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11H47 - jeudi 22 mai 2014

« La jeunesse centrafricaine ne doit pas avoir peur de s’engager en politique »

 

Fraichement engagé en politique, président de l’Union pour le Renouveau en Centrafrique (URCA) pour la région Europe, Fred Edgard Gassia partage sa vision sur la situation de son pays et rappelle la nécessité de réinvestir la sphère politique, particulièrement pour la jeunesse centrafricaine.

Edgard-small 

Vous-vous êtes engagé en politique depuis peu, quelle a été votre motivation ?

Si l’effectivité de mon engagement au sein d’un parti politique est récente, mon intérêt et ma passion pour la politique datent de mes années de lycée.

J’ai donc pris le temps d’observer, d’écouter, d’échanger avec ceux de mes nombreux parents, ami(e)s et connaissances qui ont eu à occuper des hautes fonctions politiques. Je me suis fait mon idée de ce que doit être un « homme politique ». C’est pour vous dire, que devant la gravité de la situation que vit mon pays aujourd’hui, ce n’est pas impréparé que j’ai décidé de rejoindre l’URCA.

Les motivations de mon engagement se trouvent dans l’idée que je me fais de la politique.

J’ai toujours cru que les politiques sont les porteurs du devenir d’un peuple, c’est-à-dire, des serviteurs d’une cause noble. Celle qui vise l’amélioration des conditions de vie de leurs concitoyens. C’est pourquoi, même si en Centrafrique, le comportement de certains hommes qui s’improvisent politiques jette du discrédit sur la classe politique. Mon engagement, je veux le mettre au service d’une action politique car je crois à une nouvelle classe d’hommes politiques imprégnés de compétences qui sauront, à travers les actes qu’ils poseront, rétablir la confiance entre eux et le peuple.


Vous venez d’être désigné président de l’URCA pour la région Europe, qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

Permettez-moi de profiter de votre tribune, pour dire toute ma reconnaissance et mes remerciements à mes ami(e)s rénovatrices et rénovateurs qui ont fait confiance à ma personne en me portant à la présidence du comité fédéral Europe de l’URCA. Qu’ils soient rassurés que je ferai de la sorte que cette confiance soit permanemment justifiée.

Pour revenir à votre question, au-delà de l’honneur que me procure cette désignation, je mesure le poids de la responsabilité.

En tant qu’image de notre parti dans notre zone de juridiction, le bureau fédéral sous ma supervision, en collaboration étroite avec les instances supérieures du parti auprès desquelles nous prenons des instructions et auxquelles nous rendons compte de nos activités, doit jouer un rôle de premier plan dans l’élaboration et la coordination de la stratégie visant à faire connaitre le parti et à convaincre un maximum de compatriotes d’y adhérer.

Vous comprenez que c’est beaucoup de responsabilités, mais je m’engage à les assumer avec beaucoup de dignité.


Quelle est votre vision en tant que nouvelle force politique de la RCA ? La votre à vous personnellement ?

Vous savez, les raisons qui ont participé à la création de l’URCA sont tirées du constat fait de ce que certains « hommes politiques », qui n’ont que leur ancienneté sur la scène politique à proposer au peuple centrafricain, ont longtemps joué « l’exclusion ».

Pas de dialogue avec le peuple, égo surdimensionné… Comportement qui a poussé certaines personnes qui ne se sont pas préparées et qui ne sont ni attendues à s’imposer par les armes au sommet de l’Etat.

Nous avons constaté par ailleurs, l’inexistence aujourd’hui en République centrafricaine d’un parti politique véritablement rassembleur ; l’enracinement du repli identitaire au sein des partis politiques a fait qu’une fois arrivés au pouvoir, les gens d’une même famille, d’une même région, des ami(e)s se retrouvent à partager les ressources de l’Etat, tout en instaurant l’impunité au sommet des Institutions plongeant le reste du peuple dans une misère qu’on ne peut décrire.

C’est pourquoi, nous ambitionnons en tant que nouvelle force politique, pour reprendre votre expression, rassembler les Centrafricaines et Centrafricains, de toutes les régions, de toutes les confessions religieuses, de toutes les couches sociales pour qu’ensemble, nous écrivions une nouvelle page de notre histoire axée sur les valeurs de la Paix, de l’Unité, du Travail et de la Dignité.

L’URCA compte offrir l’opportunité à chaque Centrafricain de mettre en application ses connaissances ainsi que la possibilité de s’épanouir dans son propre pays.

Un travail de veille sera fait sur la sécurité et la justice et un accent particulier sera mis sur la création de richesses à partir de nos ressources domestiques (bois, café, coton, or, diamant…). Nous mettons au centre de nos préoccupations la reforme de l’éducation en priorisant les formations techniques et professionnelles, mais aussi la santé ainsi que le développement des infrastructures.

Vous trouverez les détails de tout cela, dans le projet de société que nous proposerons d’ici peu au peuple centrafricain.

A titre personnel, je travaillerai pour que cette ambition collective, celle de mettre le peuple centrafricain au cœur de notre engagement, celle d’utiliser le dialogue comme moyen de résolution de crises sociales, celle de renouer avec l’esprit de justice et l’idée de progrès, ne soient pas de simples slogans.

Les politiques doivent être à l’écoute du peuple pour une meilleure prise en compte de ses attentes. Je travaillerai pour que cela soit possible.


Allez-vous attirer une « fraîcheur » au sein de votre parti et quel est votre argument en définitive, le votre, je précise ?

Je crois en la capacité de la jeunesse centrafricaine de se prendre en charge pour peu qu’on lui en donne les moyens.

C’est pourquoi, je demande à cette jeunesse talentueuse de nous rejoindre au sein de l’URCA qui est un parti politique ouvert, avec un leader son Excellence Anicet Georges Dologuélé, qui a une expertise confirmée et reconnue au-delà de nos frontières, dans la gestion des projets de développement, qui à une audience dans le monde financier, qui a une expérience en gestion des hommes avec une grande capacité d’écoute et qui sait reconnaitre les talents, afin de mettre ses compétences au service de la Nation.

Que la jeunesse centrafricaine n’ait pas peur de s’engager en politique, c’est le moment de prendre ses responsabilités afin de peser en tant que force de proposition sur les décisions qui vont engager l’avenir de notre pays. Gustave Le Bon disait, je le cite : « La compétence sans autorité est aussi impuissante que l’autorité sans compétence ». On agit ou on subit.

Les rénovatrices et rénovateurs de l’URCA proposeront la création d’un cadre permanent de concertation qui permettra aux Centrafricaines et Centrafricains de se réunir par domaine de compétence dans des ateliers afin d’être des interlocuteurs efficaces auprès des politiques et des chefs d’entreprise, en faisant un travail préventif de veille, d’ingénierie, d’accompagnement, de conseils ou de formation.


Comment analysez-vous la situation de la RCA actuellement ?

Nombreux sont ceux qui m’ont précédé et qui ont répondu dans vos colonnes à cette question.

Des différentes réponses, une unanimité s’est dégagée en disant que notre pays va mal, le peuple centrafricain vit un marasme psychologique et moral jamais égalé, provoqué par des décisions opportunistes de certains fils de Centrafrique qui ont pensé que leurs intérêts dépassaient, en valeur, la vie de leurs compatriotes.

Au-delà de ce constat, je pense que le problème transcende toute considération politique, communautaire ou religieuse.

Les autorités de la transition doivent s’ouvrir à toutes les forces vives de la Nation (partis politiques, société civile, leaders religieux…) pour qu’ensemble, ils travaillent pour mettre fin à cette espèce de prime à la violence dont ont bénéficié certains bandits de grand chemin et criminels qui sont pourtant connus et qui continuent de narguer le peuple centrafricain, ce qui soulagera les victimes et permettra à notre pays de retrouver son harmonie d’antan, sinon, nous prenons le risque de pousser notre pays dans un puits sans fond.


Comment percevez-vous l’appui de la communauté internationale en RCA ?

L’Etat centrafricain n’est pas en mesure actuellement de garantir la sécurité des populations ou simplement de se prendre en charge. Les éléments constitutifs d’un Etat sont quasi-inexistants.

Dans cette situation, nous ne pouvons qu’être reconnaissants à la communauté internationale qui s’est mobilisée pour nous assister.

Cependant, il appartient aux élites centrafricaines et aux autorités de la transition de proposer ou de s’accorder avec la communauté internationale sur un schéma de sortie de crise en tenant compte des besoins réels de la RCA.

La communauté internationale ne doit pas se sentir seule dans la recherche de solutions à nos problèmes.

Elle doit désormais prendre ses responsabilités en amont, c’est-à-dire, qu’aucune raison ne doit justifier un soutien à une prise de pouvoir non démocratique. Les formules démissionnaires du genre « nous prenons acte » doivent être proscrites.


Comment analysez-vous la situation des Forces armées centrafricaines (FACA) ?

N’étant pas un spécialiste des questions de la défense ou de sécurité pour prétendre analyser la situation des FACA, je constate néanmoins que notre armée, qui jadis était une institution de référence dans la sous-région de l’Afrique centrale, est aujourd’hui abimée.

Même si je conçois qu’il est plus que nécessaire de procéder à une réorganisation des forces de défense et de sécurité de façon à créer une nouvelle armée opérationnelle et professionnelle, capable de protéger et défendre nos frontières ainsi qu’une police et une gendarmerie qui puissent véritablement assurer leur mission de maintien de l’ordre, je ne partage pas ce raccourci qui exclut systématiquement nos militaires du processus visant le retour de la sécurité dans notre pays.

Ce ne sont pas tous les militaires centrafricains qui sont pourris. Parmi nos militaires, officiers, sous officiers et soldats qui sont aujourd’hui regroupés dans des camps militaires, il en existe qui ont fait leurs preuves dans des académies militaires de renom en France, aux Etats-Unis, en Chine, en Grèce, au Maroc… Certains n’ont connu que le métier des armes, et d’autres on rejoint très tôt une école primaire et sont disciplinés. Je fais ici allusion aux anciens enfants de troupe, ceux-là, il faut les associer à la recherche des solutions pour un retour de la sécurité à un niveau acceptable. De plus, ils possèdent une bonne connaissance du terrain. Il faut leur faire confiance en les équipant, pour qu’ils mettent leur savoir-faire au service de la Nation.


Comment voyez-vous les Séléka et les anti-balaka aujourd’hui ?

Je ne sais pas pourquoi on continue de parler des Séléka comme une entité avec laquelle il faut discuter.

Si ma mémoire m’est fidèle, l’ancien chef des Séléka et Président démissionnaire de la transition, Michel Djotodia avait pris un décret mettant fin aux activités de la Séléka. Continuer de les considérer, c’est participer à l’anarchie.

De toutes les manières, les Séléka comme les anti-balaka, quelles que soient les raisons qu’ils évoquent pour justifier leurs actions, restent des forces nuisibles pour la cohésion nationale. Il faut donc les désarmer sans condition.

C’est à cet effet que le Conseil de sécurité des Nations unies avait voté les résolutions 2127 et 2134, qui devraient être appliquées sans complaisance.

De plus, des programmes financés par la communauté internationale pour leur désarmement, démobilisation et réinsertion existent, ils doivent rentrer dans le processus.

Pour ceux de leurs éléments qui entendent prendre liberté sur la justice en persistant dans la barbarie, des enquêtes doivent être diligentées afin de les identifier et les traduire en justice.

Si nous voulons nous en sortir, unissons nos forces pour qu’il n’y ait plus de place pour l’impunité dans notre pays. 


Une sanction de l’ONU est tombée contre des personnalités centrafricaines, qu’en dites-vous ?

Je pense que c’est une bonne chose, il faut aller plus loin dans les sanctions en envisageant l’arrestation et la traduction de ces personnes en justice, en élargissant le champ de ces sanctions à tous ceux des responsables et complices de ces actes ignobles et criminels qui ont plongé notre pays dans le néant.


Quel message pour nos lecteurs ?

A mes compatriotes centrafricaines et centrafricains qui vous lisent, je leurs dis que l’histoire enseigne aux hommes la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements mais elle justifie l’indicible espoir.

Que cette grave crise nous rassemble davantage pour que, unis dans l’amour de notre pays, nous disions « plus jamais ça » !

Votre engagement objectif et l’impartialité dont vous faites montre dans le traitement des informations sont autant d’éléments qui doivent déterminer vos lecteurs à continuer de vous faire confiance en vous lisant.

Bon vent à Opinion internationale !

Propos recueillis par Lydie Nzengou

Journaliste, chef de la rubrique Centrafrique

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