Le Liban tombe en cendres.
Comme si la grave crise économique que le Liban traverse actuellement – le gouvernement ayant décrété l’état d’urgence économique début octobre – ne suffisait pas. Comme si la crise sociale et politique, avec des milliers de Libanais se rassemblant régulièrement pour dénoncer l’incurie des autorités ne suffisait pas non plus.
Maintenant, le pays brûle. En 24h seulement, le Liban brûle sous 104 foyers de feu – si l’on croit les données fournies par le ministère de l’Intérieur. Une situation inédite depuis des décennies.
Les raisons ? Sûrement le retour d’un temps chaud et sec, accompagné de rafales de vent, qui a favorisé la naissance et la propagation de ces foyers. Ensuite, la présence de mines posées durant la guerre civile, qui explosent sous l’effet de la chaleur et alimentent ainsi les incendies. Enfin, pour Raymond Khattar, le directeur général de la Défense civile libanaise, la piste criminelle n’est pas à exclure : « le feu qui se déclenche à une heure du matin pose des points d’interrogations ».
Cet incendie auquel il fait référence est celui qui s’est déclaré dans la nuit de dimanche à lundi dans une forêt à Mechref, dans le Chouf (région administrative du Mont-Liban). Le feu a détruit de vastes étendues de forêt et de maquis et est arrivé, soutenu par le vent, près des habitations, de l’Université Rafic Hariri et de l’école du Carmel Saint-Joseph où les élèves ont été évacués.
Selon le quotidien libanais francophone L’Orient – Le Jour, des dizaines de militaires et de volontaires de la Défense civile ont été déployés dans le secteur, ainsi que des unités de pompiers de Beyrouth et de Saïda (district du Gouvernorat du Sud-Liban) et une équipe de la municipalité de Mechref, accompagnée d’un hélicoptère de l’armée. Toutefois, la présence des câbles de haute tension a empêché l’appareil d’intervenir efficacement.
Ainsi les feux peinent encore à être maîtrisés. Le besoin en bombardiers d’eau s’est fait ressentir. Problème : si le Liban possède deux canadairs, il ne les a pas encore déployés. Selon la ministre de l’Intérieur Raya el-Hassan, les canadairs « se sont avérés incompatibles et n’ont pas reçu la maintenance nécessaire en raison des coûts élevés ». Cela pose donc le problème de la défaillance des services publics libanais.
Le Liban a donc fait appel à Chypre, située à 264 km, pour l’aider à maîtriser l’incendie. Deux canadairs chypriotes y ont répondu et sont arrivés au Liban avant hier.
La réaction des autorités libanaises, jugée insuffisante par la société civile, a été dénoncée sur les réseaux sociaux, créant ainsi un fossé supplémentaire entre les dirigeants et la population libanaise…
Un internaute écrivait sur twitter : « Dans tous les autres pays, le président aurait déclaré l’état d’urgence pour combattre les incendies. Le premier ministre se serait déplacé pour assister aux opérations. Les ministres concernés seraient en train d’aider avec leurs propres mains. Uniquement au Liban, les personnes brûlent vivantes alors que les dirigeants restent endormis. »
In any other nation, the president would declare state of emergency for fighting wildfires. Prime Minister would be on the ground observing operations. Responsible Ministers would be helping with their own hands. Only in #Lebanon do people burn alive while leaders remain asleep.
— Khaled Abdul Jawad (@KhaledAJ) October 15, 2019
Il est encore difficile de savoir quand les feux seront contrôlés ni si, et comment, celui que l’on appelle aussi le Phénix, à savoir le Liban (en référence à sa résilience suite aux nombreuses guerres qu’il a connues), renaîtra de ses cendres…
Sofia Farhat