La Citoyenne
14H54 - vendredi 12 avril 2013

La mobilisation contre les mutilations génitales féminines a lieu désormais à tous les niveaux

 

Tandis qu’au niveau local, une quatrième cérémonie Dropping of the knife va avoir lieu en Gambie le 13 avril, la Communauté internationale prend davantage de mesures contre le fléau des mutilations génitales féminines. 

FGM

Des ex-circomciseuses lors d’une cérémonie en Gambie.

Le 21 décembre 2012, l’ONU a adopté une résolution historique exhortant les Etats à éliminer les mutilations génitales féminines (MGF), « à prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver les filles et les femmes de ces pratiques, en faisant appliquer la législation, en sensibilisant et en allouant des ressources suffisantes pour les protéger de cette forme de violence » selon les mots de Ban Ki-Moon, secrétaire général des Nations Unies.

L’Organisation Mondiale de la Santé définit les MGF comme « toutes interventions faites sur les organes génitaux externes des femmes sans motif médical ». L’excision du prépuce – avec ou sans ablation partielle du clitoris – est la forme la plus connue de ces mutilations sexuelles, mais il en existe trois autres types, plus horrifiants les uns que les autres. L’ONU estime que plus de 120 millions de filles et femmes vivent ainsi dans le monde, sachant que vingt-neuf pays d’Afrique et du Moyen-Orient continuent de pratiquer des MGF.

Bien que des millions de filles risquent encore de subir de telles mutilations, les différentes communautés commencent à abolir cette pratique. Ainsi, l’ONU avance que « 36% des filles âgées de 15 à 19 ans l’ont subie en moyenne, contre environ 53 % des femmes âgées de 45 à 49 ans » dans les vingt-neuf pays. Ce recul est dû au travail de plusieurs acteurs. Le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) notamment, a lancé en 2008, avec le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF), le Programme commun sur la coupure/mutilation génitale féminine. Depuis, près de dix mille communautés réparties dans quinze pays auraient renoncé à pratiquer les MGF.

Le travail crucial des ONG

Les organisations non-gouvernementales sont très nombreuses à se mobiliser pour sensibiliser les communautés sur la question. En Gambie, il existe depuis 1984 le Gambia Committee on Traditional Practices Affecting the Health of Women and Children (GAMCOTRAP) qui combat les MGF et le mariage des enfants.

Dr Isatou Touray

Dr Isatou Touray

Sa directrice exécutive, Dr. Isatou Touray, met en évidence que les MGF sont basées sur une série de mythes. En premier lieu, l’idée que cette pratique est inscrite dans le Coran, alors qu’il n’en fait pas mention. En outre, certaines communautés pensent qu’une femme non circoncise leur amènerait le mauvais œil. Dr Touray affirme que ces superstitions découlent avant tout de la peur du plaisir féminin, et ont par conséquent pour but le contrôle de la sexualité féminine et des femmes.

Les campagnes de sensibilisation de GAMCOTRAP, menées par des personnes partageant la même culture et venant d’un même milieu – une donnée importante -, ont finalement payé. Entre 2007 et 2011, près de 600 communautés gambiennes auraient ainsi abandonné la pratique des MGF. Trois cérémonies « Dropping of the knife » (« L’abandon du couteau ») ont par ailleurs été organisées, lors desquelles des ‘circonciseuses’ déclaraient officiellement cesser de pratiquer des MGF. La prochaine cérémonie a lieu le 13 avril 2013.

Un problème à l’échelle mondiale

La sensibilisation aux MGF doit tout autant avoir lieu en Europe, qui accueille des migrantes et filles de migrants ayant subis cette pratique. Ainsi, l’on estime un total de 53 000 femmes adultes excisées résidant en France, bien que ce soit interdit par le Code Pénal. Dans son Plan de lutte contre les violences faites aux femmes 2011-2013, le gouvernement français singularise les MGF et élabore une série de mesures spéciales pour lutter contre cette pratique, mettant l’accent sur l’éducation et la formation. Or, seule une minorité de médecins recevraient une formation conséquente sur les mutilations sexuelles et les problèmes de santé, tant physiques que psychologiques, qu’elles entrainent.

De même en Angleterre, peu de médecins, gynécologues et sages-femmes sont bien informés sur les MGF et comment y faire face. C’est pourquoi l’ONG Forward sillonne le pays afin de sensibiliser au problème et de lever des fonds pour les cliniques spécialisées. D’autant plus que, selon Saria Khalifa de Forward, comme les services de santé anglais n’ont traditionnellement pas à faire face à ce genre de pratiques, ces cliniques spécialisées sont trop souvent marginalisées et ont peu de moyens matériels et humains.

Vivianne Reding soutient la campagne ZeroFGM.

Vivianne Reding soutient la campagne ZeroFGM.

Un groupe d’ONG européennes, réunies dans la campagne ‘End FGM (Halte aux mutilations génitales féminines)’, ont fait pression à l’Union Européenne pour l’adoption d’une stratégie globale de lutte contre les FGM. Elles demandent également à l’UE de garantir la protection des personnes risquant d’être mutilées, évaluées à 180 000 filles en Europe. La Commission européenne a finalement répondu à ces appels. Le 6 février dernier, la commissaire Cecilia Malmström et Viviane Reding, Vice-Présidente de la Commission européenne et Commissaire à la Justice, ont rejoint la campagne Tolérance zéro pour les mutilations génitales féminines. Ce même jour, la Commission européenne a lancé une consultation publique sur le sujet jusqu’à fin mai 2013, et s’est engagé à aider financièrement les programmes de sensibilisation aux violences faites aux femmes des Etats et ONG, à hauteur respectivement de 3,7 millions d’euros et 11,4 millions d’euros.

Journaliste à Opinion Internationale et coordinatrice de la rubrique La Citoyenne.

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