Edito
11H01 - dimanche 1 octobre 2023

Contre les sondages politiques. L’édito de Michel Taube

 

A quatre ans de l’échéance, que penser des études d’opinion sur la prochaine élection présidentielle de 2027 ? Radouan Kourak nous en propose son analyse sur la base de la dernière enquête Toluna Harris Interactive pour Challenges qui place le duel Marine Le Pen – Edouard Philippe comme l’hypothèse la plus probable de la prochaine présidentielle.

Pour notre part, les sondages politiques apparaissent de plus en plus d’une grande vérité chimérique. Tout d’abord, parce que, fondamentalement, les Français sont devenus de plus en plus insondables ! Leur désamour avec la politique les pousse à cacher leur jeu, à changer de point de vue au fil des mois et de l’actualité.

Quant à la perspective de la présidentielle, l’étude Toluna Harris Intreractive, comme toutes les autres, – et les sondeurs nous en excuseront -, est une pure chimère pour une raison très simple : elle repose sur une hypothèse improbable (mais décisive dans le résultat qu’ils affichent) selon laquelle un seul candidat de la majorité présidentielle et de toute la galaxie Macron se présenterait au premier tour de la présidentielle en 2027.

Etrangement ces mêmes études présentent plusieurs candidats à l’extrême-gauche et plusieurs issus de la droite nationaliste. Mais l’unanimité derrière un seul candidat est affichée pour le centre et la macronie. C’est limite déontologiquement à quatre ans de l’échéance présidentielle.

Or l’hypothèse inverse est fort plus envisageable : et si la macronie ne survivait pas à Emmanuel Macron et ne faisait pas bloc derrière un seul prétendant à sa succession ?

Ainsi, nous suggérons à Harris Interactice, l’Ifop et d’autres instituts de tester l’hypothèse selon laquelle deux candidats de la macronie s’affronteraient au premier tour en 2027 ? Edouard Philippe – Gérald Darmanin ? Et si Bruno Le Maire, Gabriel Attal, Elisabeth Borne ou Jean Castex se lançaient coûte que coûte ?

Et là, patatrac, presque mécaniquement, en cas de deux voire trois candidatures concurrentes au centre, la macronie serait relayée en troisième position à l’issue du premier tour et nous aurions soit un duel final Le Pen – Mélenchon (s’il est candidat), soit une forte remontada d’un Laurent Wauquiez, étrangement bas dans l’étude Harris.

Dans les prochaines années, les sondages voudront imposer le duel Marine Le Pen – Edouard Philippe dans l’esprit des Français. Une rengaine incessante qui ne manquera pas d’énerver les Français, sans parler des Eric Zemmour, des Laurent Wauquiez et de nombreux challengers de ces deux prétendants non déclarés.

Quant aux élections européennes qui auront lieu le 9 juin 2024, les mêmes artifices sont employés par les instituts de sondage: le vote écologiste y sous-estime largement des candidatures dissidentes d’Europe Ecologie Les Verts et pourtant bien plus en phase avec l’opinion publique et les solutions préconisées pour vivre avec le réchauffement et le dérèglement climatiques, comme par exemple Jean Marc Governatori, président d’Ecologie an centre.

Mieux que d’interdire les sondages trois mois, six mois avant la présidentielle de 2027 (si celle-ci ne se déroule pas bien avant…) ou les Européennes de juin prochain, il faudrait surtout que les médias renoncent à la facilité sondagière et refusent de les publier dès maintenant comme l’a fait courageusement Ouest France pendant la campagne présidentielle 2022…  et Opinion Internationale.

Non, on ne prédit pas l’avenir sur un leurre voire une chimère.

 

Michel Taube

 

Directeur de la publication