fédérations nationales à protéger les joueurs de l’équipe nationale qui joueront la Coupe du monde de football au Qatar ; ils ont osé soutenir publiquement les femmes iraniennes sur les terrains des matchs, se mettant en grand danger, d’autant que les Gardiens de la Révolution dirigent les instances sportives nationales ;
  • suspendre l’Iran d’ONU femmes.

La révolution des Iraniens, c’est aussi la nôtre : doit-on rappeler que cette chute profitera aux femmes iraniennnes comme à tous les peuples du monde qui subissent de multiples soumissions à la charia, les fatwas, les condamnations à mort (c’est le régime de l’ayatollah Khomeyni qui a appelé à l’assassinat de l’écrivain Salman Rushdie), les actes terroristes commis en Europe notamment et financés par l’Iran, sans parler du Hezbollah au Liban et du Hamas à Gaza qui ont islamisé et radicalisé des populations entières.

Doit-on rappeler que l’introduction du pluralisme politique et la chute de ce régime oppressif permettront de lever les sanctions sur l’Iran et de relancer les échanges économiques, au grand bénéfice non seulement du peuple iranien mais aussi des entreprises françaises et européennes.

L’Union Européenne a été courageuse dès l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Le peuple iranien mérite la même solidarité.

A Bruxelles ce jeudi, les 27 dirigeants de l’Union Européenne ont rendez-vous avec l’histoire.

 

Michel Taube