Politique
15H15 - mardi 16 janvier 2018

Soft power cherche désespérément crowdfunding : le gouvernement fera-t-il appel aux Business Angels pour financer les lycées français à l’étranger ? Tribune d’Olivier Jouis

 

Alors que le président Macron ne manque pas une occasion de célébrer l’attractivité de la France dans chacun de ses déplacements à l’étranger, l’Assemblée Nationale vient de confirmer la diminution du budget des lycées français à l’étranger.

Rattachée au Ministère des Affaires Etrangères, l’AEFE (Agence pour l’Enseignement Français à l’Etranger) coordonne un réseau unique au monde de plus de 500 écoles et lycées français dans 137 pays. Dans les capitales, le lycée français a très souvent le statut de pôle académique de référence. C’est un atout diplomatique qui constitue un puissant levier d’influence pour la France.

Et pourtant, l’Etat a décidé de couper les ailes de l’agence en amputant sa participation de 33 millions, soit 10% du budget de fonctionnement, dans le budget voté par le Parlement en décembre dernier.

Pour les Français de l’étranger, cette nouvelle surprenante a la saveur d’une couleuvre bien indigeste à avaler alors qu’eux même assurent déjà 80% du financement des établissements en payant des frais de scolarité élevés, et donc aux antipodes de la gratuité qui prévaut en métropole. Les conséquences de ce coup de rabot brutal sont catastrophiques pour certaines familles d’expatriés qui devront très probablement renoncer à leur rêve d’école laïque et républicaine pour leurs propres enfants. Pour les écoles et les lycées, c’est la baisse de la qualité qui se profile : ils devront équilibrer leurs finances en renonçant à accueillir des enseignants détachés de l’Education Nationale et en privilégiant le recrutement de vacataires locaux, par forcément au fait des subtilités du « moule républicain » voulu par Jules Ferry.

A l’occasion du déplacement du président de la République au Qatar, le 7 décembre dernier, l’ADFE-Français du Monde* a interpellé le chef de l’Etat sur la logique de cette diminution de moyens. Alors que, lors de sa conférence de presse donnée quelques heures auparavant, Emmanuel Macron louait la décision de l’émir du Qatar, de scolariser ses propres enfants au lycée Voltaire de Doha, l’ADFE a souligné le manque de cohérence entre la célébration de l’excellence des lycées français à l’étranger et la volonté d’imposer une coupe budgétaire brutale à cet outil essentiel de l’attractivité de notre pays.

En réponse, le chef de l’Etat a exprimé le souhait que « les entreprises françaises contribuent plus à leur financement ». On peut admettre que les grandes entreprises françaises, qui paient les frais de scolarité des enfants de leurs expatriés, n’auront pas d’autre choix que de « remettre au pot ». De même que l’élite du pays d’accueil aura les moyens d’assumer une augmentation des frais. En revanche, pour les parents sous contrat local, pour les entrepreneurs ou pour les nombreux binationaux, l’effort financier, entièrement assumé par les familles, deviendra rapidement insupportable. Vu depuis l’étranger, c’est un coup de canif dans le contrat républicain : seuls les enfants des cadres expatriés par de grandes entreprises auront désormais un accès privilégié aux écoles et lycées français.

Pourquoi ce coup de rabot est vécu comme un drame parmi nos concitoyens expatriés

La réponse du président de la République révèle une méconnaissance profonde de la sociologie des Français de l’étranger : la très grande majorité ne sont pas des exilés fiscaux ou des salariés surpayés et cajolés par des grands groupes (et ces mêmes grands groupes n’ont pas une présence mondiale, dans chacun des pays qui accueillent des expatriés français). Bon nombre des Français de l’étranger vivent dans des conditions modestes…

Mais cette décision nourrit également un sentiment d’abandon parmi nos corrélégionnaires expatriés car elle est aussi la conséquence de l’apathie et de l’impuissance des députés des Français de l’étranger à exister au sein du Parlement et plus particulièrement de la majorité, alors qu’eux-même représentent 2 millions de nos concitoyens expatriés, soit l’équivalent de la population de la ville de Paris.

Enfin, elle traduit surtout une vision présidentielle très « vache à lait » et « startupienne » du rôle de nos entreprises à l’étranger : imagine-t-on le proviseur d’un lycée de La Mongie ou d’Amiens aller « pitcher » devant le Rotary club local pour payer ses professeurs ou organiser un crowdfunding pour ouvrir une classe de petite section ?

 

 

Olivier JOUIS

Expatrié dans le Golfe Persique et administrateur de Français du Monde – ADFE

* Français du monde-Adfe est une association reconnue d’utilité publique créée en 1980 sous le nom d’Association démocratique des Français à l’étranger, pour rassembler des ressortissants français établis hors de France.

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