La chronique de Patrick Pilcer
09H19 - vendredi 5 février 2021

Bitcoin, il est temps de siffler la fin de la récréation ! La chronique de Patrick Pilcer

 

Quand votre électricien et votre chauffeur de taxi vous disent qu’il faut investir sur le Bitcoin et que son cours va atteindre le zénith, dites-vous qu’il est temps de vendre et que la bulle va éclater tôt ou tard.

Les crypto-currencies sont des monnaies parallèles qui reposent sur la technologie innovante de la blockchain, le Bitcoin en est la plus populaire. Mais contrairement aux monnaies classiques des Etats, ces devises ne reposent sur aucune économie, sur aucune richesse, aucune réserve d’or et ne dépendent que des flux acheteurs et vendeurs. Autrement dit, s’il y a une illusion collective, illusion qui entraîne un flux acheteur, le cours du bitcoin peut s’envoler sans limite. Inversement, s’il y a une rumeur de bug informatique, de panne, ou de réglementation plus forte, le flux des ordres de vente ne trouvera plus d’acheteurs et le cours s’effondrera rapidement. 

Force est aussi de constater que le bitcoin a servi et sert comme moyen de transactions à de nombreuses activités frauduleuses ou mafieuses. Les maîtres chanteurs au piratage informatique par exemple, les ransomware ou rançongiciels en bon français, qui ne sont autre que des extorsions de fonds ou des prises d’otages de données, utilisent les bitcoins pour se faire payer. Sur les sites mafieux comme silkroad, la devise en vigueur est ce bitcoin. Il se dit aussi, mais il est par nature difficile de prouver cela, que les réseaux mafieux, trafiquants d’armes, trafiquants d’êtres humains, terroristes en tout genre, utilisent ce bitcoin pour être sous les radars de la surveillance des Etats. 

Peut-on en conséquence laisser faire et ne pas réglementer ce bitcoin ? Bien sûr que non, ne pas le faire est à présent mettre en danger les épargnants qui se laissent berner par cette illusion quasi-collective. Je ne parle même pas des dégâts environnementaux ; le bitcoin utilise 0,25% de la consommation d’énergie mondiale, nécessite des millions cartes graphiques fabriquées à partir de métaux rares ; si son utilisation augmente, cela créera une pénurie sur ces terres rares et ces cartes graphiques et une hausse du coût de l’énergie, et de ses conséquences environnementales. 

Mais surtout, comment nos états peuvent laisser des bandes organisées utiliser ce moyen de paiement sans risque d’être tracées et repérées? D’un côté, on oblige toutes les banques à des protocoles drastiques contre le blanchiment d’argent, et de l’autre, on laisserait les échanges en bitcoin complètement sans surveillance. On empêche, à juste titre, le Hezbollah et ISIS d’utiliser nos banques, mais on les laisserait utiliser les bitcoins ? On impose au moindre épargnant de remplir des dizaines de papier à la moindre ouverture de compte ou de virement international, sans parler du dépôt d’espèces, mais on n’imposerait absolument rien si le trafiquant en héroïne ou en armes se fait payer en bitcoin à l’intérieur de nos frontières. 

Cela ne peut durer. Il est temps de légiférer fermement et imposer la levée de l’anonymat sur les transactions en bitcoin (nous l’avons bien fait sur l’or) et de siffler la fin de la récréation. Cela permettra de contrer les mafias et bandes terroristes tout en protégeant les épargnants. 

L’heure en finance est à l’ISR, l’investissement socialement responsable, aux critères ESG, environnementaux sociétaux et de gouvernance. Le bitcoin ne semble pas vraiment ISR ni respecter les critères ESG… Comment d’un côté empêcher les fonds d’investissement ISR d’investir dans les sociétés pétrolières ou les fabricants d’avions de chasse, et,  de l’autre côté, les laisser monter des ETF qui trackent l’évolution du Bitcoin et proposer à la veuve de Carpentras de mettre une partie de ses économies dans cette pseudo-devise ? Certains spéculateurs préfèreront toujours jeter un voile pudique sur leur éthique et se laisser tenter par l’appât du gain. D’autres aident bien le blanchiment d’argent. Je préfère largement investir dans Total (dont les bénéfices lui permettent d’injecter des capitaux dans l’énergie verte) ou Dassault (dont les Rafales participent à notre sécurité) que dans un ETF Bitcoin ! un peu de bon sens là encore…

Alors réglementons enfin ce bitcoin, levons l’anonymat sur les transactions et protégeons nos épargnants avant que cette bulle n’éclate ! Lorsque votre électricien et votre chauffeur de taxi vous vanteront les mérites du bitcoin, dites-leur d’investir plutôt dans les fonds propres de belles sociétés.

 

Patrick Pilcer

Conseil et Expert sur les Marchés Financiers

 

 

 

 

 

 

 

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