Edito
06H50 - jeudi 6 janvier 2022

Élections présidentielles : après le vide (judiciaire) de 2017, celui (sanitaire) de 2022 est rempli par… L’édito de Michel Taube

 

En 2017, la droite républicaine devait succéder aux socialistes, tout comme ceux-ci ont succédé à ladite droite cinq ans au préalable. Marine Le Pen dénonçait l’UMPS, avec raison sur un point dont il serait trop risqué qu’il changeât : les alternances ne remettaient pas en cause le « système », certes imparfait et inéquitable, mais qui au moins évitait d’hasardeuses aventures, ledit système étant en définitive celui qui régit le monde. La question du nom du président importait peu. Naguère, ce devait être Balladur. Ce fut Chirac. Plus tard, ce devait être Sarkozy et ce fut Sarkozy. Puis ce devait être Strauss Kahn et ce fut Hollande. En 2017, ce devait être Juppé, puis Fillon et ce fut…. Macron !

Ça, pour être « système », on ne pouvait pas faire mieux ! D’ailleurs Emmanuel Macron a toujours eu la faveur du CAC 40 et du monde de la finance, qui fut naguère le sien. Mais en dépit de son talent de communiquant, de son charisme indéniable et d’une connaissance des dossiers, il fut un quasi intrus à l’Élysée en ce que son élection fut le fruit d’un extraordinaire concours de circonstances qu’il n’est plus nécessaire de rappeler, si ce n’est pour souligner qu’outre la déconfiture du « président normal » , renonçant à se représenter, ce sont les juges qui ont largement fait l’élection de 2017, en se montrant diligents comme jamais pour clouer au pilori François Fillon, qui leur tendit cependant allègrement le bâton pour se faire battre.

On eut donc à l’Élysée un jeune premier, excellent acteur comme le reconnu son propre père, dont le bilan cinq ans plus tard mérite évidemment d’être débattu. En 2021, Le Pen et surtout Zemmour avaient mis le feu aux poudres avec leurs arguments identitaires et sécuritaires, qui pour être en partie fondés n’en sont pas pour autant dénués d’une dimension nationaliste qui l’histoire incite à regarder avec méfiance. En 2022, l’addition des voix de Le Pen et Zemmour dans les sondages (qui ne sont certes que des sondages) placerait un candidat unique de cette droite en tête au premier tour, ou au moins le qualifierait pour le second.

Mais début 2020, le Covid arriva, repartit, revint, etc. À moins de quatre mois du premier tour, jamais la France n’aura été aussi omnicrontaminée, même si la bestiole du moment, horriblement contagieuse, n’est pas si méchante avec les vaccinés. Résultat : Macron cogne sur les antivax avec la furie d’un boxeur sur le point de mettre KO son adversaire, à la satisfaction de la majorité silencieuse, provoquant les foudres d’une opposition focalisée sur la petite phrase au point d’un oublier le fond. Le débat, ce n’était déjà plus l’immigration, l’islamisme ou la délinquance. Ce n’est même plus le Covid, avec ses cafouillages gouvernementaux, son hôpital plus malade que les malades. Ce n’est pas davantage, et ne sera sans doute jamais, ou alors si peu, l’école et l’université, la police et la justice, l’inflation qui repart et le chômage qui certes recule, mais perdure plus qu’ailleurs. Ce ne sera pas la culture si touchée par la pandémie, le tourisme qu’elle s’acharne à démolir, l’écologie si mal représentée par des plus rouges que verts (Jadot cornaqué par Rousseau)… Non, l’élection présidentielle, ce sera le Covid ! Et qui sait, en mai, le virus nous aura peut-être lâchés, par vaccination, immunité collective, voire essoufflement de la bébête, si de mutation en mutation, le requin se transforme en poisson rouge, et la mort en rhume.

Emmanuel Macron n’y est pour rien, mais il aurait tort de se priver de l’aubaine. Le Covid est son allié et il serait malsain de prétendre qu’il s’en réjouit. Encore que… L’hôpital tient le choc (pour le moment), l’économie, toujours sous perfusion, aussi. L’omnicron, on n’en meurt peu, sauf si on veut jouer les matadors super intelligents et épris de liberté en refusant de se vacciner.

Le Covid avait déjà faussé les élections municipales. Les Parisiens en subissent les conséquences tous les jours, mais les Strasbourgeois, Bordelais et autres Lyonnais commencent aussi à se poser des questions sur les compétences, voire la psyché, des pseudos écolos qui dirigent leur ville.

Tout est toujours possible, comme un accident climatique majeur ou un attentat islamiste à l’approche premier tour. Durant la campagne, notamment lors des débats entre les candidats, les lignes peuvent bouger et les adversaires du sortant appuyer si fort là où ça peut lui faire mal que l’issue du scrutin s’en trouverait bouleversée. Mais il ne s’agit là que de supputations. Après les juges en 2017, le Covid en 2022 sera le premier serviteur d’Emmanuel Macron, plus que jamais favori à sa réélection.

Michel Taube

Directeur de la publication