Edito
03H42 - jeudi 11 novembre 2021

Le « Made in France » sera-t-il vraiment l’enjeu de la présidentielle ? L’édito de Michel Taube

 

Tous les prétendants, ou presque, y seront : les présidentiables non déclarés ou désignés et les candidats déclarés mais de témoignages, presque tous défileront dans les travées de « the place to be » en mauvais français ce week-end : Paris accueille en effet du 11 au 14 novembre le MIF Expo, le salon du Made in France, qui se veut une vitrine de l’industrie, de l’innovation et à la créativité françaises. Mais à six mois de la présidentielle, cette édition prend une dimension politique qui en fait un événement de la campagne des présidentielles.

Pouvoir d’achat ou identité ? Chômage ou insécurité ? Entre les deux, les enquêtes, et les priorités des Français balancent, sans oublier le climat et les questions écologiques auxquels les jeunes sont particulièrement sensibles.

Mais que l’on soit Emmanuel Macron ou Éric Zemmour (ou leurs concurrents), le made in France est de facto au cœur de leur quasi-campagne et donc de l’élection présidentielle. Le premier ne pourra plus faire l’impasse sur les questions identitaires, sur l’immigration extra-européennne ni la délinquance. Il devra comprendre que si plus d’un tiers des Français se disent prêts à voter pour Le Pen ou Zemmour, c’est que la mutation de la population est une réalité, que la justice pénale doit retrouver sa vertu dissuasive, ou que la défense de la laïcité ne pourra se contenter de beaux discours ni de lois inappliquées. Les partis « républicains » devront s’emparer de ces thématiques désormais en phase avec les attentes d’une majorité de Français.

Quant à Éric Zemmour, qui annoncera peut-être sa candidature au MIF Expo, il effectue des raccourcis made in France un peu abrupts, à la pertinence arithmétique aussi discutable que les 35 heures qui devaient résorber le chômage il y a plus de vingt ans : selon lui, réduire l’accès des étrangers à certaines prestations sociales et expulser les islamistes et délinquants étrangers serait la quadrature du cercle des Solutions pour la France.

Qui est le candidat le plus « Made in France » ? Macron qui laissé se dépecer l’appareil industriel français depuis qu’il est à l’Elysée, d’abord comme secrétaire général adjoint du Palais sous François Hollande puis comme capitaine du navire ? Un  Zemmour qui fait de la préservation de l’identité de la France (la fille ainée de l’église est devenue la Marianne de la République) l’alpha et l’omega de la présidentielle ? Un Arnaud Montebourg, le ministre qui a le plus tenté de défendre dans les entreprises le made in France, lorsqu’il était à Bercy ? Peu probable tant le mondialisme indigéniste de la gauche l’empêche d’ouvrir les yeux sur le monde tel qu’il a dérivé. L’affaire de la suspension des 11 milliards d’euros de transferts de Western union par les étrangers fait éclater le ballon de baudruche Montebourg.

Comment faire vivre le Made in France, telle est la question ! Et c’est une question d’appréhension globale de la politique française. Trouver en France les compétences qui sont indispensables à des entreprises qui n’arrivent plus à recruter, c’est du made in France ! Développer la recherche applicative pour espérer que lors de la prochaine pandémie nous aurons un vaccin français, c’est du made in France ! La crise de la Covid a mis en exergue notre dépendance à la Chine et aux Etats-Unis. Réduire notre dépendance, c’est du made in France ! Relocaliser nos industries quitte à payer (un peu ou beaucoup) les produits français, ce serait évidemment le Graal du made in France !

Enfin, soyons honnêtes, le made in France, c’est aussi du made in Europe ! Même si nous devons être conscients que nos partenaires européens sont aussi nos premiers concurrents commerciaux, la France n’est plus de ce petit village gaulois assiégé de toutes parts. Au made in France, il faudra ajouter le made in Europe, car certains chantiers sont si colossaux, certains défis si vertigineux, que l’Union européenne ne sera pas de trop pour les relever : réussir la mutation énergétique et environnementale, gérer la pression migratoire, tels sont les grands défis du « made in France & Europe ».

Alors si tous les candidats rivaliseront ce week-end de promesses alléchantes et tricolores, c’est d’un Plan Marshall (à la française bien sûr) dont le made in France aura bien besoin dès le 24 mai 2022 !

 

Michel Taube

 

Directeur de la publication