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17H54 - mardi 21 avril 2020

L’insistant rêve… d’avant. Chronique pour la nouvelle époque de Jean-Philippe de Garate

 

A l’exception notable des enfants, dont on sait la résilience – ce qu’autrefois on nommait simplement la souplesse –, la résistance aux événements qui nous écrasent, nos contemporains semblent convaincus que le monde d’avant va se survivre.

Le monde d’avant, c’était trente ans (1990-2020) d’accords du GATT, de mondialisation, de porte-conteneurs made in China et Bengladesh, des hordes de touristes nomades alourdissant les avions, transporteurs faisant la queue pour décoller et saturer le ciel, alors interdit d’étoiles, de dix millions de start-ups fondées sur la seule valeur -l’argent-, la destruction de l’autre devenu importun, un monde sans dieu, sans réel désir, sans autre fin que la destruction dont, mieux que quiconque, ont rendu compte Bret Easton Ellis -American Psycho en 1991- et Michel Houellebecq, dès Extension du Domaine de la Lutte, 1994.

C’est drôle, personne ne parle plus d’eux, à croire que le dictateur Covid a cousu d’interdit leurs lèvres fines. Peut-être ces grands talents ressentent-ils, mieux que les autres, cette évidence : cette période d’horreur se termine enfin. De toutes les façons, ça ne devenait plus possible. Le « trend », la tendance lourde de ces trente hideuses, c’était la destruction. Destruction en tous sens ! Paysages, paysans, salariés, églises, gares de campagne… avec ce mot d’ordre du RER aux heures de pointe : « Laissez descendre avant de monter ». C’était le monde des flux. Vite, plus vite, sortez pour que le suivant accède au service !  Flux tendus… Vieux à l’EPHAD, et vite au crématorium ! Retraités volés… en gilets gris, jaunes, déjà oubliés ! Chômeurs longue durée « mobilisés » par vingt « formations qualifiantes », jeunes avec contrats pour 24 heures, diplômés Tanguy chez papa-maman. Quant aux enfants, ils n’avaient plus droit ni à l’enfance -sexe avant amour, écran plat plutôt que chahuts- ni à la chronologie. Histoire par thèmes, Islam mais pas Verdun, cousins avant père.

C’est fini. Ou plutôt, il va falloir achever la bête. En commençant par enquêter sur ce qui s’est passé. Ce qu’il s’est vraiment passé. Là-bas, et ici. Wuhan et Paris-La Défense, même la commission parlementaire ! Le vôtre ! Juges indépendants, élus par vous, espérons ! Enfin ! Sauf si vous préférez les tribunaux populaires auto-proclamés. Mais pour commencer, pour que l’hémoglobine demeure encore dans les pipettes, et non épandu ailleurs, ramenons les laboratoires et autres Cahuzaqueries à leur place… loin de la République !

Nous revenons de très loin. Mais le pire n’est-il pas à venir, qui sait ? Il est bien probable que nous ne puissions plus redresser les choses. La meilleure illustration de ce que nous vivons réside dans un vieux grimoire. Villiers de l’Isle-Adam, dans son Conte Cruel « Le désir d’être un homme » raconte l’aventure de ce vieux comédien, un cabotin qui une nuit, se mire dans une vitre d’un quelconque commerce et, se voyant si insipide, si transparent, si inexistant, décide de se muer en incendiaire pour enfin, ressentir de vrais sentiments, un vrai REMORDS.

REMORDS en majuscules parce que, de son phare marin où il s’est fait affecter grâce à l’entregent d’une « bonne camarade », l’ancien second rôle devenu criminel imagine retrouver, par-delà « l’aspect de la mer et de la nuit, ces deux vieilles amies des cœurs déserts », une humanité perdue. Le remords ne viendra pas ! C’est trop tard ! Le conte est décidément cruel parce que, oui ! c’est vraiment trop tard. Monsieur Chaudval – une vallée à l’origine chaude et accueillante, comme la joue d’un enfant – n’est plus qu’un spectre, une seiche desséchée. « Le désir d’être un homme » est grand, désormais impératif ! mais bien trop tardif. Dont acte.

 

Jean-Philippe de Garate

 

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