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12H15 - mercredi 28 juillet 2021

Lettre ouverte à Jean Castex de 14 grands patrons de l’énergie

 

La France prendra la Présidence du Conseil de l’UE en janvier 2022 (la dernière présidence française datait de 2008). Le programme de la Présidence française et ses priorités politiques seront définis à la rentrée 2021 (septembre – octobre). Ils permettront à la France d’influencer et de guider les discussions entre les États Membres au sujet du Green Deal, dont le premier paquet législatif a été publié mercredi 14 juillet dernier. 

Dans ce contexte, à l’initiative de l’association Équilibre des Énergies présidée par Brice Lalonde, qui a notamment été ministre de l’Environnement de la République française, des entreprises majeures des secteurs de l’énergie, du transport et des bâtiments (ABB France – Airbus – Bouygues Énergies & Services – Delta Dore – EDF – Enedis – Groupe ADP –  Groupe Atlantic – Groupe Muller – Safran – Schneider Electric – TotalEnergies – Vinci – Volkswagen France) écrivent au Premier ministre pour que la France recentre la politique européenne sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la croissance verte qui, malgré les discours politiques, restent souvent négligées dans les textes.

Opinion Internationale publie cette Lettre ouverte qui propose des axes prioritaires pour la politique énergie-climat de la Présidence française du Conseil de l’UE.

 

Monsieur le Premier ministre,

La Présidence française du Conseil de l’Union européenne au premier semestre 2022 est une opportunité pour la France de conduire l’Union dans un contexte particulièrement crucial : celui de la mise en place du plan de relance européen d’une part et du paquet législatif énergie-climat “Fit for 55”, d’autre part.

La France se doit d’œuvrer à rassembler les États membres dans un esprit d’ouverture et de cohésion autour d’un programme fondé sur la progression vers la neutralité climatique et sur le développement d’un écosystème industriel innovant tirant parti du plan de relance, capable de s’imposer sur le plan international et de soutenir la transition énergétique et la croissance verte.

Les entreprises signataires de cette lettre et l’association Équilibre des Énergies recommandent que le prochain mandat de la Présidence française de l’Union européenne développe un ensemble d’actions centrées sur les axes stratégiques suivants :

1. Affirmer la primauté de la réduction des émissions de gaz à effet de serre selon le principe « Emission reduction first »

La réduction des émissions de gaz à effet de serre devrait occuper une place centrale dans les textes européens, ce qui est aujourd’hui loin d’être toujours le cas. Les textes sur l’efficacité énergétique, la performance des bâtiments et la taxonomie verte en sont des exemples. 

La Présidence française doit privilégier les actions débouchant sur des résultats concrets en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre, en particulier pour la décarbonation des bâtiments et le déploiement de la mobilité propre et connectée.

2. Faire de la lutte contre le changement climatique un instrument de croissance économique en Europe

La Présidence française doit affirmer avec force sa conviction qu’il est possible d’associer la renaissance économique et la lutte contre le changement climatique en s’appuyant sur un panel de solutions associant l’électricité décarbonée, d’origine renouvelable et nucléaire, la chaleur renouvelable, l’hydrogène et les carburants alternatifs. À ce titre, l’électrification accrue et pilotée des usages est essentielle. Elle doit être associée à la mise en place d’un système de production entièrement décarboné et au développement des réseaux intereuropéens. Pour les États membres dont la production électrique repose encore sur l’utilisation du charbon, le passage au gaz, dans la mesure du possible au gaz renouvelable, reste à poursuivre, tant qu’il ne crée pas d’effets de verrouillage, en tant que moyen de réduire les émissions de carbone de l’UE. L’intégration de l’hydrogène dans les segments où sa valeur ajoutée potentielle est la plus élevée, ainsi que la définition de cadres pour l’ajustement carbone aux frontières et l’amélioration de l’efficacité énergétique devront aussi faire partie des priorités de la France en vue de favoriser la croissance verte.

3.  Permettre une transition juste et le développement des emplois durables

La politique de rénovation des bâtiments est un instrument essentiel pour lutter contre les inégalités sociales et la précarité énergétique. Dans le cadre de la stratégie européenne “vague de rénovations”, la Présidence française doit veiller à ce que le cadre et les définitions retenues pour le programme de rénovation européen soient fondés sur un principe de rapport coût-efficacité. Le programme doit ainsi favoriser les rénovations permettant aux ménages d’obtenir les meilleurs résultats en termes de réduction des émissions de GES et des consommations pour le coût le plus compétitif, en s’appuyant sur le savoir-faire des entreprises européennes. La rénovation des bâtiments, le développement du réseau électrique et des énergies renouvelables, la décarbonation de l’industrie sont autant d’exemples qui doivent contribuer de manière significative à la création de nouveaux emplois durables en France et en Europe.

4.  Reconstruire un leadership technologique européen et français

L’Union européenne et la France doivent reconstruire la compétitivité technologique de leurs industries en soutenant les investissements dirigés vers les activités innovantes appelées à jouer un rôle d’accélérateurs dans la transition énergétique. Ces activités doivent notamment inclure l’hydrogène, les batteries, la capture et le stockage du carbone, les technologies nucléaires avancées, la production de carburants durables dans les secteurs de la marine et de l’aérien. Côté utilisations, l’accent devra être mis sur les techniques du numérique indispensables au pilotage des énergies, sur le renouveau des industries et sur l’adaptation des infrastructures de transport à la mobilité durable et connectée : véhicules autonomes, mais aussi dronotique et mobilité aérienne urbaine.

Confiantes dans l’intérêt que vous voudrez bien porter à ce courrier, les entreprises signataires et l’association Équilibre des Énergies se tiennent à votre disposition pour tout échange plus approfondi.

Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de nos salutations respectueuses,

 Liste des signataires :

Brice Lalonde, Président d’Équilibre des Énergies

Fabien Laleuf, Président d’ABB France

Guillaume Faury, Président-directeur général d’Airbus

Pierre Vanstoflegatte, Président-directeur général de Bouygues Énergies & Services

Pascal Portelli, Président-directeur général de Delta Dore

Jean-Bernard Lévy, Président-directeur général d’EDF

Marianne Laigneau, Présidente du Directoire d’Enedis

Augustin de Romanet, Président-directeur général du Groupe ADP

Pierre-Louis François, Président du Directoire du Groupe Atlantic

Pascal Teurquetil, Président-directeur général du Groupe Muller

Ross McInnes, Président du Directoire de Safran

Jean-Pascal Tricoire, Président-directeur général de Schneider Electric

Patrick Pouyanné, Président-directeur général de TotalEnergies

Xavier Huillard, Président-directeur général de Vinci

 Thierry Lespiaucq, Président du Directoire de Volkswagen France