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06H52 - dimanche 17 octobre 2021

Sommet Afrique – France : passer de la parole aux actions

 

Le Sommet Afrique-France a mis à nouveau sur le devant de la scène l’incroyable dynamisme du continent et l’importance de voir son potentiel se réaliser. Voilà 10 ans maintenant que cette vision fait, à raison, l’unanimité au sein de la communauté internationale comme au sein de la communauté d’affaires.

Un potentiel inexploité

Et pourtant, il semble que de sérieux freins subsistent pour attirer de nouveaux acteurs : alors que le gap de financement est massif – celui relatif aux seules infrastructures est estimé en moyenne à $70bn par an  – l’arrivée de de nouveaux acteurs reste un épiphénomène et l’on a même assisté à une diminution de la présence des banques internationales. Les Investissements Directs Etrangers, après avoir atteint un pic en 2015 à $57,5bn, ont oscillé ces dernières années et étaient de $45bn en 2019. Et quant à la France, en moins de 20 ans, ses parts de marché dans les exportations vers le continent (quand bien même elles aient augmenté en valeur absolue) ont été divisées par deux.

Qu’est-ce qui empêche de nouveaux opérateurs, toujours hésitants, d’enfin franchir le pas ? L’explication réside certainement en large partie dans le fait qu’ils souffrent d’une distorsion de l’image du continent et de son risque. Les grilles de lecture sont devenues dépassées, souvent entretenues par un traitement court-termiste de l’actualité du continent et, bien entendu, une surpondération des mauvaises nouvelles – ce qui n’est pas, il faut le reconnaître, réservé à l’Afrique.

L’interprétation de la géopolitique en Afrique freine son potentiel

L’exemple le plus criant est l’appréciation toujours très négative du risque politique, avec la crise sahélienne ou des événements comme le récent coup d’État en Guinée Conakry qui provoquent un effet de contagion sur la vision de reste du continent. C’est oublier que Conakry est plus éloignée d’Accra, la capitale du Ghana, que Paris de Sarajevo – il ne serait venu à personne l’idée de dégrader le risque-pays français ou même allemand lors de la guerre de Yougoslavie…

Quant aux discours pessimistes sur la démocratisation en Afrique, le Ghana en est, justement un parfait contre point : avec ses 30 millions d’habitants, le pays a raffermi sa construction démocratique sur plusieurs décennies, au travers de multiples élections et alternances réussies – et devrait être considéré non plus comme une démocratie en transition, mais tout simplement comme une démocratie.

Cela n’est évidemment pas le seul exemple, ce qui devient apparent lorsque l’on regarde les tendances de long terme et les poids lourds du continent, dont l’influence est régionale :  l’Afrique du Sud a maintenu sa démocratie fonctionnelle en dépit des tensions naturellement nées de la transition post-apartheid, pendant que le Kenya consolide ses processus électoraux ainsi que le Nigeria, dont la première alternance entre deux partis politiques avait eu lieu en 2015 et était passée quasi inaperçue – on parle là de la première puissance économique du continent et de ses presque deux cents millions d’habitants.

Des changements structurels majeurs

La même analyse peut s’appliquer aux économies, encore et toujours associées aux ressources naturelles, et plus souvent qu’à leur tour à la « malédiction du pétrole ».  Si elles étaient aussi vulnérables au cours des matières premières qu’elles l’étaient au siècle dernier, les crises des prix pétroliers de 2008 et 2014 auraient provoqué certainement plus qu’une seule année de récession au Nigeria, premier producteur du continent, et un ralentissement temporaire de la croissance du continent. De la même façon, la résistance au Covid a démenti les prédictions les plus sombres qui avaient été faites au début de la pandémie : l’OCDE annonce sur 2020 une récession de 7,6% pour l’UE vs 2,6% pour l’Afrique, et en 2021 des rebonds à, respectivement, 5% et 3,7% – un rebond proportionnellement bien plus dynamique à celui de l’UE.

L’explication en est simple : quoiqu’on en pense, des changements structurels majeurs, dont n’a pas toujours pris la mesure, ont eu lieu ces vingt dernières années : investissements en infrastructures, diversification économique ayant pu s’appuyer sur le développement des classes moyennes, sauts quantiques dans le digital et la Tech : autant d’éléments ayant permis d’amorcer le passage d’économies exportatrices de matières premières à des économies de consommation.

Nombre d’investisseurs ne s’y sont pas trompés, la Chine en tête. Il ne serait probablement pas inutile de procéder à une mise à jour de la vision de l’Afrique en Europe, et passer de la parole aux actions.

Guillaume Arditti
Fondateur de Belvedere Africa Partners, cabinet de conseil en stratégie et financement axé sur l’Afrique. Au-delà de soutenir ses clients dans la structuration de leurs projets au travers du continent, la raison d’être de BA Partners est de participer au comblement du gap de financement en Afrique à travers la recherche et la promotion de solutions alternatives de financements.

 

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