Edito
08H42 - mardi 5 mai 2020

La droite républicaine veut-elle vraiment prendre le leadership de l’opposition ? L’édito de Michel Taube

 

L’épisode déconfinement dans la crise du coronavirus est sur le point de faire voler en éclat l’unité nationale, déjà fragile, qu’avait demandée le chef de l’Etat, guerre contre le coronavirus oblige. Il faut dire que les retards incessants de l’exécutif et, pire, de la tutelle administrative française, ne cessent de perturber les Français et de nous faire prendre un retard sanitaire, économique et sociétal qu’il sera difficile de rattraper : après un confinement tardif, après des masques et des tests en abondance de pénurie, voici un déconfinement confus et culpabilisateur. Les maires, chargés d’organiser la réouverture des classes, commencent à craquer. Le 7 mai, le gouvernement devrait lever toutes les incertitudes. 11 mai ou pas 11 mai ? On veut nous la jouer « suspense insoutenable ».

Du coup, hier, le Sénat, pourtant confortablement assis sur sa modération légendaire, a sauté le pas : à quelques voix près (mais il n’en a fallu qu’une pour voter la mort du roi Louis XVI), le Sénat a dit non, certes symboliquement, mais il a dit non ! Non au plan de déconfinement présenté par Edouard Philippe. L’union sacrée est terminée et, pour une fois, c’est le Sénat qui montre la voie.

Mais, quelle ne fut pas notre surprise de constater que ce sont les socialistes qui ont voté contre et que les Républicains se sont abstenus alors même que dans leurs discours lis n’ont pas ménagé leurs critiques. Le chef de file des sénateurs de droite, Bruno Retailleau, a reproché au gouvernement un « pari à quitte ou double » : « Personne ne peut dire si vous aurez la semaine prochaine suffisamment de masques pour protéger tous les Français », a-t-il précisé. Mais Bruno Retailleau s’est abstenu.

La droite avait tenu la même position la semaine dernière à l’Assemblée Nationale.

IL est regrettable que la plupart des députés LR se soient abstenus lors de ces deux votes symboliques sur le projet de déconfinement. Qui sont les leaders de l’opposition ? Les socialistes qui, avec les municipales, vont reprendre du poil de la bête ? Ou Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon qui, une fois de plus, capitalisent sur les colères françaises.

Dommage car contrairement à Oliver Faure, premier secrétaire du PS, qui nous servit à l’Assemblée nationale un discours emprunt de lutte de classes, Damien Abad, Président du groupe Les Républicains au Palais Bourbon, et Bruno Retailleau au Sénat, ont tenu un discours ferme et critique, mais constructif et crédible, faisant le pari des libertés, des talents français sur les choix étatiques de la gauche. Les députés et les sénateurs LR avaient toutes les raisons pour voter contre le plan de déconfinement du gouvernement qui est à l’image de ses actions passées et de cette France jacobine et administrative : touffu, imprécis, compliqué…

Pourquoi dès lors s’abstenir lors d’un vote symbolique et conforter le Rassemblement national et la France insoumise, dans leur rôle de premiers, voire d’uniques opposants à l’actuelle majorité ?

Tous les stratèges dans l’entreprise, dans la culture, dans la santé anticipent déjà le monde d’après tout en préparant activement le déconfinement. Il en va de même dans le monde politique. La présidentielle de 2022, – si le Président de la République ne décide pas de tout remettre à plat bien avant et de lancer la refondation d’une République épuisée, administrative et jacobine, comme nous le lui proposions depuis 2017, – la présidentielle donc, c’est maintenant qu’elle se prépare.

L’opposition républicaine de droite ne peut plus s’opposer dans les mots et se contenter de l’abstention dans ses votes ! La France a besoin d’une droite républicaine solide, forte, audacieuse et audible. D’autant qu’Emmanuel Macron nous prépare peut-être un coup de barre à gauche en vue de la présidentielle de 2022. Un espace politique à droite va s’ouvrir. Le pilier droit de la macronie pourrait bientôt se sentir orphelin.

C’est donc le moment d’entendre les droites républicaines, des radicaux valoisiens aux rives de LR, car, dès que les courbes de la pandémie seront retombées, les plus vociférants, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, se feront les porte-voix des Français qui demanderont des comptes.

C’est pourquoi l’opposition républicaine doit être forte. Elle doit être une alternative leader à Emmanuel Macron si celui-ci (et nous ne parlons même pas de LREM) venait à perdre pied politiquement. François Baroin, Xavier Bertrand, Damien Abad, Bruno Retailleau, Christian Estrosi, Valérie Pécresse, Gérard Larcher, Jean-Christophe Lagarde, Hevé Morin, Laurent Hénart, Franck Riester, Rachida Dati et les autres, réveillez-vous !

Le 28 avril, au Palais Bourbon et le 4 mai au Sénat, Les Républicains ont été à la hauteur de l’opposition qu’exige une démocratie vivace. Dans leur discours… jusqu’au moment du vote. S’ils avaient été le premier groupe d’opposition à dire NON, les extrêmes auraient été confinées au rang de groupuscule qui devrait être le leur. Mais en l’état du rapport de force, leur abstention fut une faute politique.

 

Michel Taube

 

 

 

 

 

Directeur de la publication