Iran
21H35 - lundi 3 mars 2014

Le grand photographe Kaveh Golestan exposé à Amsterdam : un regard tendre et réaliste sur l’Iran

 

On ne cessait jamais d’apprendre avec Kaveh Golestan. Photoreporter distingué, il avait une intarissable connaissance de l’Iran qu’il avait su révéler au travers d’une foule d’images qui communiquent instantanément la complexité de la réalité tout en gardant un regard curieux et un peu espiègle sur le monde.

Untitled 2 Prostitute Series 1975 1977 C Kaveh Golestan courtesy Kaveh Golestan Estate
Untitled 4 Prostitute Series 1975 1977 C Kaveh Golestan courtesy Kaveh Golestan Estate
Untitled 5 Prostitute Series 1975 1977 C Kaveh Golestan courtesy Kaveh Golestan Estate
Untitled 7 Prostitute Series 1975 1977 C Kaveh Golestan courtesy Kaveh Golestan Estate

 

Le jour où il est décédé en sautant sur une mine, il y a maintenant 11 ans, Kaveh a laissé un grand vide mais aussi un énorme héritage. Il était passé dans le Kurdistan Irakien pour tourner un reportage pour la BBC. Ayant couvert la guerre Iran-Iraq, c’était une région qu’il connaissait bien. Elle lui avait valu le prestigieux prix Capa Gold Medal pour sa « photographie superlative qui exige un courage exceptionnel ».

Mais Kaveh n’a pas seulement été un correspondant de guerre comme le confirme la collection de photos en noir et blanc sur les prostituées de Shahr-e-no (le quartier de la  prostitution à Téhéran) qui seront exposées à la galerie FOAM à Amsterdam à partir du 21 Mars. Les œuvres exposées datent des années 70, l’époque à laquelle Kaveh collaborait avec le journal Ayandegan et furent le résultat d’un travail de 2 ans. Ce sont de rares documents historiques qui font parti d’une enquête qui a pour sujet, outre la vie des prostituées, celles d’enfants abandonnés dans un institut psychiatrique et d’ouvriers saisonniers. Ils témoignent également de la remarquable sensibilité de l’auteur.

Une série de portraits touchants décrivent avec un réalisme cru la vie dans la Citadelle, un quartier au sud-ouest de Téhéran où seuls les hommes avaient accès et que les islamistes allaient réduire en cendres après la Révolution. Plusieurs d’entre elles moururent dans l’incendie, d’autres furent exécutées par le régime.

Des femmes de tous âges y sont représentées dans leur milieu de tous les jours entourées d’objets domestiques, une télévision, des casseroles défoncées, des galettes de pain plat. Elles sont perchées sur des tabourets en attente d’un client, l’air triste et vide mais pourvues d’une grâce manifeste malgré le décor misérable. Ce sont des photos qui ne jugent pas, qui racontent avec respect et chaleur un monde qui a depuis disparu.

Le résultat de ce travail fut brièvement présenté lors d’une exposition à l’université de Téhéran que les autorités avaient vite fait de censurer. On raconte que Kaveh avait par la suite collé des photocopies des portraits dans la rue pour qu’ils puissent être accessibles à tout le monde. Quelques temps après il trouva où exposer ses photos, une galerie privée fréquentée par la femme du Shah, Farah Diba. L’impératrice aurait commenté qu’il avait « un bien sombre regard sur la vie ». Lui, qui pourtant affichait toujours un sourire enjoué et aimable, avait comme but celui de témoigner « la vérité dans ses formes les plus pures » comme le rappelle son fils Mehrak.

« Recording the Truth » avait justement été le titre de l’émission sur l’état de la liberté de presse après la révolution qui avait marqué son passage en 1984 à la production vidéo et qui lui avait valu deux ans de résidence assignée.

C’était un esprit vif qui faisait don de son formidable expertise et d’une expérience de 30 ans sur le terrain en enseignant à l’université de Téhéran.  Il était toujours entouré de jeunes photographes et cinéastes auxquels il fournissait un soutien constant. Plus qu’un éducateur, il était un mentor, une figure d’inspiration qui encourageait ses jeunes collègues à explorer, à s’exprimer et à ne jamais renoncer.

 L’exposition 

The Citadel, du 21 mars au 4 mai, à la Gallerie FOAM – Amsterdam 

 

Journaliste italienne

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