Edito
10H47 - vendredi 13 septembre 2024

Bruno Le Maire : un septennat et bien plus ? L’édito de Michel Taube

 

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Il part non sans avoir fait un tabac dans les jardins du ministère de l’Economie et des Finances à Bercy : Bruno Lemaire a prononcé hier un discours de remerciements à toute la communauté des fonctionnaires, des politiques, des décideurs, des influenceurs qui ont concouru à la politique économique de la France depuis sept ans.

Bruno Le Maire est un miracle : le même homme à la tête du ministère de l’économie des finances pendant un septennat ! On n’avait jamais vu cela.

 

Bruno Le Maire n’est pas Colbert, certes ! Mais restera-t-il comme un des meilleurs ministres de l’économie de la Ve République ? Ce n’est pas impossible, comme l’analyse François Perret dans sa tribune « Un septennat à Bercy : Bruno Le Maire, le ministre des épreuves et des réformes » parue hier à la Une de notre site Opinion Internationale.
Les années Le Maire furent des années de stabilité fiscale et de revalorisation du travail. Bruno Le Maire dans son intervention hier a salué « la France des entrepreneurs ». Il avait bien raison car ce sont les patrons du privé qui font tenir et vibrer l’économie française. Sera-t-il le bouc émissaire des dettes abyssales de la France ? Il s’en défend déjà.

Une chose est sûre : l’ancien élu normand aura été un des piliers de la macronie depuis l’accession à la Présidence de la République d’Emmanuel Macron en 2017. Cet homme de droite, ancien haut fonctionnaire, ancien bras droit de Dominique de Villepin, écrivain, aura tenu la barre de l’économie française malgré les errements fréquents du président de la République et les multiples épreuves que la France a connues pendant ces sept années de turbulences. Gilets jaunes, COVID, guerre, inflation, la France n’avait plus traversé de telles tempêtes depuis la Seconde Guerre mondiale.

Évidemment, Bruno Le Maire n’aura pas empêché, et de loin, la montée des extrêmes, laquelle n’est finalement le fruit que des effets sociaux massifs de ces crises à répétition. Certes, les aides de l’Etat ont amorti les chocs mais elles n’ont pas empêché la montée des inégalités, le sentiment de déclassement des Français des villes moyennes et des champs.

 

Quel gâchis !

Le départ précipité de Bruno Le Maire de Bercy, qui aurait pu tenir dix ans, est une des conséquences les plus fâcheuses de la dissolution subite et violente de l’Assemblée Nationale décidée par Emmanuel Macron au soir du 9 juin 2024.

D’ailleurs, la dernière crise majeure qu’ait connue la France, la dissolution, aura mis à terre notre économie, stoppant net les investissements et faisant perdre au moins un trimestre à notre économie, selon Patrick Martin, le président du MEDEF.

De quoi nourrir, avec la préparation du budget de rigueur pour 2025, les cauchemars du successeur du grand argentier de Bercy.

 

Car il reste tant à faire…

Sur la reconquête industrielle de la France, entamée lors de la prise de conscience de nos faiblesses structurelles avec la Covid, nous nous y sommes mis bien trop tard. Et c’est d’une souveraineté euro-française dont la France a évidemment besoin sur tous les chantiers d’avenir (numérique, climat, industrie militaire…).

La loi PACTE de 2019, à peine mentionnée dans son discours de Bercy, alors qu’elle constitue un des moments forts de son septennat, aurait dû être suivie de nouvelles ambitions pour convertir la France à une économie responsable.

Plus fondamentalement, il est dommage que le couple Macron – Le Maire n’ait pas totalement assumé dès 2017 trois gros mots français, pourtant fort appréciés dans les autres pays développés : libéralisme, responsabilité et souveraineté.

 

Une ambition

Dans son discours de remerciements, Bruno Le Maire ne s’est pas contenté, et de loin, de dresser un bilan. Il a dessiné quelques lignes directrices de ce qui pourrait s’apparenter à un projet politique pour 2027 et 2032.

« Redonner un espoir salarial à toutes celles et tous ceux qui travaillent » sera « la grande question sociale des 25 prochaines années », a confié Bruno Le Maire. Notre capacité à augmenter fortement la productivité du travail en sera la clé.

Deuxième ligne d’horizon, le climat et cette ambition française de devenir la première grande économie 0 émission en Europe d’ici 2040.

Troisième priorité pour l’avenir, le financement de notre économie et la recherche de financements privés en Europe pour faire face à la double révolution technologique et climatique.

Bruno Lemaire voudra-t-il incarner demain cette exception politique française dont la mesure et la raison constituent, selon ses dires, les moteurs et ce supplément d’âme qui font la grandeur de la France ?

Fera-t-il une alliance stratégique avec Gérald Darmanin pour, à eux deux, proposer en 2027 aux Français une offre politique crédible, régalienne et libérale, contre les héritiers du « en même temps » que sont des Gabriel Attal ou des Edouard Philippe ?

Le bal des ambitions n’a pas encore tout à fait commencé, mais il est à parier que Bruno le Maire ne restera pas silencieux longtemps ni réfugié dans les Alpes Suisses pour y enseigner l’économie et y écrire ses prochains romans.

Bruno Le Maire a fini son discours sur cette phrase d’Aristote : « Dans toute action, le bien c’est la fin, car c’est en vue de cette fin qu’on accomplit tout le reste. »

Mais la fin de Bruno Le Maire, ce n’était pas hier. Sera-ce 2027 ? Un animal politique ne meurt jamais.

Michel Taube

Directeur de la publication

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