Edito
09H55 - lundi 10 mars 2025

Quand les services publics marchent mal, la vie chère marche bien ! La chronique d’Emmanuel de Reynal

 

La vie chère en Martinique est un sujet récurrent, souvent attribué à la grande distribution rendue coupable de tous les maux. Nombreux sont les élus qui, pour mieux se défausser de leurs propres responsabilités, hurlent avec les démagos et les populistes contre les entreprises qui “tirent le char”, comme disait Churchill. En propageant ces messages, pourtant contraires aux constats factuels des agences publiques comme l’INSEE ou l’Autorité de la concurrence, ils font mine d’oublier que seules les entreprises créent de la richesse dans le pays, et qu’à force de les vilipender, ils prennent le risque de fermer le robinet et d’assécher définitivement notre économie. Il est temps d’ouvrir les yeux sur une autre réalité et de mettre en lumière les facteurs de cherté liés à l’inefficacité de nos services publics territoriaux.

 

Les collectivités locales de Martinique accusent des retards de paiement préoccupants

Selon l’Agence Française de Développement, au 31 décembre 2023, seulement 16 communes sur 34 respectaient un délai de paiement proche du délai légal de 30 jours.

Ces retards, souvent supérieurs à 90 jours, mettent en péril la trésorerie des entreprises locales, en particulier les petites et moyennes entreprises, limitant ainsi leur capacité d’investissement et de développement. Ainsi, la Martinique bat un record de faillites d’entreprises “en bonne santé”, des entreprises dont le carnet de commandes est rempli mais non payé !

La Martinique présente par ailleurs le taux d’administration le plus élevé des régions françaises, avec 65% de fonctionnaires territoriaux (pour 1 000 habitants) de plus que la moyenne nationale.

Cette sur-représentation, amplifiée par une sur-rémunération, entraîne des coûts de fonctionnement records, financés par une fiscalité locale alourdie, incluant des taxes telles que la taxe foncière (dont les taux sont, en Martinique, plus élevés de 30% par rapport à la moyenne nationale), l’octroi de mer, la cotisation foncière des entreprises (CFE) et la taxe sur les carburants. Ces prélèvements impactent directement le pouvoir d’achat des Martiniquais et renchérissent le coût de la vie. Ils représentent plus de 1 000 € par an et par individu (et plus de 4000 € par an pour un couple avec deux enfants).

 

Malgré ces effectifs pléthoriques, la qualité des services rendus est souvent désastreuse

La gestion de l’eau, des déchets et des transports en commun – pour ne citer que ceux-là – constitue un triste modèle d’inefficacité. Combien d’heures d’écoles perdues à cause des bus qui restent à quai, combien de retards en entreprise, de stress et de tensions ? Ces dysfonctionnements obligent les citoyens à recourir à des solutions alternatives coûteuses, aggravant ainsi la vie chère. Rappelons que le transport est le premier poste de dépense des ménages martiniquais, bien avant l’alimentaire.

Les délais de réponse et de versement des subventions sont incompatibles avec la réactivité nécessaire aux porteurs de projets. Une partie importante des subventions est renvoyée à l’Europe faute de projets aboutis, privant ainsi la Martinique de financements essentiels à son développement. Ces dégagements d’office représentent des dizaines, voire des centaines de millions d’euros, un scandale !

Il est temps que les élus martiniquais reconnaissent enfin leur part de responsabilité dans la cherté de la vie en Martinique, et l’assument. Plutôt que de désigner les entreprises comme seul bouc émissaire, ils feraient mieux de proposer des réformes structurelles pour améliorer l’efficacité des services publics, réduire l’obésité administrative et optimiser la gestion des ressources qui leur sont confiées. Car en vérité, la lutte contre la vie chère ne saurait être dissociée d’une efficacité renforcée des administrations locales. Une telle démarche permettrait de diminuer la pression fiscale sur les entreprises et les citoyens et de favoriser un environnement économique plus dynamique et équitable.

En somme, la lutte contre la vie chère est l’affaire de tous. Elle passe d’abord par le rejet de la démagogie. Elle passe ensuite par une introspection profonde de nos structures publiques locales. Elle passe enfin par une prise de conscience du rôle essentiel de ceux qui devraient être vus comme des partenaires naturels, je veux parler des entreprises. Ce sont là les conditions sine qua non pour offrir aux Martiniquais une qualité de vie à la hauteur de leurs attentes.

 

Emmanuel de Reynal

Le cyclone Valls. L’édito de Michel Taube

Un ministre ne devrait vraiment pas faire cela ! Lundi 17 mars à 18h, Manuel Valls se rend dans la maison d’Aimé Césaire, le grand homme qu’il a eu l’honneur de rencontrer étant…
Michel Taube

Pourquoi l’industrie française est-elle bipolaire ?

La double contrainte de l’industrie française : difficultés de recrutement et licenciements à vau-l’eau L’industrie française se meut dans un paradoxe étouffant dont il est urgent de sortir ! En 2024, le secteur de…