Edito
07H40 - vendredi 14 juin 2019

« En même temps » Acte 2, scène 1 : le discours de la (nouvelle) méthode du Premier ministre

 

Mardi à l’Assemblée Nationale, Edouard Philippe nous a livré son discours de la (nouvelle) méthode : redonner de l’oxygène à l’en-même temps macronien…

Il n’est pas étonnant qu’Emmanuel Macron, théoricien du « en même temps », soit président de la République. Les Français veulent en effet une chose et son contraire, réclament le beurre et l’argent du beurre, réclament la réforme et la craignent, cultivent confiance et défiance… Tout cela en même temps, bien sûr.

Le sondage Odoxa-Dentsu Consulting réalisé pour France-info et Le Figaro au lendemain du discours de politique générale prononcé par Édouard Philippe à l’Assemblée nationale est assez révélateur de la schizophrénie des Français : toutes tendances politiques confondues, ils sont 52 %, une courte majorité, à approuver les mesures annoncées par le chef du gouvernement.

Ce n’est pas une surprise vu le glissement à droite de l’électorat macronien : même les sympathisants des Républicains approuvent en majorité leur ancien édile.

Certes, seuls 5 % des Français ont suivi le discours du premier ministre en entier. N’est pas joueur (joueuse) de l’équipe de France de football féminin qui veut (10 millions de téléspectateurs lors des deux premiers matchs de l’équipe de France féminine pendant la Coupe du monde). 

Globalement, « en même temps » donc, les Français, du moins les sondés, semblent contents : merci patron pour la baisse des impôts sur le revenu et la dégressivité des allocations chômage (ces fainéants n’ont qu’à chercher du boulot !). Satisfait aussi du mécanisme de bonus-malus pour sanctionner les entreprises qui abusent des contrats courts (on veut des vrais boulots !) et pour l’interdiction du plastique jetable dans l’administration. Là, ils sont même 81 % à approuver la mesure, tout en la jugeant majoritairement anecdotique. Il faut dire que l’écologie a le vent en poupe, à raison bien sûr.

Quant à l’extension de la PMA, qui naguère aurait provoqué l’ire de la Manif pour tous, voire de tout le peuple de droite, elle est désormais approuvée à 56 %. Seule ombre au tableau, le concept « d’âge d’équilibre pour la retraite » dont personne n’est dupe, du moins 66 % des sondés : pour bénéficier d’une pension décente, il faudra travailler plus longtemps, reléguant « l’âge légal » de départ à la retraite à une valeur symbolique. Ça, les Français n’en veulent pas, pas plus d’ailleurs que l’augmentation des cotisations ou l’augmentation des prélèvements (y’a qu’à prendre aux entreprises).

Finalement, on ne change pas une méthode qui n’échoue pas, pas plus qu’une équipe qui ne perd pas (pour la réussite et la victoire, il faudra peut-être attendre 2022). Cet hiver, la République vacillait, le président Macron semblait perdu et son quinquennat terminé. La veille des élections européennes, Édouard Philippe préparait ses bagages et Jean-Yves Le Drian, ministre des Affaires étrangères, se préparait à entrer à Matignon. Et voilà qu’aujourd’hui, la route du second quinquennat semble se dégager et les Français résignés à accepter que tout n’est qu’une chose et son contraire. En même temps, bien sûr !

La semaine prochaine, ce n’est pas l’humeur des Français, mais le contenu des mesures de l’acte 2 du quinquennat (flop ou pas) qui focalisera notre attention et notre analyse : retraite, écologie, PMA, impôt, laïcité… Réformes, réformettes, poudre aux yeux ? À suivre, donc. 

 

Michel Taube

Directeur de la publication