L'avis des bêtes
10H34 - vendredi 31 mai 2013

Les violences vis-à-vis des animaux peuvent-elles conduire à maltraiter des enfants ?

 

Qui bat son chien, bat les siens. Cette phrase résume le colloque organisé en mars dernier à Aix-en-Provence par l’association Stop Violence : « l’animal, sentinelle de la violence faite à l’enfant ». Des intervenants issus de différentes disciplines – juristes, avocats, psychiatres, vétérinaires etc. – se sont interrogés sur les liens entre maltraitance animale et maltraitance infantile.

les violences domestiques, la maltraitance infantile et la maltraitance animale sont interconnectées, d'après Ascione et Arkow.

les violences domestiques, la maltraitance infantile et la maltraitance animale sont interconnectées, d’après Ascione et Arkow.

Au départ, il y a ce fait divers odieux : un petit garçon de 2 ans maltraité et tué par son beau-père, un maître-chien « qui voulait le dresser, comme il dressait ces chiens ». Le beau-père était connu pour être violent avec ses animaux. Cette violence ordinaire sur l’animal a t-elle dérivé jusqu’à la maltraitance de l’enfant ? L’animal peut-il être la sentinelle de la violence faite à l’enfant ?

Un lien reconnu par la littérature scientifique anglo-saxonne

Depuis de nombreuses années, la littérature anglo-saxonne reconnaît une corrélation entre la maltraitance des animaux et celle des enfants. Une étude portant sur 53 familles nord-américaines suivies par les services sociaux a ainsi montré que, dans 60% des cas, la maltraitance portait à la fois sur les enfants et les animaux du foyer. Une seconde étude a conclu qu’un enfant exposé à de la violence domestique a plus de risque de devenir lui même violent envers les animaux. Il a été démontré que la maltraitance animale est un facteur prédictif fort de maltraitance humaine. Si le lien entre maltraitance infantile et maltraitance animale paraît évident dans les sociétés anglo-saxonnes, il est encore sujet à discussion en France.

Une seule et même violence

Pourtant, les participants du colloque sont unanimes : enfants et animaux subissent le même type de violence. « Dans les deux cas, il s’agit d’êtres vivants soumis à la force et à la perversité des humains et c’est intolérable dans notre société » déclare le professeur Hubert Montagner, directeur de recherche à l’INSERM, qui rappelle que la perversité se définit comme la volonté de faire mal. Les blessures subies par les animaux et les enfants sont très similaires (fracture de côtes non expliquées, fractures du crane, hématomes…). Les agresseurs ont le même « profil » et trouvent les mêmes excuses pour se justifier. Pourrait-on alors prévenir les violences aux enfants en détectant celles faites aux animaux ?

La cruauté envers les animaux très peu sanctionnée

C’est en 1996 que la médecine vétérinaire envisage pour la première fois le diagnostic de maltraitance animale (et c’est en 1962 qu’un médecin évoque pour la première fois le diagnostic de maltraitance infantile, et les signes pour la détecter). A mesure que la compréhension du comportement et des émotions des animaux domestiques progresse, il est de plus en plus aisé de détecter les violences qu’ils subissent. La loi est claire : « Le fait, publiquement ou non, d’exercer des sévices graves, ou de nature sexuelle, ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30.000 euros d’amende ». Dans les faits, les sanctions prononcées par les tribunaux français sont bien moins sévères, surtout lorsqu’on les compare aux peines encourues en Grande-Bretagne ou au Canada. On ne peut que le déplorer, surtout à la lumière de ce colloque qui a montré cette « généralité de la violence » sur l’enfant et l’animal.

Bien sûr, tous les enfants maltraités ne deviennent pas des bourreaux de chiens, et un acte violent sur un chien n’est pas inexorablement suivi de maltraitance sur un enfant. Cependant, mieux détecter les violences faites aux animaux, et les punir, pourrait parfois empêcher l’escalade de la violence dans les familles.

L’enregistrement sonore de l’intégralité du colloque est disponible ici.

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