Edito
09H08 - jeudi 21 novembre 2024

SNCF : faut-il la privatiser ? L’édito de Michel Taube et Sofiane Dahmani

 

Faut-il privatiser les services publics ? Voilà où nous en sommes rendus lorsque l’on constate l’état de déliquescence avancée de certains de nos mammouths publics : hôpital, Education nationale… Concernant la SNCF, ce joyau de la République est pris en tenaille entre un Etat qui se sépare de bons gestionnaires (Jean-Pierre Farandou a commis le crime de lèse-majesté de redresser les comptes de l’entreprise) et des syndicats qui abusent de leur position dominante.

Chaque année, c’est la même histoire. À l’approche des fêtes de Noël, des millions de Français, prêts à rejoindre leurs familles, se retrouvent dans la crainte d’être pris en otage par les cheminots qui brandissent des menaces de grève. Cette année encore, en ce 21 novembre 2024, une grève oblige les Français à s’organiser comme ils peuvent, suivie d’une grève illimitée reconductible annoncée pour le 11 décembre, menaçant de perturber les trajets de Noël.

Mais derrière ce mouvement, les raisons invoquées par les syndicats semblent de moins en moins valables.

Les cheminots, traditionnellement perçus comme les défenseurs du service public, sont devenus les représentants d’un système archaïque qui, au lieu de servir les usagers, leur impose des grèves répétées. La grève de la SNCF n’est plus, aujourd’hui, le symbole d’une lutte pour de meilleures conditions de travail, mais celui d’un chantage exercé sur le pays. Les revendications, bien que légitimes au début, sont désormais une sorte de prétexte pour maintenir un confort réservé à une élite fonctionnarisée. Pendant que des millions de Français subissent les effets de ces grèves sur leur quotidien, les employés de la SNCF continuent de bénéficier de privilèges dont les autres travailleurs rêveraient. Entre une retraite avantageuse, des salaires relativement élevés, et des horaires de travail moins pénibles qu’auparavant, il est difficile de ne pas se demander si ce combat est toujours d’actualité.

Le terme de cheminot, historiquement connoté à un métier difficile et pénible, n’est plus adapté aux conducteurs de train : il est loin le temps des bleus de travail usés au charbon par les fumées de la locomotive.

En attendant que nos politiques aient le courage de voter une loi interdisant les grèves pendant les vacances scolaires et les jours fériés, conformément à la Constitution qui renvoie au législateur les conditions d’exercice de ce doit constitutionnel, ajoutons que l’injustice ne réside pas seulement dans l’attitude des syndicats. Elle se trouve dans la structure même de la SNCF. Pourquoi ces grèves récurrentes, qui paralysent le pays pendant des périodes de forte affluence, se produisent-elles dans une entreprise publique où l’État a un contrôle total ? Parce que cette entreprise est figée dans une logique de monopole public, où la rentabilité n’est pas une priorité. Il est grand temps de remettre en question ce système, où les usagers, les citoyens, deviennent des victimes collatérales de la guerre de pouvoir interne entre syndicats et direction. La solution ?

L’ouverture à la concurrence et la privatisation de la SNCF permettraient, d’une part, de briser ce monopole étouffant et, d’autre part, de créer une concurrence saine qui inciterait chaque acteur à offrir un service de qualité, à des prix compétitifs. En effet, dans un marché concurrentiel, chaque entreprise ferroviaire, privée ou publique, serait contrainte de répondre aux attentes des consommateurs. L’absence de véritable concurrence au sein du secteur ferroviaire, contrairement à d’autres secteurs comme l’aérien, laisse les usagers à la merci de ces grèves qui se multiplient à l’approche de chaque période de vacances, notamment Noël.

De plus, l’argument selon lequel les services ferroviaires doivent rester publics pour garantir l’égalité d’accès à tous les Français ne tient plus. La privatisation ne signifie pas la fin de l’accessibilité. Au contraire, l’introduction de nouveaux acteurs privés pourrait garantir une meilleure qualité de service, une réduction des coûts et des prix plus bas. L’exemple de nombreux autres pays européens montre que la privatisation du secteur ferroviaire permet non seulement de maintenir un service universel, mais aussi de l’améliorer considérablement.

La privatisation permettrait d’accélérer la modernisation du réseau ferroviaire, qui souffre d’un manque chronique d’investissements. Au lieu de dilapider des milliards d’euros dans un système inefficace et parfois archaïque, les investissements seraient mieux ciblés, orientés vers des infrastructures modernes, performantes et adaptées aux besoins des usagers.

Trenitalia, Kevin Speed, Renfe, Proxima, Le Train… Ces compagnies n’attendent que le feu vert pour offrir un service à la hauteur des attentes des Français.

Les grèves à répétition et le statut privilégié des cheminots ne sont plus acceptables. Il est temps de mettre fin à ce système obsolète et d’ouvrir le marché ferroviaire à la concurrence. Il ne s’agit plus d’une question idéologique, mais d’une question de bon sens. La France ne peut plus se permettre de vivre sous la menace d’une grève tous les ans, prenant en otage ceux qui, comme des millions de familles à l’occasion des fêtes de fin d’année entre autres, méritent un service public digne de ce nom, efficace et respectueux de leurs attentes, de leur expérience client.


Michel Taube et Sofiane Dahmani

Directeur de la publication

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