Police(s)
21H49 - mercredi 25 mai 2016

Haine « anti-flics » : comment lutter ?

 

Le 18 mai dernier, des milliers de policiers ont manifesté dans la plupart des villes de France pour dénoncer la haine « anti-flics » dont ils se sentent victimes.

Crédit photo : Nerban del Burn, Wikimedia Commons

Crédit photo : Nerban del Burn, Wikimedia Commons

 

La manifestation parisienne des policiers à l’appel du syndicat Alliance, place de la République à Paris le 18 mai dernier, avait été minutieusement préparée et négociée. Il était impossible pour le quidam lambda de s’approcher à moins de 200 mètres de la place, entourée de barrières de sécurité et de plusieurs lignes de CRS ou de gendarmes mobiles, pour manifester son soutien aux policiers. « J’ai posé un RTT pour venir ici apporter mon soutien aux forces de l’ordre », explique Francis, un cadre parisien vivant dans le quartier. Il se plaint auprès des gendarmes qui bloquent l’accès à la place : « Vous ne pouvez pas passer, sauf si vous avez une carte de police », explique un sous-officier lourdement équipé. Ambiance tendue lorsqu’un parlementaire se présente et passe, lui, le barrage sans difficultés. « C’est dingue ça, on nous refuse l’accès mais pour Collard ou Ciotti, pas de problème, ils les accueillent presqu’à bras ouverts ! » se plaint encore Francis qui se résigne finalement à quitter les lieux. « Je suis franchement déçu, ce n’est pas comme ça qu’on va améliorer les relations entre la police et la population. » Un officier de gendarmerie mobile nous le confie : « Je comprends ce monsieur mais les ordres ont été donnés pour éviter que des perturbateurs viennent provoquer les policiers, des monsieur-tout-le-monde, nous en avons laissés passer pas mal ce matin et résultat ils sont en train de foutre le bordel ». En effet, sur le parvis, un groupe de 50 à 60 personnes a réussi à se rassembler au nez et à la barbe des policiers et scandent des slogans hostiles aux policiers. « La police assassine, la justice se tait », peut-on entendre.
Très vite, une ligne de CRS vient en renfort depuis le boulevard Magenta et prend en tenaille ce groupe le repoussant vers une rue qui mène au quai de Valmy. Le groupe finit par se disperser et tombe sur une voiture de police sur le quai. À l’intérieur deux gardiens de la paix de la compagnie de sécurité du périphérique de retour d’une mission. Ces fonctionnaires sont vite pris à partie par une quinzaine de casseurs venus de la place de République, moins de 300 mètres plus loin. Le conducteur reçoit un violent coup de poing avant de sortir de son véhicule et avec sang-froid faire face à un individu fou de haine qui tente de l’atteindre à coups de barre de fer. Sa collègue est extraite du véhicule par des témoins qui la mettent en sécurité. La voiture est en feu. La vidéo de cette scène qui a fait le tour des médias est choquante. Les deux policiers pris à partie, par ailleurs membres du syndicat SGP affilié à Force ouvrière, sont en état de choc. « Je ne comprends pas que les autorités n’aient pas diffusé un message général sur les ondes pour prévenir les équipages individuels d’éviter le secteur, nous explique Fabrice, policier de la Direction du renseignement de la préfecture de police, présent sur place. Ça aurait évité de se retrouver avec des collègues lynchés par la foule. » Sur l’esplanade l’information de l’attaque d’un équipage de police à proximité soulève la consternation. « La violence contre les policiers, on vit avec ça depuis des années, on compte dans nos rangs plus de 20 blessés par jour, on n’en peut plus », explique Sandra, une militante du syndicat Alliance et brigadier dans un commissariat du Val-de-Marne.
De son côté, Alexandre Langlois, gardien de la paix dans un service de renseignement territorial et secrétaire général de la CGT Police, qui compte un nombre non négligeable d’adhérents au sein des compagnies de CRS, est présent aussi place de la République. Un autre syndicat de la CGT avait produit il y a quelques semaines un tract dénonçant les violences policières. « Nous nous sommes désolidarisés de cette initiative », dit-il. Pour lui, « les collègues sont épuisés. Ils souffrent d’une perte de sens de leur métier. Aujourd’hui, on leur demande du rendement statistique et d’exécuter des ordres qu’ils jugent incompréhensibles ou injustes. La police est déshumanisée. On compte un suicide en moyenne par semaine dans notre profession. »
Le 4 mai dernier, dans un entretien qu’il donnait à nos confrères de L’Humanité, Alexandre Langlois déclarait : « À la CGT police, nous défendons l’idée d’une force publique à l’usage du peuple, celle de la déclaration des droits de l’homme de 1789, une force pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée ».

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Omri Ezrati