République centrafricaine
11H57 - vendredi 31 janvier 2014

Catherine Samba-Panza, la dame de fer aux pieds d’argile

 
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La nouvelle présidente de Centrafrique, Catherine Samba-Panza

Réussira-t-elle ou ne réussira-telle pas ? A-t-elle la capacité et la volonté de réussir cette transition ou n’est-elle qu’une marionnette entre les mains de ceux qui font et défont la République centrafricaine depuis des décennies ?

Voilà déjà deux semaines que Catherine Samba Panza a été élue présidente de la transition en remplacement de Michel Djotodia démissionnaire. Tout le peuple a acclamé son élection et met tout son espoir en elle. Deux jours après, elle nommait un nouveau Premier ministre André Nzapayeké qui vient de former un nouveau gouvernement de transition.

Une femme forte au destin inédit

Mais qui est la nouvelle présidente de la République Centrafricaine ? Catherine Samba-Panza est un exemple de l’intégration sous-régionale africaine. Née au Tchad le 26 juin 1956 à Fort-Lamy, d’un père camerounais et d’une mère centrafricaine, Catherine Samba-Panza a fait le choix de renoncer à sa nationalité camerounaise pour n’être que Centrafricaine. Titulaire d’une licence en sciences de l’information et de la communication et d’un diplôme d’études supérieures spécialisées (DESS) en droit des assurances obtenus à l’université Panthéon-Assas, elle retourne à Bangui en 1990 pour embrasser une carrière dans l’assurance dans une des filiales du groupe Allianz. Puis, elle négocie son départ et crée sa propre société d’assurance mais sans grand succès. Militante des droits des femmes, membre de l’Association des Femmes Juristes, elle co-préside en 2003 le Dialogue national avant d’être élue présidente du Comité de suivi et d’évaluation.

A l’image de son imposant chignon, on la décrit comme une femme ferme, autoritaire et dure mais aussi comme une professionnelle compétente et expérimentée au caractère bien trempé.

Les événements de l’année 2013 accélèrent son destin politique : en mai de l’année dernière, elle est nommée par décret Chef de la délégation de la ville de Bangui, maire de la capitale en somme. D’aucuns ont été surpris de la voir participer ainsi au régime de la Seleka, décrié par la majorité de la population. C’est là que commencent les interrogations sur sa fidélité ou non à Michel Djotodia. Est-elle une Seleka ou une femme qui a souhaité sauver son pays ?

En pleine poussée de violence en décembre dernier, dans une interview, Catherine Samba-Panza affirme que Bangui est « calme » alors que des centaines de Centrafricains sont victimes d’exactions, de viols et de violences perpétrés par les éléments de la Seleka et les milices anti-balaka. Là encore, ses détracteurs dénoncent sa proximité avec le régime de la Seleka car elle reste muette à l’époque.

Aux lendemains de l’intervention militaire de la communauté internationale et des accords arrachés à N’Djamena qui scellent le départ et l’exil du président Djotodia, le Conseil National de Transition (CNT) issu des Accords de Libreville élit le nouveau président de la République. Sur les huit candidats retenus, c’est elle, un peu à la surprise générale, Catherine Samba-Panza, qui, au second tour, l’emporte sur Désiré Kolingba, fils de l’ancien Président André Kolingba, par 75 voix contre 53.

Premières déceptions et présomption de confiance

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 Le Chef d’Etat de la Transition est donc une femme. Une petite révolution dans ce pays dominé par des hommes qui s’entretuent depuis des décennies sur le dos des Centrafricains.

La nouvelle dirigeante centrafricaine aura-t-elle les coudées franches ou devra-t-elle remercier ceux qui l’ont élue, c’est-à-dire les conseillers fidèles à Michel Djotodia ?

Reste aussi l’équation régionale : Catherine Samba-Panza semble plutôt soutenue par la Communauté internationale, le groupe des amis de la Centrafrique. Mais force est de constater que lors de sa prestation de serment, seul le Chef d’Etat du Gabon, Ali Bongo, a fait le déplacement. Aurait-il l’intention de renouer avec les pratiques de feu son père Omar Bongo qui incontestablement a toujours été le parrain des Chefs d’Etat qui se sont succédés en RCA, bien avant qu’Idriss Déby Itno, président du Tchad, veuille jouer ce rôle.

La nouvelle présidente a marqué un point en nommant contre vents et marées le Premier ministre de son choix, André Nzapayéké. Elle a été là encore une fois applaudie par tous.

La première véritable déception, en revanche, est venue de la nomination des membres du gouvernement : des membres de la Seleka raflent les postes clés, ainsi que des membres issus de sa famille et provenant de sa région. Dans son premier discours à la Nation, elle avait parlé de rupture, de changement et d’un gouvernement de technocrates sans privilégier le relationnel. La déception est ici de mise.

Arrivera-t-elle ou n’y arrivera-t-elle pas ? Saura-t-elle adopter une ligne politique centrale, équilibrée entre toutes les parties ? L’essentiel de son mandat va consister à sécuriser le pays, à préparer les prochaines élections (auxquelles elle s’est engagée à ne pas se présenter) et à semer les graines de la réconciliation nationale.

Les charges et responsabilités sont immenses pour ses frêles épaules de « maman » mais gageons que sa détermination saura vaincre les rivalités qui gangrènent le pays. L’avenir de la Centrafrique en dépend.

Journaliste, chef de la rubrique Centrafrique

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