Edito
13H33 - jeudi 3 mars 2022

Emmanuel Macron : « I have nothing to offer but blood, toil, tears and sweat ». L’édito de Michel Taube

 

« Je n’ai à offrir que du sang, du labeur, des larmes et de la sueur ». La phrase n’est évidemment pas d’Emmanuel Macron, mais de Winston Churchill. Elle fut prononcée le 13 mai 1940 devant la Chambre des Communes, juste après qu’il eut succédé à Neville Chamberlain, qui avait signé pour l’Angleterre les tristement célèbres accords de Munich, deux ans au préalable, donnant à Adolph Hitler la conviction de la faiblesse de l’Ouest européen, de la France et de l’Angleterre. Cette capitulation par anticipation donna à Churchill l’occasion d’une autre formule devenue tristement historique : “vous aviez à choisir entre la guerre et le déshonneur ; vous avez choisi le déshonneur et vous aurez la guerre.” Le Churchill de cette nouvelle guerre, pour le moment militairement circonscrite à l’Ukraine, c’est Volodymyr Zelensky. Pour survivre, il devra peut-être troquer la posture de Churchill pour celle de De Gaulle, et organiser la résistance de l’étranger.

Et dire que la sortie de la guerre contre le Covid, peut-être temporaire, devait avoir un parfum de libération ! Hier ils étaient presque 15 millions à regarder Emmanuel Macron nous annoncer des jours difficiles, tandis qu’ils furent jusqu’à 35 millions au plus fort de la guerre contre le Covid à suivre les interventions solennelles du chef de l’Etat. Ce qui ne l’empêche pas de gagner 3 points en une semaine dans le baromètre quotidien Opinion Way – Kéa Partners pour « Les Echos » et Radio Classique. L’effet « guerre ».

Hier, 2 mars 2022, Emmanuel Macron n’a pas prononcé un discours de président en guerre, même s’il a une nouvelle fois mentionné le retour du tragique. Mais la guerre était présente en filigrane, presque suintante. Il s’en dégageait d’âcres effluves de sueur et de sang : « La guerre en Europe n’appartient plus à nos livres d’Histoire, à nos livres d’école, la démocratie n’est plus considérée comme un régime incontestable ».

D’ailleurs, comme il l’a annoncé, Emmanuel Macron recevra la semaine prochaine à Versailles, sous les dorures d’une République monarchique, les 27 chefs d’Etat et de gouvernements pour jeter les bases d’une Europe de la défense ! On sera bien loin de la visite de Poutine en son début de quinquennat et le souvenir du traité de Versailles planera dans l’atmosphère.

Emmanuel Macron a désigné l’agresseur, sans ambiguïté, comme l’a fait à l’ONU la quasi-totalité de la planète. En s’abstenant, la Chine a fait comprendre à Vladimir Poutine qu’elle ne pouvait se faire l’impasse sur un milliard de consommateurs occidentaux. Le Président français a parlé de « rupture », de « bouleversement des équilibres », de « changement d’époque », d’une « France indépendante et souveraine ». Et plus que jamais, il a appelé à l’unité européenne, coupant l’herbe sous les pieds aux nationalistes qui pensent que la France pourra, seule, peser économiquement, politiquement et militairement face aux grands blocs qui ne défendent que leurs intérêts : « Notre Europe démontre une unité remarquable, elle doit désormais accepter de payer le prix de la paix, de la liberté, de la démocratie. »

« Le prix de la paix, de la liberté, de la démocratie ». Là est peut-être la citation historique d’Emmanuel Macron, dont on a oublié que ce soir, il déclarera sa candidature à l’élection présidentielle. Une péripétie, tant le tragique de la grande histoire qui s’écrit sous nos yeux, celle de la guerre aux relents nucléaires, lui assure sa réélection le mois prochain. Lorsque l’histoire est tragique, comme après chaque attentat islamiste, le discours du président en exercice est toujours à la hauteur de l’événement. Le discours…En attendant ce soir la Lettre aux Français de candidature à sa réélection d’Emmanuel Macron.

 

Michel Taube

Directeur de la publication