La chronique de Jacques Soppelsa
07H36 - mercredi 30 août 2023

Parachever Erasmus dans l’esprit de la Magna Carta. La chronique de jacques Soppelsa

 

Il  y  a maintenant plus d’un tiers de siècle, à Bologne, le 18 Septembre 1988, dans la foulée de la mise en place du Programme Erasmus inspiré par notre regretté collègue Franck Biancheri, en 1987, avec notamment la collaboration des responsables de cinq des Universités européennes les plus prestigieuses, le Recteur de Bologne, (notre  Alma Mater), celui de Barcelone, le Chancelier d’Utrecht, le Président de Louvain et le signataire de ces lignes, es qualité de Président  de Paris Panthéon Sorbonne,  ces derniers rédigeaient la Magna Charta des Universités européennes.

Leur ambition : élargir précisément les objectifs du programme Erasmus tout en espérant contribuer ainsi à la consolidation de l’Union européenne elle même.

Le Programme ERASMUS (European Action Scheme for the Mobility of European Students) fut officiellement lancé, sous l’égide de François Mitterrand, convaincu notamment par ses promoteur (Sofia Corradi et Franck Biancheri) en 1987.

Ses ambitions : promouvoir des échanges d’étudiants  (et d’enseignants-chercheurs, ce qui est très souvent oublié) entre les  différentes Universités européennes.  Un Programme ultérieurement élargi à l’ensemble de la planète ( Erasmus Mundi, Erasmus +) .

A ses débuts, le progamme Erasmus recensait 11 Etats européens participants ( Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, France, Grèce, Irlande, Italie ,Pays Bas,  Portugal et Royaume Uni)) .Aujourd’hui, il concerne les 27 membres de l’UE (suite au  départ du Royaume Uni, les trois Etats membres de l’AELE (Norvège, Islande et Lichenstein, et trois candidats à l’entrée dans l’Union, la Macédoine du Nord, la Turquie et la Serbie.

Le nombre de bénéficiaires n’a  certes cessé de croître : 3200 étudiants en 1987,  80 000 en 1997, 160 000 en 2007,300 000 en 2017… le cap des 500 000 est franchi en 2020 .Soit quelques 11 millions depuis le lancement du programme.

Sans oublier les enseignants chercheurs : 10 000 en 1997, 15 000 en 2007, 30 000 en 2017, 35 000 en 2020

Tout est relatif : cela concerne moins de 5% des étudiants européens.…

Ce qui nous autorise à considérer que les Programmes Erasmus peuvent atteindre des objectifs plus ambitieux encore, contribuant à actualiser l’initiative « Magna Charta ».

Cette initiative avait en son temps suscité quelques commentaires sceptiques de la part de nombreux observateurs, réservés quant à l’éventuel succès du programme Erasmus et, a fortiori, à son élargissement.

Trente cinq ans plus tard, il peut paraitre utile, voire instructif, tant pour l’avenir du monde éducatif que pour la promotion d’une réelle intégration européenne, de rappeler  certains des grands principes affichés par ladite Charte, mais aussi de réfléchir, au risque de passer à nouveau pour de doux rêveurs, à la poursuite de l’élargissement sectoriel des programmes Erasmus.

Quant aux grands principes, les rédacteurs de la Charte rappelaient (ce qui peut paraitre des banalités, même si elles sont encore singulièrement bafoués par les faits), que « le monde universitaire  a pour mission fondamentale d’assurer aux nouvelles générations une formation  et une éducation susceptibles d’optimiser  harmonieusement leur développement culturel, scientifique  et technique», en permettant en outre aux dites générations « de prendre toute la mesure des grands équilibres de la vie » .

Dans ce cadre général, les établissements d’enseignement supérieur , tout en refusant sans concession toute forme d’intolérance, doivent s’affirmer comme le lieu privilégié de rencontres entre des enseignants chercheurs ayant la capacité de transmettre le savoir et des étudiants venus de tous horizons ayant la vocation et  la capacité de  s’enrichir ;

Alors, eu égard aux profondes mutations sociétales qu’a connu l’Europe depuis  la rédaction de la Magna Charta, en particulier  au plan de la mobilité des jeunes générations, de l’impact des medias et de l’essor  de la circulation intra européenne, pourquoi ne pas songer aussi, à titre expérimental, à transposer nonens volens l’aventure universitaire à l’échelle des établissements du second  degré ? Un semestre effectué, par exemple, dans un collège  d’un pays européen voisin, outre son intérêt linguistique et culturel, permettrait aux  futurs étudiants de découvrir une palette d’opportunités géographique plus diversifiée, susceptible  de les  convaincre qu’en matière de recherche ,le slogan « point de salut  en dehors des Etats Unis » pourrait être sérieusement nuancé !Non que nous soyons animés d’un quelconque sentiment anti américain. Tant s‘en faut ! Il serait de fait particulièrement malvenu de la part d’un ancien boursier Fullbright qui fit de  surcroît sa  thèse de Doctorat d’Etat Outre Atlantique ! Mais un rééquilibrage des points d’accueil au  profit de l’Europe  ne pourrait être que profitable à la  promotion de l’intégration européenne. »

Comme le soulignaient les rédacteurs  de la Charte, « dépositaire de la tradition de l’humanisme européen, mais avec le souci constant d’atteindre au savoir universel, l‘Université, pour assumer ses missions, affirme la nécessité impérieuse de la connaissance  réciproque et de l’interaction des cultures ».

 

Jacques Soppelsa

Président honoraire de l’Université de Paris I Panthéon Sorbonne, Doyen de l’École Supérieure des Métiers du Droit, Conseiller éditorial d’Opinion Internationale. Co-auteur avec Alexandre del Valle de « La Mondialisation dangereuse », éd. L’Artilleur, 2021.

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